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Cyvard MARIETTE Louis-Claude Saint-MARTIN Les Décennies 19 ...

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une foule de penseurs illustres (1) 12 , que la raison et la conscience pouvaient se rallier à ce<br />

dogme, en tant qu'on ne le séparerait jamais de la doctrine consolatrice d'une réhabilitation, et<br />

que non seulement ils peuvent s'y rallier, mais qu'ils lui fournissent à leur tour la plus<br />

imposante sanction.<br />

Je ne pense pas que l'école sociétaire attache une grande importance à la solution qu'a donnée<br />

son fondateur du problème de l'origine du mal ; il est évident qu'il n'a traité ce sujet<br />

qu'accessoirement, soit qu'il le jugeât en dehors de son but, ou que la direction habituelle de<br />

ses idées ne lui permît pas de s'en occuper avec le soin qu'il réclame à un autre point de vue.<br />

M. Fourier s'est borné à peu près à cette simple assertion, que le Créateur ne pouvait<br />

empêcher la prédominance du mal dans l'enfance et la décrépitude d'un globe. C'était trancher,<br />

au lieu de la résoudre, la plus grave de toutes les questions religieuses. Il n'est pas hors de<br />

propos de remarquer ici que cette solution ne se lie en aucune façon à tout le reste du système<br />

sociétaire, qu'elle semble même le contrarier visiblement. Une des plus belles idées de M.<br />

Fourier,<br />

. [428] qu'il a eue en commun avec les mystiques, est celle de la régénération de la nature,<br />

comme conséquence directe de celle de l'humanité ! Il a dit dans le même sens et avec la<br />

même portée que saint Paul : toutes les créatures gémissent attendant de l’homme leur<br />

délivrance. Il a représenté cette nature, impatiente de procéder à de plus belles créations,<br />

enchaînée par le désordre dans lequel persistent les sociétés. Comment, dès lors, l'humanité,<br />

pivot du monde, élément libre destiné à régir l'élément fatal, a-t-elle pu être arrachée par<br />

celui-ci à l'état de bonheur dont il nous la montre en possession dans Éden. Il a bien fallu,<br />

dans l'ordre des idées de cet écrivain, que l'humanité engendrât elle-même le mal moral ou<br />

social dont elle a été la victime, et que, par suite, la nature, esclave docile, engendrât le mal<br />

physique, par une création subversive rigoureusement correspondante à la subversion qui<br />

avait eu lieu dans l'élément supérieur ; il l'a bien fallu, dis-je, puisque la restauration de<br />

l'humanité dans l'état primitif de bonheur, ou état sociétaire, par la pratique universelle de la<br />

justice et de la vérité, pourra seule opérer, par correspondance, la restauration de la nature. Le<br />

principe analogique dépose donc contre l'hypothèse de M. Fourier sur l'origine du mal. Le<br />

principe attractionnel et le principe téléologique lui sont formellement opposés. En vertu du<br />

premier, tout ce que l'homme n'aimera jamais, tout ce qu'il ne saurait désirer, est absolument<br />

mauvais et n'a qu'une existence factice. Le mal est le schisme de l'être, et à ce titre n'a pas<br />

d'existence per se. On doit donc supposer, si l'on se laisse diriger par le flambeau de<br />

l'attraction, que la décrépitude et la mort, cette mort qui sera toujours le roi des<br />

épouvantements, disparaîtront ; car elles constituent la victoire de l'élément fatal sur l'élément<br />

libre. Aussi l'Écriture dit-elle que le dernier ennemi qui sera vaincu c'est la mort. En vertu du<br />

second principe, qui est celui des causes finales, l'âme et la vie de toute la théorie sociétaire, le<br />

but de la création, à savoir l'état heureux et glorieux de l'humanité et du globe, ce [429] but<br />

une fois atteint, pourquoi les ferait-on retomber dans l'incohérence et le malheur ? Il faudrait<br />

faire de cet article un volume, pour donner seulement une faible esquisse de la théosophie de<br />

Bœhme et de <strong>Saint</strong>-Martin. Nous avons dû nous borner à indiquer son point de départ et son<br />

caractère principal, son étroite connexion avec l'état présent de la culture intellectuelle, en<br />

France et en Allemagne. La citation de <strong>Saint</strong>-Martin, par laquelle nous allons terminer ce<br />

travail, nous paraît ne pouvoir manquer de frapper les hommes disposés à regarder comme<br />

chimérique, ou comme trop vague, le rapprochement de doctrines qui en est la principale<br />

pensée. Ils y remarqueront encore un point commun entre le christianisme mystique et l'école<br />

sociétaire, le désir d'arracher l'homme h la passivité fataliste avec laquelle il se résigne au mal,<br />

que les fausses religions lui font considérer comme une expiation utile, tandis qu'a titre<br />

d'administrateur de la terre, seul organe de la Providence divine, l'homme doit sentir qu'il n'est<br />

12 (1) Fabre d'Olivet, Ballanche, de Maistre, Hoëne Wronsky, etc.<br />

décennies 1830_1839<br />

41

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