25.06.2013 Views

télécharger la revue - CNC

télécharger la revue - CNC

télécharger la revue - CNC

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

conversation parisienne<br />

Volontiers tourné vers <strong>la</strong> création cinématographique américaine, Pierre-Paul Puljiz a produit<br />

les documentaires disponibles au catalogue Images de <strong>la</strong> culture sur John Waters, Larry C<strong>la</strong>rk,<br />

Paul Morrissey ou encore Jonathan Caouette. En 2010, il a réalisé New York Conversations<br />

qui saisit en Super 8 des moments de <strong>la</strong> vie de jeunes artistes autant dans le domaine<br />

du cinéma que des arts p<strong>la</strong>stiques ou de <strong>la</strong> musique. Premier d’une trilogie, ce film précède<br />

des conversations à Mexico et Buenos Aires. Entretien autour d’un p<strong>la</strong>t de spaghetti à l’encre<br />

de seiche.<br />

Comment vous est venue l’idée<br />

de ces conversations entre artistes<br />

de <strong>la</strong> scène new-yorkaise ?<br />

J’étais plongé depuis trois ans dans un univers<br />

de documentaires [Andy Warhol – Back to<br />

China, 2009, après deux autres documentaires<br />

produits en 2005 et 2006 sur Warhol également,<br />

Basquiat, une vie, 2010, Monsieur Hubert<br />

de Givenchy, 2011]. Je n’en pouvais plus des<br />

morts, des vieux… New York Conversations<br />

fut une manière de me raccrocher à <strong>la</strong> création<br />

contemporaine. Je rêvais de réaliser quelque<br />

chose sur le photographe Dash Snow et l’artiste<br />

Dan Colen. Mais Dash est mort en 2009 et<br />

Colen était trop mal en point. Après sa désintoxication,<br />

il a tout de même accepté l’idée<br />

d’un entretien avec le journaliste Glenn O’Brien<br />

et <strong>la</strong> machine s’est enclenchée : leur conversation<br />

fait partie du film. Par ailleurs, j’avais en<br />

tête une série de portraits de jeunes stars du<br />

cinéma américain, comme Chloë Sevigny ou<br />

Michaël Pitt. CinéCinéma, avec <strong>la</strong>quelle je travaille<br />

beaucoup, m’a plutôt suggéré un documentaire<br />

patchwork sur tous ces acteurs. Ce<strong>la</strong><br />

ne me disait rien mais m’a donné l’idée de rassembler<br />

une scène artistique dans un film et<br />

de mettre en œuvre <strong>la</strong> réflexion menée depuis<br />

longtemps sur <strong>la</strong> manière d’y insérer les conversations.Tout<br />

ce<strong>la</strong> a donné New York Conversations,<br />

qui introduit <strong>la</strong> jeune génération des<br />

réalisateurs, des créateurs new-yorkais, sous<br />

forme d’entretiens.<br />

Pourquoi avoir choisi ces images assez<br />

précaires, ces p<strong>la</strong>ns hachés, ces sautes<br />

brusques d’une scène à l’autre, qui distancient<br />

tant le spectateur ?<br />

Il fal<strong>la</strong>it éviter <strong>la</strong> monotonie. Le Super 8 a produit<br />

dans les années 1970 et 80 les plus belles<br />

images de New York. Comme les pellicules ne<br />

durent pas plus de 3 minutes 20, les conversa-<br />

tions ont toutes une durée identique ; mais<br />

finalement, l’interruption de <strong>la</strong> caméra nous<br />

échappait. Et puis certaines images ont disparu<br />

au développement, à <strong>la</strong> lumière – voire au<br />

tournage lui-même. Nous avons pleinement<br />

intégré au film cette notion d’art by accident,<br />

lors du montage – on était d’ailleurs tellement<br />

emballés par ces accidents qu’il a fallu se<br />

modérer un peu ! Autre contrainte intégrée au<br />

film : le stock de pellicules de jour ou d’intérieur,<br />

de couleur ou de noir et b<strong>la</strong>nc était fixe.<br />

Ce<strong>la</strong> nous a imposé des choix en fonction de<br />

ce qu’il nous restait – pas toujours de ce qu’il<br />

nous fal<strong>la</strong>it. Ce<strong>la</strong> ajoute aux mouvements de<br />

caméra une alternance entre le noir et b<strong>la</strong>nc<br />

puis <strong>la</strong> couleur.<br />

Et que dire du mouvement perpétuel<br />

de <strong>la</strong> caméra, jamais fixe ? Ce<strong>la</strong> donne<br />

un peu le mal de mer mais confère un rythme<br />

par lequel on se <strong>la</strong>isse finalement bercer.<br />

J’avais en tête B<strong>la</strong>nk Generation d’Amos Poe<br />

[1976], sur les groupes punks à New York : le<br />

bougé de caméra y est très présent, le son et<br />

l’image ne sont pas forcément synchronisés.<br />

Ce<strong>la</strong> me rappelle qu’il y a trois ans, lors d’une<br />

intervention à Pékin auprès d’étudiants, j’ai<br />

été constamment interrompu par une élève<br />

qui tentait de comprendre l’intérêt de ce mouvement<br />

incessant. En vain : elle était totalement<br />

imperméable à l’idée qu’il s’agisse d’une<br />

démarche artistique ! Et puis cet effet retranscrit<br />

le sentiment d’urgence, d’agitation, propre<br />

à New York ; propre aussi à <strong>la</strong> situation dans<br />

<strong>la</strong>quelle nous étions pour ce tournage – équipe,<br />

temps et moyens réduits.<br />

Vous venez de produire Walk away Renée<br />

de Jonathan Caouette et, en 2006, vous aviez<br />

produit et réalisé un documentaire<br />

sur Caouette lui-même (Jonathan Caouette<br />

as a Film Maker). Pourquoi cet engouement<br />

pour lui ?<br />

Ah oui, il faut que je vous explique comment on<br />

en est arrivés là, c’est assez comique. En 2003,<br />

je travail<strong>la</strong>is avec Paul Morrissey et John Waters.<br />

Tous deux me conseillèrent de rencontrer<br />

Caouette qui venait de sortir Tarnation. Je savais<br />

à peine de qui il s’agissait et je n’avais pas<br />

retenu son nom. Au festival de Cannes en 2004,<br />

je le rencontre in extremis le dernier jour. On<br />

s’entend bien, on poursuit les échanges à distance<br />

puis Caouette disparaît de <strong>la</strong> circu<strong>la</strong>tion,<br />

englouti par ses problèmes familiaux. J’avais<br />

convaincu CinéCinéma de me confier <strong>la</strong> réalisation<br />

d’un projet sur lui et j’ai retrouvé sa<br />

trace. Il était d’accord, on a <strong>la</strong>ncé l’affaire en<br />

moins d’une semaine pour partir tourner deux<br />

jours à New York. Avec une équipe si réduite<br />

qu’on avait oublié de chercher un réalisateur…<br />

Alors j’ai pris les commandes. On arrive chez<br />

lui, on sonne, pas de réponse. Il avait totalement<br />

oublié notre venue et il dormait ! On a<br />

finalement passé une semaine entière avec lui<br />

14 images de <strong>la</strong> culture

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!