Traduction d'Alphonse Fresse-Montval - Notes du mont Royal

LES TRAVAUX ET LES JOURS. 279
Jupiter, quelquefois, en décide autrement,
120 Mais l'homme, à le prévoir, parvient mal aisément.
Ne crains rien toutefois d'un tardif labourage,
Si, dès que le coucou gémit sous le feuillage,
Aux mains de Jupiter tout-à-coup échappant,
Durant trois jours entiers, l'eau du ciel se répand,
125 Mais sans que des sillons la semence se noie ;
Alors, de (es labeurs n'attends que de la joie.
Étudie et retiens quels pronostics divers,
Ainsi que le printemps, présagent les hivers :
Cours au foyer banal offert à l'indigence,
150 Ou chez le forgeron, dès que l'hiver commence
Et tient le paresseux captif dans ses liens.
L'homme ardent au travail, soignant alors ses biens,
Ne va pas, quand l'hiver afflige au loin la terre,
Ses pieds entre les muins, croupir dans la misère,
135 Ou, crédule jouet d'un espoir toujours vain,
Chercher dans l'infamie un remède à la faim ;
Car, pour l'infortuné sans ressource et qui reste
Oisif au cabaret, l'espérance est funeste;
Mets donc pour tes labeurs à profit le beau temps,
140 Car l'été passe vite, et vite le printemps.
Désastreux sont les jours que janvier te ramène,
Quand de hideux glaçons se hérisse la plaine,
Et qu'A travers la Thrace opulente en chevaux
Le vent souffle, et des mers soulève au loin les eaux;
145 Les bois en sont tremblants, et la terre ébranlée.
De la cime des monts roulent dans la vallée
Les chênes, les sapins au feuillage orgueilleux ;
L'orage en tourbillons se propage en tous lieux ;
Dans les bois mugissants, la brute a, sous son ventre,
150 Serré soudain sa queue en regagnant son antre.