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Ben Ali le ripou - Webvirage

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s’il peut lui désigner un officier supérieur capab<strong>le</strong> de prendre en main la Sûreté nationa<strong>le</strong>. Le<br />

Ouardani pense tout de suite à son vassal de 1973. Qui sait? Peut-être aura-t-il besoin de<br />

nouveau de sa fidélité?<br />

Trente-trois jours plus tard exactement, nous voilà au jeudi 26 janvier 1978: l’odieux "Jeudi<br />

noir" comme l’appel<strong>le</strong>ront <strong>le</strong>s médias.<br />

Dans <strong>le</strong>s rues, la police tire à bal<strong>le</strong>s réel<strong>le</strong>s sur tout ce qui bouge. Le résultat est juste à<br />

l’opposé de ce à quoi on s’attendait. Les manifestants sont de plus en plus nombreux. Aux<br />

syndicalistes se mê<strong>le</strong>nt de simp<strong>le</strong>s citoyens. La police, non préparée à faire face à de tel<strong>le</strong>s<br />

situations, est débordée. L’armée prend la relève et procède au nettoyage des lieux. La<br />

manifestation devient révolte et prend de l’amp<strong>le</strong>ur. Hélas, el<strong>le</strong> est vite noyée dans <strong>le</strong> sang. Le<br />

bilan est effroyab<strong>le</strong>. Mil<strong>le</strong> deux cent tués et un nombre considérab<strong>le</strong> de b<strong>le</strong>ssés. Les hommes<br />

se terrent ; la rue se tait ; <strong>le</strong>s stylos se stérilisent ; <strong>le</strong>s intel<strong>le</strong>ctuels s’évanouissent.<br />

Qui est donc responsab<strong>le</strong> de l’affreux carnage? Qui a donné l’ordre de tirer? Et qui a exécuté<br />

l’ordre? La connaissance de l’identité des exécutants de ce génocide ne fait pas problème. Ils<br />

sont deux : <strong>le</strong> directeur général de la Sûreté nationa<strong>le</strong>, <strong>le</strong> colonel <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong> dans l’acte I puis <strong>le</strong><br />

général Abdelhamid <strong>Ben</strong> Cheikh dans l’acte II. Deux officiers supérieurs issus de la première<br />

promotion de jeunes tunisiens formés en France en 1956 et qui avaient en entrant à Saint-Cyr<br />

prêté serment de servir l’Etat et de protéger <strong>le</strong>s citoyens. Vingt-deux ans plus tard, ils font bon<br />

marché de la foi jurée, se transforment en bourreaux et se salissent <strong>le</strong>s mains du sang du<br />

peup<strong>le</strong>.<br />

La détermination de l’auteur de l’ordre est en revanche diffici<strong>le</strong>. Théoriquement, quatre<br />

décideurs peuvent être suspectés : <strong>le</strong> chef de l’Etat, <strong>le</strong> Premier ministre, <strong>le</strong> ministre de<br />

l’Intérieur, <strong>le</strong> ministre de la Défense Nationa<strong>le</strong>. Or, Bourguiba, réel<strong>le</strong>ment malade cette fois,<br />

avait pratiquement aliéné <strong>le</strong> pouvoir à diverses personnes, hommes et femmes confondus.<br />

Hédi Nouira est hors de cause : dépassé par <strong>le</strong>s évènements, il est la première "victime" du<br />

"Jeudi noir". Tout était dirigé contre lui. On cherchait à prendre sa place. Le docteur Dhaoui<br />

Hannablia, bon médecin peut-être mais politicien terne et ministre de l’Intérieur sans<br />

pedigree, il se laissait manœuvrer par celui-là même qui l’avait installé naguère, place<br />

d’Afrique, en lui cédant un intérim occupé durant quelques heures.<br />

- Que reste-t-il donc?<br />

- Abdallah Fahat.<br />

Eh, oui! L’ordre de tirer vient d’Abdallah Farhat et ne pouvait venir que de lui. Bien sûr, il a<br />

consulté <strong>le</strong> chef de l’Etat. Bourguiba, très diminué, a laissé faire. "Rég<strong>le</strong>z la situation au<br />

mieux!" s’était-il contenté de lui répondre.<br />

Un militant dépourvu de mora<strong>le</strong> et de culture devient méchant quand il est dévoré par<br />

l’ambition politique. Son arrivisme ne <strong>le</strong> fait recu<strong>le</strong>r devant aucune vilénie. En 1973, <strong>le</strong><br />

petzouil<strong>le</strong> songeait à un coup de force qui lui ouvrirait <strong>le</strong> chemin du palais de Carthage. En<br />

1977, il a compris qu’il lui suffirait d’arracher <strong>le</strong> portefeuil<strong>le</strong> de Premier ministre pour accéder<br />

aisément à la présidence de la république. Il n’aura pas cette chance. Dix ans plus tard, l’un de<br />

ses affidés, <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong>, l’aura.<br />

* * *<br />

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