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CHAPITRE 2 : LA PERSPECTIVE DE L’ENFANT<br />

Dans ses premiers romans, Marie-Claire Blais privilégie le point de vue des<br />

enfants. Cette perspective se caractérise par sa simplicité, sa naïveté, son innocence, et<br />

aussi par sa tendance à porter, sans la moindre hésitation, des jugements sévères et peu<br />

nuancés. Les enfants ne sont pas encore entièrement développés au niveau social.<br />

Égoïstes, ils sont incapables de compatir avec autrui 1 : ils observent le monde en ne<br />

percevant que la manière dont les autres correspondent à leur propre vie et à leurs<br />

objectifs. Les enfants cherchent uniquement à savoir si les autres comblent ou non leurs<br />

besoins à eux, sans reconnaître les sentiments que ces autres éprouvent.<br />

Les jeunes personnages que Blais présente évaluent tout dans leur vie, et<br />

expriment souvent leur mécontentement face aux faiblesses de leur père. Leur vision<br />

dualiste fait que les enfants voient le comportement de ce dernier de manière très<br />

tranchée : ils estiment qu‟il est bon ou mauvais. Les enfants jugent tout en termes<br />

absolus : lorsqu‟ils observent une faute que commet leur père, ils l‟estiment comme<br />

mauvais, même si ce père a des aspects rédempteurs. Ils peuvent seulement voir les<br />

comportements exagérés, et sont incapables d‟accepter la présence d‟aspects<br />

contradictoires chez une même personne : selon eux, un père ne peut pas être bon et<br />

mauvais à la fois. 2<br />

Comme l‟indique Lori Saint-Martin dans son ouvrage Au-delà du nom du père,<br />

les « crimes » attribués aux mauvais pères peuvent être divisés en deux catégories : les<br />

crimes de « vide » et les crimes de « trop-plein ». 3 Ceux qui appartiennent à la première<br />

catégorie incluent l‟absence physique (celle-ci peut être volontaire ou non, provisoire ou<br />

permanente) ainsi que le détachement (ou vide) émotionnel. Les crimes de « trop-plein »<br />

sont caractérisés par l‟excès : la violence, la tyrannie et l‟abus d‟autorité. 4 À ceux-là,<br />

nous ajoutons la complaisance. Excessive, celle-ci peut causer autant de mal que les<br />

autres crimes de « trop-plein ». Selon Saint-Martin, on peut attribuer à la même figure<br />

paternelle des fautes appartenant aux deux catégories, car celles-ci ne s‟excluent pas<br />

mutuellement. 5 Par exemple, un père émotionnellement détaché peut être extrêmement<br />

violent envers son enfant, et un père physiquement absent (à cause du travail, par<br />

exemple) peut être trop complaisant. Manifestement, il existe aussi de bons pères dans<br />

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