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Homme d‟Église, Benjamin Robert détient un pouvoir important dans sa<br />
communauté. Pauline note que sa mère refuse de questionner la bonté des religieux :<br />
« Ma mère n‟osait pas pénétrer les apparences d‟autrui, et pour elle, le père Benjamin<br />
Robert avait toutes les apparences de la sainteté, d‟une aveugle vertu qui la réconfortait,<br />
mais dont elle ne cherchait pas les fissures » (VV 159). Dans cette situation, Madame<br />
Archange est représentative des paroissiens. 18 Elle cherche consolation et réconfort dans<br />
la religion, cependant elle ne se pose pas de questions sur les abus et la duplicité de<br />
l‟église. Benjamin Robert lui-même reconnaît les faiblesses dans son institution<br />
religieuse : « Un prêtre qui veut embrasser la vie et ses erreurs n‟ignore pas qu‟une armée<br />
de prêtres vertueux se dresse toujours pour le protéger, pour pardonner ses fautes, il sait<br />
que le châtiment social lui sera toujours épargné » (VV 169). Les prêtres sont censés être<br />
des guides en matière de moralité et de spiritualité, cependant ils sont souvent coupables<br />
des pires péchés. Comme on présume que les prêtres sont irréprochables, ils peuvent se<br />
permettre de faire ce qu‟ils veulent. Les prêtres sont capables de s‟isoler dans les églises<br />
et d‟amasser des richesses. Benjamin Robert, par contre, vit humblement et sans luxe. 19<br />
Néanmoins, il n‟est pas non plus exempt de fautes :<br />
Benjamin Robert souffrait d‟insomnie, et lorsqu‟il séduisait les êtres, n‟étaitce<br />
pas pour lui dans cette inconsciente rêverie qui remplaçait son sommeil,<br />
comme dans un rêve, aussi, on était captif d‟un regard, d‟un sourire, lesquels<br />
perdaient soudain leur innocence pour s‟insinuer en vous, troubles et<br />
magnétiques. Ses gestes étranges vous surprenaient à peine : les bras aveugles<br />
qui se fermaient sur vous vous reposaient de l‟intensité de ce regard qui vous<br />
avait longtemps poursuivi… (VV 203)<br />
On ne sait pas si la narratrice parle au figuré ou littéralement. Les maux de Benjamin<br />
Robert sont toujours vagues et les descriptions de ce qu‟il fait sont évasives. 20<br />
Mlle Léonard, cependant, n‟a pas confiance en lui : elle croit qu‟il est homosexuel, voire<br />
criminel, et « capable de tout » (VV 201). Pauline raconte que : « Germaine Léonard était<br />
plus soupçonneuse encore de la conduite du prêtre depuis le séjour de Philippe à<br />
l‟hôpital, car ne pouvant détacher ses yeux „de ces deux prisonniers en liberté‟, elle les<br />
avait discrètement épiés » (VV 201-202). 21 Mlle Léonard se méfie de Benjamin Robert,<br />
car il s‟occupe des prisonniers. Elle essaie de sauver la vie des gens malheureux, alors<br />
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