télécharger la revue - CNC
télécharger la revue - CNC
télécharger la revue - CNC
You also want an ePaper? Increase the reach of your titles
YUMPU automatically turns print PDFs into web optimized ePapers that Google loves.
Il se peut que <strong>la</strong> beauté ait renforcé notre résolution – Masao Adachi<br />
L’Anabase de May et Fusako<br />
Shigenobu, Masao Adachi,<br />
et 27 années sans images<br />
2011, 66', couleur, documentaire<br />
réalisation et production : Eric Baude<strong>la</strong>ire<br />
participation : ministère de <strong>la</strong> Culture<br />
et de <strong>la</strong> Communication (Cnap), Synagogue<br />
de Delme/Centre d’art contemporain,<br />
Vil<strong>la</strong> Kujoyama<br />
En 1971, l’Armée rouge japonaise, groupe armé<br />
d’extrême gauche engagé dans des actions<br />
terroristes, s’exile au Liban et s’engage<br />
aux côtés du Front popu<strong>la</strong>ire de libération<br />
de <strong>la</strong> Palestine. Sur des images Super 8<br />
de Beyrouth et de Tokyo tournées de nos jours<br />
par Eric Baude<strong>la</strong>ire, le cinéaste Masao Adachi,<br />
membre du groupe, et May Shigenobu, fille<br />
de Fusako, <strong>la</strong> dirigeante de l’ARJ, témoignent<br />
de ces années de lutte et de vie c<strong>la</strong>ndestine.<br />
Le film emprunte son titre à L’Anabase<br />
de Xénophon, qui raconte <strong>la</strong> retraite de l’armée<br />
des Dix Mille partie guerroyer en Mésopotamie.<br />
Retraite, retour, mais aussi remontée<br />
(anabasis signifie montée en grec), remontée<br />
du souvenir à <strong>la</strong> surface des images,<br />
des signes à <strong>la</strong> surface du visible. En 1969,<br />
AKA Serial Killer, documentaire de Masao<br />
Adachi retraçant le parcours d’un tueur<br />
en série de sa naissance jusqu’aux lieux<br />
des crimes, suivait l’hypothèse selon <strong>la</strong>quelle<br />
il est possible de lire dans le paysage urbain<br />
les signes du pouvoir et de l’aliénation.<br />
Cette "théorie du paysage", Eric Baude<strong>la</strong>ire<br />
<strong>la</strong> met à l’épreuve des récits de Masao<br />
et de May. Entre Japon et Liban, il dessine<br />
une géographie incertaine où résonnent<br />
les souvenirs de chacun : Adachi, pour qui<br />
<strong>la</strong> réalité est plus intéressante que<br />
l’imagination, a abandonné le cinéma pour<br />
<strong>la</strong> lutte armée ; May, née au Liban et élevée<br />
dans le secret, a dû s’inventer d’autres<br />
identités jusqu’à l’âge de 20 ans. S. M.<br />
Il se peut que <strong>la</strong> beauté<br />
ait renforcé notre résolution -<br />
Masao Adachi<br />
2011, 74', couleur, documentaire<br />
réalisation : Philippe Grandrieux<br />
production : Epileptic Film<br />
participation : ministère de <strong>la</strong> Culture<br />
et de <strong>la</strong> Communication (Cnap),<br />
CR Ile-de-France<br />
Dans un parc, au couché du soleil, un homme<br />
s’interroge sur les désirs et les regrets<br />
qui ont jalonné sa vie. Cet homme tourmenté,<br />
c’est Masao Adachi, cinéaste d’avant-garde<br />
engagé au début des années 1970 dans<br />
<strong>la</strong> guéril<strong>la</strong> palestinienne au sein de l’Armée<br />
rouge japonaise. Revenu au Japon après<br />
27 années d’exil sans tourner un seul film,<br />
il évoque sa difficulté à surmonter les conflits<br />
entre l’art et <strong>la</strong> révolution.<br />
C’est à une véritable immersion que nous<br />
convie Philippe Grandrieux. Immersion<br />
dans un Japon crépuscu<strong>la</strong>ire, parmi <strong>la</strong> foule<br />
des grands magasins ou <strong>la</strong> pénombre<br />
d’un restaurant, aspiré par les <strong>la</strong>cets<br />
d’interminables autoroutes urbaines<br />
ou les détours d’une étroite ruelle,<br />
filmant au plus près, à main levée, comme<br />
en apesanteur, les visages et les corps ou,<br />
à l’inverse, du haut d’une tour de verre,<br />
le dédale fourmil<strong>la</strong>nt de <strong>la</strong> ville.<br />
Immersion dans l’esprit d’un homme,<br />
Masao Adachi, avec le même sentiment<br />
de désorientation. Le cinéaste japonais<br />
apparaît comme un personnage hanté<br />
par sa conscience, cette voix qui le suit<br />
dans ses errances à travers Tokyo, qui dévoile,<br />
sous le visage p<strong>la</strong>cide, un homme tourmenté<br />
par le désir. Désir de comprendre le monde,<br />
de s’y inscrire et de le transformer<br />
par le cinéma. Désir de résoudre ce destin<br />
qui l’a conduit à abandonner l’art pour <strong>la</strong> lutte<br />
armée. Désir d’un retour à l’art après<br />
ces années d’exil, d’un art qui ne trahisse<br />
rien de ses engagements. S. M.<br />
Les Maisons de feu<br />
2010, 16', noir et b<strong>la</strong>nc, documentaire<br />
réalisation : Antoine Barraud<br />
production : House on Fire<br />
Au moment du mixage de son film Le Soldat-<br />
Dieu (2010), en gros p<strong>la</strong>n et en un court<br />
entretien, Antoine Barraud filme au plus<br />
près <strong>la</strong> parole d’un cinéaste toujours révolté.<br />
Koji Wakamatsu, 73 ans, donne quelques<br />
clefs essentielles sur ses engagements.<br />
Pour lui, le cinéma est une occasion<br />
de représenter les victimes. Il avoue non sans<br />
humour qu’il a été yakuza, avant de réaliser<br />
des films pour pouvoir tuer des policiers<br />
sans aller en prison.<br />
Dans le sil<strong>la</strong>ge de l’Armée rouge, branche<br />
radicale de l’extrême-gauche japonaise,<br />
Wakamatsu part en 1970 à Beyrouth pour<br />
servir <strong>la</strong> cause des Palestiniens et réalise<br />
avec Masao Adachi Armée rouge - FPLP -<br />
Déc<strong>la</strong>ration de guerre mondiale (1971).<br />
Il rencontre alors notamment Mieko Toyama,<br />
une jeune femme qui l’aide à projeter le film.<br />
Quelques temps plus tard, <strong>la</strong> jeune femme<br />
meurt dans <strong>la</strong> prise d’otages d’Asama.<br />
C’est pour elle et ses amis révolutionnaires<br />
qu’il se penche, près de 35 ans après,<br />
sur cet événement qui a marqué tout le Japon<br />
en 1972. United Red Army (2009), film<br />
qu’il se devait de faire avant de mourir,<br />
retrace l’histoire du mouvement et <strong>la</strong> fin<br />
tragique de <strong>la</strong> branche japonaise ; à l’opposé<br />
des reportages du point de vue de <strong>la</strong> police,<br />
il s’intéresse à ces étudiants qui finirent<br />
par presque tous s’entretuer avant le final<br />
d’Asama. Wakamatsu dit ne tourner<br />
que du point de vue des faibles et cherche<br />
à transmettre les idées de liberté<br />
et de révolution, mot oublié selon lui. M. D.<br />
A voir<br />
baude<strong>la</strong>ire.net<br />
grandrieux.com<br />
cnc.fr/idc :<br />
La Forêt des songes, d’Antoine Barraud, 2010,<br />
53', et Images de <strong>la</strong> culture No.26, p.26-28.<br />
18 images de <strong>la</strong> culture