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Lettre ouverte à Monsieur <strong>le</strong> Président<br />
Le citoyen qui vous regarde passer dans votre luxueuse limousine, encadrée par<br />
d’innombrab<strong>le</strong>s motards, précédée par des véhicu<strong>le</strong>s ayant à <strong>le</strong>ur bord et sur <strong>le</strong> marchepied<br />
des "ninjas" parfois en tenues bizarroïdes, au regard mauvais, armés jusqu’aux dents, la main<br />
sur la gâchette, et suivie d’autres voitures fermant <strong>le</strong> cortège et semant la panique, se demande<br />
<strong>le</strong> pourquoi de cette agressivité gratuite, sachant que <strong>le</strong> peup<strong>le</strong> tunisien est pacifiste et n’a<br />
jamais tué l’un de ses dirigeants.<br />
Au cours de notre histoire plusieurs fois millénaire, aucun chef d’Etat n’a été assassiné ni<br />
même agressé. Pourquoi, en dehors du cortège, des centaines et parfois des milliers de<br />
policiers, de gardes nationaux, d’agents en civil, noyés dans la fou<strong>le</strong>, sont-ils aussi déployés <strong>le</strong><br />
long du parcours? Pourquoi utilise-t-on tant de personnel pour votre sécurité? Que craignezvous?<br />
Pourquoi immobilise-t-on des milliers de voitures particulières pendant de longues<br />
minutes, parfois durant une demi-heure jusqu’au passage de votre cortège? Pourquoi arrête-ton<br />
des centaines de camions et des poids lourds dans <strong>le</strong>s nombreuses routes adjacentes dès<br />
l’aurore dans l’attente du passage de ce cortège? Imaginez-vous <strong>le</strong> boucan que provoque, à<br />
chaque fois, votre déplacement entre Tunis et Hammamet, surtout durant la saison estiva<strong>le</strong>,<br />
lorsque vous séjournez dans votre palais situé dans la célèbre station balnéaire?<br />
Tout ce cirque qui fige l’activité des gens n’explique que votre dédain pour <strong>le</strong> peup<strong>le</strong>, et <strong>le</strong><br />
peu de cas que vous faites des deniers de l’Etat.<br />
Au cours des sièc<strong>le</strong>s de notre histoire, je <strong>le</strong> répète, aucun chef d’Etat n’a été assassiné ni<br />
même agressé. Car notre peup<strong>le</strong> a toujours été pacifiste et non vio<strong>le</strong>nt. Mais l'assassin, c'est<br />
vous ! Rappe<strong>le</strong>z-vous quand vous étiez directeur de la Sûreté nationa<strong>le</strong>. Rappe<strong>le</strong>z-vous <strong>le</strong><br />
"Jeudi noir" du 26 janvier 1978. La police a tiré sur une fou<strong>le</strong> désarmée. Débordée, on a fait<br />
appel à l’armée pour terminer <strong>le</strong> travail. Le nombre de morts est trois fois plus é<strong>le</strong>vé que celui<br />
qui est officiel<strong>le</strong>ment déclaré, soit environ de 1'200.<br />
A votre retour de Pologne, vous avez récupéré la même fonction. Il y eut des troub<strong>le</strong>s dans <strong>le</strong><br />
campus de Tunis. A la tête d’une unité de police, arme au poing, vous tirez et vous tuez des<br />
étudiants qui fuyaient à toutes jambes. Ils sont atteints au dos. Quel<strong>le</strong> témérité de votre part !<br />
Pendant votre présidence, vos ministres de l’Intérieur font subir des tortures pouvant conduire<br />
<strong>le</strong>s nombreux prisonniers au trépas, et ce, dans <strong>le</strong>s caves mêmes du département. "Tout cela,<br />
c’est du passé", dites-vous. C’est juste, mais il n’est jamais tard de vous demander des<br />
comptes? L’armée et la police ont été créées par la nation pour assurer la sécurité des<br />
personnes et des biens, et non pour atteindre à <strong>le</strong>ur intégrité physique ou <strong>le</strong>s massacrer.<br />
Il y a lieu de demander justice, non pas en Tunisie, parce que ce mot et cette fonction n’ont<br />
plus chez nous aucune va<strong>le</strong>ur de fait, mais devant <strong>le</strong>s tribunaux internationaux et <strong>le</strong> crier de<br />
part <strong>le</strong> monde, quitte à impliquer aussi Bourguiba, Nouira, Mzali et Farhat avec vous, vous<br />
qui étiez l’exécuteur de <strong>le</strong>urs décisions. Et si nous ne trouvons pas justice sur terre, il est<br />
certain que l’Enfer de l’Eternel vous attend.<br />
Fermons cette parenthèse et revenons à vos cortèges dits de sécurité. Vous, qui êtes un<br />
homme méticu<strong>le</strong>ux, avez-vous chargé un spécialiste en économie et calcu<strong>le</strong>r <strong>le</strong> coût de cette<br />
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