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aucun membre du clan élargi (familial et/ou politique) du président n’est définitivement éjecté<br />
du système et personne n’est jamais complètement écarté. C’est d’ail<strong>le</strong>urs là où réside la force<br />
de <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong> : il arbitre en permanence, faisant toujours choir ou rebondir <strong>le</strong>s uns après <strong>le</strong>s<br />
autres. En remettant à chaque fois en sel<strong>le</strong> ceux-là mêmes qu’il avait pourtant limogés, et<br />
parfois de manière sèche et bruta<strong>le</strong>, il cherche à garder l’allégeance de chacun et, surtout,<br />
éviter d’en faire des adversaires potentiels.<br />
Dans <strong>le</strong> même ouvrage, Nicolas Beau et Catherine Graciet expliquent comment l’épouse du<br />
président est parvenue à écarter tous <strong>le</strong>s membres du premier cerc<strong>le</strong> d’amis du président pour<br />
s’imposer peu à peu comme la personne la plus influente dans son entourage. Ils évoquent<br />
aussi, en citant un diplomate français, <strong>le</strong> scénario de la succession du président par la<br />
"régente" Leïla, dont la perspective commence à exaspérer la bourgeoisie de Tunis.<br />
Leïla présidente? Cette perspective, qui paraît saugrenue à beaucoup de Tunisiens, n’en est<br />
pas moins avancée comme une forte probabilité dans <strong>le</strong>s cerc<strong>le</strong>s du pouvoir où <strong>le</strong>s plus futés<br />
sont en train de rivaliser de zè<strong>le</strong> pour servir la "présidente" et son clan. Sait-on jamais…<br />
Quoi qu’il en soit, la première dame, dont l’ascension fut aussi rapide que fata<strong>le</strong> pour de<br />
nombreux collaborateurs et proches parents de <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong>, se trouve aujourd’hui au cœur des<br />
luttes d’influences qui ont redoublé depuis que la rumeur de la maladie du président a pris<br />
naissance, en 2004. On dit même que la clique au pouvoir, et à sa tête <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong> lui-même,<br />
serait en train de préparer Leïla pour la succession. La perspective que la Tunisie, premier<br />
pays arabo-musulman à avoir promulgué un Code de Statut Personnel, à émanciper la femme<br />
et à lui donner de larges droits, puisse être aussi <strong>le</strong> premier pays de la région à mettre à sa tête,<br />
un jour, un chef d’Etat de sexe féminin, Leïla en l’occurrence, bombardée en mars 2009 – et<br />
jusqu’en 2011 – présidente de l’Organisation de la Femme Arabe (OFA). Cette organisation,<br />
qui a tenu son 2 ème congrès annuel à Tunis en juin 2009, et <strong>le</strong> 3 ème , toujours à Tunis, en<br />
octobre 2010.<br />
L’objet de cette organisation, simp<strong>le</strong> réunion d’épouses de chefs d’Etats arabes, est futi<strong>le</strong><br />
voire ridicu<strong>le</strong>. Les festivités ayant eu lieu à Tunis à deux reprises auraient du être discrets et<br />
non pas occuper la Une. Leïla en a profité pour montrer son savoir-faire et faire deviner ses<br />
ambitions.<br />
La perspective d’une Leïla présidente de la Tunisie est présentée aujourd’hui, par certains<br />
piliers du régime, comme un scénario plausib<strong>le</strong>, voire acceptab<strong>le</strong> par <strong>le</strong>s partenaires<br />
occidentaux de la Tunisie.<br />
Bel<strong>le</strong> et élégante, adepte du lifting et de la chirurgie esthétique, s’habillant chez <strong>le</strong>s plus<br />
grands couturiers de Paris et plus encore de Milan, et se faisant confectionner des kaftans<br />
marocains à Fès pour 50 à 100 000 dinars, Leïla, qui aime se déplacer dans l’avion<br />
présidentiel pour faire son shopping à Londres, Dubaï ou Istanbul, "n’y pense pas tous <strong>le</strong>s<br />
matins en se rasant", comme disent <strong>le</strong>s hommes politiques français quand ils sont interrogés<br />
sur <strong>le</strong>ur ambition présidentiel<strong>le</strong>. El<strong>le</strong> n’en est pas moins, aujourd’hui, en quête de<br />
respectabilité. Et, surtout, de légitimité.<br />
Alors qu’el<strong>le</strong> reste la cib<strong>le</strong> des rail<strong>le</strong>ries et des moqueries de ses compatriotes, qui la<br />
surnomment "el-hajjama" (la coiffeuse) et continuent de se dé<strong>le</strong>cter de blagues (vertes et pas<br />
mûres) à son sujet, <strong>le</strong>s activités publiques de Leïla, notamment à la tête de l’association<br />
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