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Il était une fois… Orange mécanique<br />
Le Cinéma de Boris Vian<br />
2010, 51', couleur, documentaire<br />
réalisation : Alexandre Hi<strong>la</strong>ire, Yacine Badday<br />
production : Carlito<br />
participation : <strong>CNC</strong>, Ciné Cinéma, Procirep,<br />
Angoa<br />
Boris Vian meurt en 1959 d’un arrêt cardiaque<br />
pendant <strong>la</strong> projection privée de l’adaptation<br />
de J’irai cracher sur vos tombes. Le romancier<br />
était très réticent à cette adaptation,<br />
pourtant <strong>la</strong> seule de ses romans de son vivant,<br />
et aucun de ses scénarios n’avait abouti.<br />
Alexandre Hi<strong>la</strong>ire et Yacine Badday puisent<br />
dans les archives et rassemblent les interviews<br />
de journalistes, réalisateurs et amis<br />
pour analyser ce rendez-vous manqué<br />
avec le cinéma.<br />
1946 : Boris Vian écrit J’irai cracher<br />
sur vos tombes sous le pseudonyme<br />
de Vernon Sullivan et y rend un véritable<br />
hommage à l’Amérique mythologique du film<br />
noir et du western. Les réalisateurs donnent<br />
à voir cette fascination en reconstituant<br />
un film rêvé qui n’aura pas existé :<br />
lecture de textes ou de lettres de Vian, dessins<br />
mettant en scène ses scénarios non tournés,<br />
petits rôles dans Notre-Dame de Paris<br />
(De<strong>la</strong>nnoy, 1956) ou Les Liaisons dangereuses<br />
(Vadim, 1959), et même téléfilm adapté<br />
de sa vie (V comme Vian de Philippe Le Guay,<br />
2009)… Nicole Bertolt, <strong>la</strong> responsable<br />
de <strong>la</strong> Cohérie Boris Vian, le romancier<br />
Laurent Chalumeau, l’éditeur Marc Lapprand<br />
commentent les nombreux récits qui entourent<br />
<strong>la</strong> re<strong>la</strong>tion de Vian au cinéma, y donnant<br />
l’allure d’un mythe. Le critique A<strong>la</strong>in Riou<br />
analyse un de ses scénarios, notant que loin<br />
de <strong>la</strong> psychologie en vogue dans le cinéma<br />
français, Boris Vian n’aura pas connu<br />
<strong>la</strong> Nouvelle Vague dans <strong>la</strong>quelle il se serait<br />
peut-être davantage retrouvé. M.D.<br />
Il était une fois…<br />
Lacombe Lucien<br />
2011, 52', couleur, documentaire<br />
conception : Antoine de Gaudemar, Serge<br />
July, Marie Genin, Daniel Ablin<br />
réalisation : Daniel Ablin<br />
production : Fo<strong>la</strong>mour, TCM<br />
participation : <strong>CNC</strong>, France Télévisions<br />
En 1974, Louis Malle réalise Lacombe Lucien<br />
qui, en juin 1944 pendant l’Occupation, décrit<br />
l’attitude ambiguë d’un jeune homme refusé<br />
dans <strong>la</strong> Résistance et passant aux services<br />
de <strong>la</strong> Gestapo. Daniel Ablin en retrace<br />
<strong>la</strong> genèse et le retentissement, accompagnés<br />
de nombreuses archives du cinéaste<br />
(entretiens télévisés, rushs de tournage)<br />
et des interventions du coscénariste Patrick<br />
Modiano, de l’actrice Aurore Clément,<br />
d’historiens et de proches.<br />
“A 20 ans, j’ai trouvé une phrase de Malraux<br />
qui disait : un homme actif et pessimiste<br />
à <strong>la</strong> fois, c’est ou ce sera un fasciste, sauf s’il a<br />
une fidélité derrière lui.” Pour Louis Malle,<br />
<strong>la</strong> “fidélité” sera celle d’une scène<br />
de son enfance pendant <strong>la</strong> guerre :<br />
quand des camarades ont été arrêtés en plein<br />
cours pour être déportés. Ce souvenir<br />
(développé dans Au revoir les enfants, 1987)<br />
ajouté à sa rencontre, pendant <strong>la</strong> guerre<br />
d’Algérie, avec un jeune militaire pratiquant<br />
<strong>la</strong> torture de manière détachée, poussera<br />
Malle, aidé de Modiano, à développer l’histoire<br />
d’un jeune représentant de <strong>la</strong> banalité<br />
du mal, s’attaquant ainsi à l’image donnée<br />
par le pouvoir gaulliste d’une France unie<br />
contre l’Occupant. Pierre B<strong>la</strong>ise, alors jeune<br />
paysan, dont <strong>la</strong> simplicité butée fascinait<br />
Malle, incarne le rôle-titre aux côtés<br />
d’Aurore Clément, alors jeune mannequin<br />
aux origines popu<strong>la</strong>ires. Cette analyse revient<br />
aussi sur <strong>la</strong> polémique suscitée par le film<br />
à sa sortie, trop identifié à <strong>la</strong> “mode rétro”<br />
par ses détracteurs. P.E .<br />
Il était une fois…<br />
Orange mécanique<br />
2011, 52', couleur, documentaire<br />
conception : Antoine de Gaudemar, Serge<br />
July, Marie Genin, Michel Ciment<br />
réalisation : Antoine de Gaudemar<br />
production : Fo<strong>la</strong>mour, Arte France, TCM<br />
participation : <strong>CNC</strong>, RTS, Canal + Pologne,<br />
Ceska Televize, YLE<br />
Lorsque Kubrick lui-même, face au scandale<br />
provoqué par <strong>la</strong> sortie d’Orange mécanique,<br />
demanda à <strong>la</strong> Warner de le retirer des écrans<br />
britanniques, se doutait-il que son 9éme<br />
long métrage al<strong>la</strong>it devenir l’un des grands<br />
films-cultes de <strong>la</strong> fin du XXe siècle ?<br />
Antoine de Gaudemar et Michel Ciment<br />
vont à <strong>la</strong> rencontre de nombreux témoins<br />
(Malcolm McDowell, Christiane Kubrick,<br />
Gaspard Noé…) pour retracer l’histoire<br />
de cette œuvre sulfureuse et prophétique.<br />
Si Orange mécanique a <strong>la</strong>issé une telle trace<br />
dans l’histoire du cinéma c’est d’abord<br />
parce que ce film, comme les précédents<br />
de son auteur, témoigne d’une inventivité<br />
et d’une maîtrise sans égales : Kubrick<br />
“contrô<strong>la</strong>it même Dieu quand il a fait ce film”,<br />
extrapole l’acteur Warren C<strong>la</strong>rke. Il écrivit seul<br />
le scénario à partir d’un roman d’Anthony<br />
Burgess dont il était “tombé amoureux”<br />
(son producteur Jan Har<strong>la</strong>n) ; n’hésita pas<br />
à répéter les prises ad nauseam, aux dépens<br />
parfois de <strong>la</strong> santé de ses acteurs ; multiplia<br />
les expérimentations visuelles ; consacra<br />
un soin inouï aux décors futuristes, devenus<br />
tellement mythiques que des bars encore<br />
aujourd’hui ont copié leur décoration<br />
sur le Korova Milk Bar du film. A travers<br />
l’histoire d’Alex, jeune délinquant adepte<br />
de l’ultra-violence, remis sur le droit chemin<br />
par un inquiétant programme thérapeutique<br />
gouvernemental, Kubrick a avant tout réalisé<br />
un grand film politique, incisif et dérangeant,<br />
en totale résonance avec son époque. D.T.<br />
le cahier 97