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qu’une serrure s’ouvre sur un claquement, elle expédie l’oreiller<br />
dans la pièce, les cartels de cheminée dorés, les ronds de<br />
serviette en argent, les compotiers en cristal au plomb, et elle<br />
verrouille la porte.<br />
Aujourd’hui, c’est le jour du déménagement. Encore un des<br />
plus longs jours de l’année.<br />
Dans la grande maison sur Birch Street, tout le monde est<br />
censé faire ses bagages, mais non. Ta fille descend avec<br />
finalement rien à se mettre pour le restant de son existence. Ta<br />
givrée de mère, elle est encore en train de faire le ménage. Elle<br />
se trouve quelque part dans la maison, à traîner derrière elle<br />
l’antique aspirateur, à quatre pattes, occupée à extraire bouts de<br />
fil et fragments de peluches des tapis pour en nourrir le tuyau<br />
de l’aspirateur. Comme si on en a quelque chose à fiche de<br />
l’allure des tapis. Comme si la famille Wilmot va jamais revenir<br />
vivre ici.<br />
Ta pauvre épouse, cette fille stupide qui est venue ici il y a un<br />
million d’années, droit sortie d’un parc de caravanes en Géorgie,<br />
elle ne sait pas par où commencer.<br />
Et on ne peut pas dire que la famille Wilmot n’aurait pas pu<br />
voir le vent tourner. On ne se réveille pas tout bonnement un<br />
jour pour découvrir que les caisses sont vides. Tout l’argent de<br />
la famille disparu.<br />
Il n’est que midi, et elle essaie de retarder le plus possible<br />
son deuxième verre. Le deuxième n’est jamais aussi bon que le<br />
premier. Le premier est d’une telle perfection. Juste de quoi<br />
reprendre son souffle. Un répit. Un petit quelque chose pour lui<br />
tenir compagnie. Il ne reste que quatre heures avant que le<br />
locataire débarque pour prendre les clés. M. Delaporte. Avant<br />
qu’il leur faille évacuer les lieux.<br />
Et il ne s’agit même pas d’un coup à boire, un vrai de vrai. Ce<br />
n’est qu’un verre de vin, et elle n’en a bu qu’une gorgée, peutêtre<br />
deux. Malgré tout, rien que le fait de savoir qu’il est là, à<br />
portée de main. Rien que le fait de savoir qu’il est encore à<br />
moitié plein. C’est un réconfort.<br />
Après le deuxième verre, elle prendra deux aspirines. Encore<br />
deux verres de plus, et deux autres aspirines, et c’est ainsi<br />
qu’elle tiendra jusqu’à la fin de la journée d’aujourd’hui.<br />
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