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Certains magazines édités en Tunisie, tels que Femmes & Réalités, Tunivisions, Femmes de<br />
Tunisie, <strong>le</strong> supplément du quotidien Le Temps ou Beauty & Fashion, ou certaines émissions<br />
trop libéra<strong>le</strong>s de notre télévision tunisienne frappent l’imaginaire de nos femmes et de nos<br />
fil<strong>le</strong>s et insidieusement <strong>le</strong>s conduisent vers ces voies réprouvées par la mora<strong>le</strong>, pauvreté<br />
oblige. Êtes-vous content, Monsieur <strong>le</strong> Président, d’avoir tenu votre promesse?<br />
Beaucoup de nos jeunes ayant fréquenté nos grandes éco<strong>le</strong>s, ou nos instituts ou nos facultés,<br />
des jeunes dont la tête est bien faite et bien p<strong>le</strong>ine s’expatrient pour entamer des stages à<br />
l’étranger. Subjugués par <strong>le</strong>ur nouvel<strong>le</strong> vie, et sachant qu’en Tunisie il n’y a plus de liberté, ni<br />
justice, ni état de droit, ils préfèrent prendre racine au dehors et y réussissent. On en trouve au<br />
top de l’intelligentsia mondia<strong>le</strong>. On ne peut que s’en réjouir pour eux, mais quid de ces<br />
centaines de milliers d’autres diplômés de l’université qui attendent de longues années durant<br />
un hypothétique emploi sous-payés, alors que des arrivistes et des vo<strong>le</strong>urs, sans éducation,<br />
rou<strong>le</strong>nt dans de grosses berlines?<br />
Monsieur <strong>le</strong> Président,<br />
Des statistiques récentes signa<strong>le</strong>nt que 1% du personnel de Tunisie Te<strong>le</strong>com perçoit 25% de la<br />
masse salaria<strong>le</strong>, et que 8% de la population possède 80% de la richesse du pays. Le PDG<br />
tunisien et <strong>le</strong> directeur général français de Tunisie Te<strong>le</strong>com ont respectivement un salaire<br />
mensuel de trente mil<strong>le</strong> et de cinquante mil<strong>le</strong> dinars, soit cent vingt fois et deux cent fois <strong>le</strong><br />
SMIG.<br />
D’une société sereine, vertueuse, harmonieuse et homogène sur <strong>le</strong> plan des revenus, l’ère du<br />
changement l’a métamorphosé en une hydre bipolaire dissymétrique, l’un à l’antipode de<br />
l’autre, caractérisé par l’égoïsme, l’hypocrisie, la haine et <strong>le</strong> dédain. Un système, qui tolère de<br />
tel<strong>le</strong>s inégalités, et <strong>le</strong>s exemp<strong>le</strong>s sont nombreux au niveau des banques, des grandes sociétés<br />
nationa<strong>le</strong>s et des grands commis de l’Etat, doit s’attendre pour bientôt à des réactions, des<br />
contestations et des vio<strong>le</strong>nces dont nul ne peut prévoir <strong>le</strong>s conséquences.<br />
Aujourd’hui, nous sommes à la fin de l’an 2010.<br />
Y a-t-il encore en Tunisie un patriote dont <strong>le</strong> cœur vibre d’amour et de tendresse envers<br />
autrui? Y a-t-il un homme honnête enclin à faire <strong>le</strong> bien autour de lui? Très rares sont <strong>le</strong>s gens<br />
de cette espèce. Nous avons enterré nos vertus, nos traditions, nos va<strong>le</strong>urs, notre sty<strong>le</strong> de vie<br />
d’antan, notre sobriété, notre croyance en l’au-delà, et nous avons un nouveau dieu: l’argent.<br />
L’argent qui conduit inexorab<strong>le</strong>ment au pouvoir absolu, à la dictature, à l’injustice, à<br />
l’ingratitude et au vice. Aujourd’hui, <strong>le</strong>s mauvais sont glorifiés et <strong>le</strong>s vertueux sanctionnés, et<br />
parfois tournés en dérision. Point d’amitié, point de nob<strong>le</strong>sse, point de charité, point de<br />
clémence, point de citoyenneté. Nous vivons dans un désert d’égoïsme.<br />
Nous avons perdu nos va<strong>le</strong>urs et notre "tunisianité" fondée sur la droiture et la crainte de nous<br />
en dévier, parce que nous avons singé – <strong>le</strong> régime aidant – l’Occident, et adopté, non pas sa<br />
liberté, sa démocratie et sa justice, mais ses mauvaises voies et ses errements après qu’il eut<br />
perdu son âme. Voilà <strong>le</strong> résultat de votre règne.<br />
Aujourd’hui, des pans entiers de nos meil<strong>le</strong>ures entreprises sont détruits. Dans <strong>le</strong>s années<br />
1960, nous avons mis fin à la présence colonia<strong>le</strong>. Nous l’avons chassée, comme on dit, par la<br />
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