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LE MONSTRE, OU LE SENS DE L'ECART ESSAI SUR UNE ...

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tel-00846655, version 1 - 19 Jul 2013<br />

d’entendement, puisque celui-ci n’a affaire qu’à de tels concepts. Le principe logique des<br />

genres suppose donc un principe transcendantal pour pouvoir être appliqué à la nature (et ici,<br />

par ce mot, j’entends seulement les objets qui nous sont donnés). 1<br />

Or nous avons vu justement que la notion de type chez Geoffroy Saint-Hilaire était<br />

accouplée à l’idée d’espèce, comme si nous ne pouvions pas penser la seconde sans le<br />

premier, comme si la science naturelle réclamait la supposition préalable du type pour pouvoir<br />

ensuite généraliser et systématiser les connaissances à partir des faits individuels. Nous<br />

pouvons interpréter, dans un sens fort, la présence du type comme la condition même de<br />

possibilité de la science biologique, puisque c’est « au seuil même de la science » ou « dès le<br />

commencement même de la science » 2 que notre esprit doit postuler le type commun pour<br />

pouvoir connaître d’une part et établir la systématicité de ses connaissances d’autre part. Or<br />

n’est-ce pas voir là le propre même d’une idée régulatrice ? Par ailleurs, le type commun a<br />

pour fonction de ramener à l’unité – Geoffroy Saint-Hilaire citant Buffon parle des unités<br />

permanentes de la nature – le divers des productions de la nature. Il est vrai toutefois que nous<br />

prenons ici nos libertés avec les thèses kantiennes proprement dite, puisque l’idée<br />

transcendantale de la raison pure ne ramène pas le divers des objets à l’unité, mais le divers<br />

des concepts de l’entendement à l’unité. C’est parce que l’idée du type commun a pour ainsi<br />

dire directement affaire aux individus, et non aux seuls concepts de l’entendement, que son<br />

usage comme simple et pure idée régulatrice est ambigu.<br />

En termes kantiens, les principes régulateurs de la raison appellent à faire de celle-ci<br />

un usage hypothétique, où l’unité ainsi que les règles par elle établies ne sont que<br />

problématiques 3 . Ils ne font que dessiner une direction, une voie dans laquelle l’entendement<br />

est commandé de s’engager par la raison s’il veut, en quelque sorte, « finir » le travail qu’il a<br />

entrepris. Ce commandement ne lui vient pas de la nature des objets qu’il examine, mais lui<br />

vient des principes a priori nécessaires de la raison. Le problème du type commun est qu’il<br />

est une abstraction de notre esprit, cette abstraction fût-elle première et nécessaire.<br />

L’ambiguïté réside dans cette idée d’abstraction. Certes, elle est nécessaire et première, ce qui<br />

nous a fait dire qu’elle pouvait être assimilée à la condition de possibilité de la science<br />

naturelle et qu’elle pouvait avoir la fonction de diriger et unifier les connaissances. Mais d’où<br />

le type commun est-il abstrait sinon des individus ? C’est en comparant les individus que nous<br />

nous élevons à l’idée de type commun. N’avons-nous pas affaire à une induction empiriste ?<br />

Or les idées transcendantales comme principes régulateurs sont a priori. Le problème semble<br />

que l’idée de type commun est le résultat d’une comparaison entre les individus loin d’être, à<br />

1 Ibid., pp. 457-458.<br />

2 Geoffroy Saint-Hilaire, HGRO, op. cit., p. 364 et p. 365.<br />

3 « L’usage hypothétique de la raison a donc pour objet l’unité systématique des connaissances de l’entendement,<br />

et cette unité est la pierre de touche de la vérité des règles. Réciproquement, l’unité systématique (comme simple<br />

idée) n’est uniquement qu’une unité projetée que l’on doit regarder non pas comme donnée, mais comme<br />

problématique et qui sert à trouver un principe au divers et à l’usage particulier de l’entendement et, par là, à<br />

diriger ce dernier vers les cas qui ne sont pas donnés et à le faire s’accorder avec lui-même », Kant, Critique de<br />

la raison pure, op. cit., p. 455.

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