doux et involontaire l'espèce humaine entière parvenue à son sommet palingénésique. Ainsi se développe un régime pénitentiaire à la perfection duquel ne parviendront jamais ceux qui s'occupent de cette partie si intéressante et si vive de l'économie sociale. Et afin que l'immense conception de M. Ballanche soit entièrement accomplie, afin que l'on ne puisse se tromper sur la portée chrétienne de sa conception du progrès humain, [84] suivezle dans la vision d'Hébal. Là, passant dans une revue rapide, et comme sous l'influence du vertige et de l'extase, l'histoire universelle de la race humaine, et se projetant dans l'avenir infini, voilà le théosophe qui achève sa pensée, et se perd dans la contemplation des temps derniers où la perfection indéfinie de la terre sera devenue la perfection infinie du ciel. Ici, cette pensée ramenée au christianisme achève de s'engloutir dans les visions apocalyptiques, ainsi qu'elle avait pris pour son point de départ le premier chapitre de la Genèse et la promesse de la rédemption. On comprend un système de perfectibilité qui parle de se réaliser dans l'homme religieux, dans l'homme immortel. M. Ballanche appartient dans ses développements à l'école de Vico ; mais sa philosophie s'est entée sur une tige chrétienne. Le principe religieux ne l'embarrasse pas comme Vico, il n'a pas hâte d'en sortir, il s'y enferme au contraire, et dans ce cercle il trouve une dilatation immense, qui toujours s'élargit, à mesure que les races humaines [83] marchent dans le temps et s'accroissent dans la lumière. Disciple, dans l'origine, du théosophe de Maistre, Ballanche a repoussé du pied la barrière trop étroite dont celui-là étouffait la liberté du disciple et son besoin d'air, sa soif d'espace infini. En admettant avec de Maistre la sublime solidarité qui fait la vertu du sacrifice chrétien, il pense que ce dernier sacrifice a tout accompli ; que désormais ce n'est pas du sang qu'il faut, mais l'oblation de l'intelligence et du cœur. Il pense que le christianisme a brisé la chaîne de fer dont les cultes antiques avaient muré les consciences humaines ; et déjà on sent, à chaque page de cet ami de l'humanité, tressaillir l'hymne qu'il prépare pour le jour où la peine de mort abolie deviendra la plus haute, et non pas encore la définitive initiation à laquelle l'espèce humaine sera parvenue. Le point de départ de M. Ballanche est autrement pur que celui de Herder : il a rompu tout-àfait avec le naturalisme antique; et, bien que son imagination fertile emprunte à [85] cette nature de brillantes couleurs, l'homme qu'il envisage, ce n'est pas l'homme sortant par l'art et la puissance des siècles d'une nature inférieure, mais jaillissant à la parole de Dieu, son corps du limon, son âme du souffle divin. Ballanche s'est donc placé dans le centre vivant des antiques traditions chrétiennes. Ce qui distingue surtout notre philosophe de Herder, c'est la pensée beaucoup plus religieuse et plus élevée qui semble le rapprocher de l'illuminisme de <strong>Saint</strong>-Martin, à part des ténèbres mystiques qui altèrent ce dernier théosophe ; c'est la base chrétienne qui supporte toutes ses théories idéales, cette loi première, universelle, de l'initiation douloureuse par laquelle chaque homme, chaque peuple, le monde entier ont passé, passeront dans leurs phases de renouvellement ; c'est l'idée primitive de L'ÉPREUVE et de L'EXPIATION, idée sainte qui a sa racine dans celle de la chute et de la réintégration de l'homme, et qui forme le double tissu de la vie de l'homme ici-bas, jusqu'à ce que, la [86] dernière épreuve étant consommée, l'humanité subisse sa définitive transformation, pour être de là tout entière transfigurée et renouvelée dans le ciel. La philosophie de Ballanche est calme, assurée, pleine d'avenir. Ne croyez pas que le bruit des révolutions qui vient, aussi lui, le heurter dans sa retraite, et contrister son âme placide et méditative, l'épouvante sur le sort de l'humanité ; non, il y voit plutôt l'espérance du progrès ; car c'est à la société qu'il a été dit, comme à la première femme : « Tu enfanteras avec douleur. » Et sait-il si du sein de ces commotions violentes ne sortira pas le rayon consolateur qui doit rasséréner la terre, et accélérer la marche progressive de l'humanité, de manière à la transporter, comme dans un tourbillon, de 'sommets en sommets, en lui épargnant la fatigue d'un pas-à-pas journalier ? décennies 1830_1839 50
Parmi les théoriciens du passé et de l'avenir social, nul ne s'est mis au premier plan comme M. Ballanche; nul n'a parlé avec cette foi, cette candeur; nul n'a revêtu un plus [87] grand nombre de vérités de ce style que l'on oserait appeler évangélique, tant il s'y montre une force intérieure et cachée, sous l'empreinte d'une diction doucement colorée, sereine, persuasive, pleine de conviction. M. Ballanche a des rivaux, il n'a pas de maîtres. M. Cousin a la pensée plus puissante; sa parole aussi, comme son regard, ébranle et déconcerte ; c'est un torrent qui suffit à déraciner les chênes, mais s'il n'a pas triomphé soudainement, il passe, il ne revient plus. M. Ballanche est un fleuve majestueux qui ne passe et ne tarit jamais, qui vous charme par les mille accidents qu'il reflète, qui vous environne de ses flots rafraîchissants dans lesquels il y a plaisir à descendre, tant la sérénité parfaite de son âme se déploie dans son éloquence, et se montre comme le sable pur sous la surface étincelante d'une eau tranquille, constamment dorée par le soleil. § III … Affichage du livre entier décennies 1830_1839 51
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