Le royaume d’Icare

Frère Thomas veut en discuter mais la décision de John
est déjà prise. Le recruteur que lui présente le frère Thomas,
d’ailleurs un peu contrarié d’avoir à le faire, n’est nul
autre que le « Ch. J. Bennett » de ses livres d’échecs, sept fois
champion d’Angleterre. Un spécialiste de la hollandaise et de
l’espagnole. Lors des deux dernières compétitions pour les
jeunes auxquelles John a participé, le maître est venu personnellement
regarder ses parties.
— Certes, concède le diplomate, il existe un risque minime.
On ne te demandera rien qui outrepasse tes capacités.
Ceci dit…
Sir Bennett fixe l’adolescent dans les yeux. Un rappel ombrage
sa figure :
— Nous ne pouvons pas tout prévoir. Il arrive qu’un malheur
survient.
— Comme pour mes parents.
— Si tu refuses, je t’aiderai de toute manière pour les
échecs. Tu as un talent indéniable.
— J’accepte.
— Ne voudrais-tu pas y réfléchir un peu avant de te décider,
John suggère doucement frère Thomas.
— Tu peux prendre ton temps, confirme le diplomate.
— Quelle alternative ai-je Je veux jouer aux échecs.
Voilà John transformé en riche orphelin suédois qui
voyage d’une ville à l’autre en quête de maîtres à affronter
pour satisfaire sa passion du jeu. Il en profite pour observer
le voisinage : la fréquence des départs et des arrivées des navires,
le nombre de militaires dans les camps, la quantité de
vivres dans les magasins, de wagons arrimés aux trains, leur
type de chargement. John peut évaluer une foule ou un tas
d’objets à moins d’un pour cent près s’il dispose d’une ving-
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