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Le royaume d’Icare

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le quotidien. <strong>Le</strong> chien de garde grommelle, montre en main,<br />

quand Jonathan se hisse au wagon in extremis avec sa lourde<br />

valise.<br />

<strong>Le</strong> calepin, c’est son hymne aux singes. L’ensemble de ses<br />

notes sur le déploiement de l’ouverture « orang-outan »,<br />

comme les chroniqueurs l’ont baptisée après que le Hollandais<br />

eût confessé l’anecdote du zoo. Tandis que ses adversaires<br />

découvrent l’Amérique, l’autochtone les épie en train<br />

de piocher sur des sentiers inconnus. Au moment opportun,<br />

il les dépouille de la victoire, en Robin des bois de la raison.<br />

<strong>Le</strong> juste se ressourcera dans les boisés de la pensée, délestant<br />

l’avare de ses raisons. On l’affichera en dédain public. Un mal<br />

nécessaire plaideront les corbeaux du Malin. À ses trousses, la<br />

Bête lancera ses chiens.<br />

Sur la banquette d’en face un jeune fils et ses parents ouvriers<br />

mangent du pain. Nez à la vitre, Boey observe l’agitation<br />

de la gare. <strong>Le</strong> martèlement du métal contre le métal. La<br />

ville, un Léviathan, monstre aux proportions bibliques. La<br />

toile de la Bête capturera l’innocence errant. <strong>Le</strong>s travailleurs,<br />

cadavres animés, attendront de devenir sa brève collation.<br />

Gourmande, la bête sera. En araignée, à vous elle pensera.<br />

Une fourmilière industrieuse où la femme n’est plus<br />

qu’une machine à reproduire la chair à machine, songe Jonathan,<br />

tête à la vitre. Où l’âme se perd en conventions à respecter<br />

pour le profit des uns. Où la vie se perd à fabriquer les<br />

ustensiles de la survie usinée. Où le libre arbitre se perd en<br />

dominations concédées, main levée au parti pris. L’opinion<br />

d’aucun rassemblée sera Vérité clamée à l’unisson. Chacun<br />

adhérera à ces rêves étrangers au rêve, à ces Évangiles qui prônent<br />

la multiplicité des destinées.<br />

La lettre. Dans son veston. Paris aussi chasse la nature en<br />

périphérie de son nombril de pierre. La ville poème, comme<br />

l’appelait Grâce. Des terres devenues un simple collage de labeurs<br />

spécialisés. Des arbres esseulés mis en pots. Des aires<br />

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