Sport et éthique: valeurs et normes - Wielersportboeken
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d'exigences. Ces qualités ne sont pas données automatiquement par la pratique du sport. Il faut<br />
que la volonté intervienne.<br />
Le sport est une école de vie. Le sportif peut y apprendre la maîtrise de soi, la force de caractère.<br />
Pierre Jan<strong>et</strong>, pour désigner certaines de ces qualités, n'utilise pas le vocabulaire de l'<strong>éthique</strong>; il<br />
parle de "conduites élémentaires". Celui qui n'a pas appris l'effort, comme celui qui n'a pas appris<br />
à se reposer ou à se recréer par le jeu <strong>et</strong> par l'immersion dans la joie, celui qui n'a pas appris à<br />
commencer l'œuvre qui le requiert <strong>et</strong> à la terminer, n'a pas appris à être pleinement homme; il<br />
risque de se trouver écrasé par l'existence <strong>et</strong> enfermé dans des comportements pathologiques, soit<br />
que le suj<strong>et</strong> se laisse flotter au gré de ses folles inspirations, ou emporter au gré de sa fantaisie<br />
ou de ses passions, soit qu'il se ferme à la vie affective <strong>et</strong> au sentiment. Les passions constituent<br />
le moteur de la vie; elles sont bonnes, l'<strong>éthique</strong> doit le rappeler sans cesse; mais il faut apprendre<br />
à les vivre de façon humaine, c'est-à-dire de façon maîtrisée, contrôlée. Une autre caricature du<br />
comportement humain, c'est l'être qui n'a plus accès à ses sentiments, à ses envies, à ses désirs,<br />
qui a été déformé, au point de se laisser conduire uniquement par la volonté d'autrui, par<br />
l'intérêt d'autrui, ou par une pression sociale diffuse. L'être humain devient alors un robot <strong>et</strong><br />
exécute mécaniquement ce qu'on lui commande.<br />
La maîtrise de soi, la force de caractère ne sont pas une négation du désir; ce n'est pas non plus<br />
une domination où l'un exécute <strong>et</strong> l'autre commande. Comme nous l'avons déjà indiqué dans le<br />
deuxième chapitre dans un contexte plus large, le but à poursuivre, c'est une intégration, une<br />
interaction entre la volonté <strong>et</strong> la raison d'une part, <strong>et</strong> la passion ou le désir d'autre part. La<br />
maîtrise de soi ne signifie pas que seule la raison commande, que seule la raison donne les<br />
orientations. La véritable maîtrise de soi, celle qui est vraiment humaine <strong>et</strong> qui correspond à la<br />
force de caractère, est celle où des impulsions viennent aussi bien de la raison que de la passion,<br />
où le contrôle est autant celui de l'affect que celui de la raison. C<strong>et</strong>te interaction, c<strong>et</strong>te<br />
ouverture de la raison à la passion, de la passion à la raison, fait l'homme équilibré <strong>et</strong> harmonieux,<br />
est la véritable force de caractère.<br />
Dans la littérature sportive, on a parlé très souvent de maîtrise de soi. Ce terme peut être reçu.<br />
Mais il me paraît préférable de parler de discipline, de capacité de l'effort, de capacité de<br />
persévérance, de force de caractère. Si on parle de maîtrise de soi, il faut distinguer la vraie <strong>et</strong> la<br />
fausse maîtrise de soi. La maîtrise de soi que l'<strong>éthique</strong> recommande, ne fait pas violence au suj<strong>et</strong>,<br />
ni à soi-même, ni à l'autre. Mais elle représente une capacité de distanciation qui n'est pourtant<br />
pas un refus ou une négation; elle est une attention, qui à la fois connaît, reconnaît, favorise <strong>et</strong><br />
oriente l'affectivité, le désir, la passion. C<strong>et</strong>te attitude complexe, composée, qui comporte comme<br />
deux pôles, où il y a interaction, intégration de la raison <strong>et</strong> du sentiment, c'est ce que nous<br />
appelons ici la force de caractère. C'est là ce que vise la formation du caractère, ce qui suppose<br />
aussi apprentissage de la négociation, de la transaction avec soi-même comme avec les autres.<br />
La force de caractère est une spontanéité, mais une spontanéité formée, éduquée, une spontanéité<br />
qui a été non pas dressée de l'extérieur, non pas rectifiée par une volonté extérieure, mais<br />
qui s'est donnée à elle-même ou qui a reçu <strong>et</strong> accueilli une forme, une structure. C<strong>et</strong>te formation<br />
du caractère suppose une intervention d'une altérité, d'une extériorité. Mais c'est d'abord une<br />
attitude intérieure, par laquelle le suj<strong>et</strong> s'ouvre à une perspective qui lui est offerte <strong>et</strong> proposée.<br />
La formation du caractère ne peut être une forme imposée de l'extérieur à un suj<strong>et</strong>, à l'affectivité.<br />
La force de caractère concerne l'agressivité, la combativité. On dit parfois que l'agressivité n'est