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Leïla Trabelsi s’y voit déjà<br />
"L'ambition démesurée d'une femme peut conduire <strong>le</strong> monde à la catastrophe"<br />
Char<strong>le</strong>s-Augustin Sainte-Beuve<br />
Madame Leïla <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong> a une place à part dans <strong>le</strong> cœur de son époux de président. El<strong>le</strong> semb<strong>le</strong><br />
avoir aussi une certaine influence, pour ne pas dire un ascendant certain sur <strong>le</strong> chef de l’Etat.<br />
Il y a plusieurs raisons à cela. El<strong>le</strong> est d’abord la mère de l’unique garçon parmi <strong>le</strong>s six<br />
enfants du président. Le chef de l’Etat tunisien, dont la carrière politique avaient connu des<br />
hauts et des bas, a vu son étoi<strong>le</strong> monter dans <strong>le</strong> firmament de la politique tunisienne après<br />
avoir fait la connaissance de cette jeune femme. Superstitieux, comme la plupart des hommes<br />
politiques, même <strong>le</strong>s plus rationalistes, il ne considère pas cette femme comme une simp<strong>le</strong><br />
compagne. El<strong>le</strong> est aussi sa bonne étoi<strong>le</strong>, son porte-bonheur, une sorte de mascotte dont il ne<br />
peut plus se séparer. Ses sentiments envers el<strong>le</strong> dépassent <strong>le</strong> cadre strict de l’amour qu’un<br />
homme puisse vouer à une femme. Car <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong> n’a jamais été un amant romantique ni un<br />
mari fidè<strong>le</strong>. La rumeur publique à Tunis bruit des noms de ses amantes successives: Chekir,<br />
Askri, Jenhani, et bien d’autres femmes, qui ont partagé son lit à différentes époques.<br />
Avec Leïla qu’il a épousée en seconde noce, malgré l’opposition de ses trois fil<strong>le</strong>s nées de son<br />
premier mariage, et de certains de ses proches, comme son ex-ami de trente ans, Kamel<br />
Eltaief, et son gendre, Slim Chiboub, <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong> entretient des relations d’association.<br />
Outre <strong>le</strong>s heureuses circonstances qui <strong>le</strong>s ont propulsés sur <strong>le</strong>s devants de la scène tunisienne,<br />
à un moment crucial où personne ne <strong>le</strong>s attendait, <strong>le</strong>s deux époux sont unis par une sorte de<br />
contrat à la fois politique et économique. Ils sont <strong>le</strong>s co-dirigeants d’une entreprise qu’ils ont<br />
construite ensemb<strong>le</strong>, pierre après pierre. Leurs intérêts sont donc intimement imbriqués et ils<br />
constituent <strong>le</strong>s deux têtes d’une pieuvre qui n’a pas fini d’ava<strong>le</strong>r des pans entiers de<br />
l’économie du pays.<br />
Là encore, ceux ayant misé un moment sur une possib<strong>le</strong> rupture au sein du coup<strong>le</strong>, qui serait<br />
précipitée par <strong>le</strong>s excès et <strong>le</strong>s dépassements attribués aux Trabelsi, <strong>le</strong> clan <strong>le</strong> plus détesté en<br />
Tunisie, ont dû vite déchanter. Car, non seu<strong>le</strong>ment <strong>le</strong> président semb<strong>le</strong> tota<strong>le</strong>ment solidaire<br />
des membres de la famil<strong>le</strong> de sa femme, mais ces derniers ne cessent de répéter à qui veuil<strong>le</strong><br />
bien <strong>le</strong>s entendre qu’ils agissent avec l’accord sinon avec l’assentiment du président et sous sa<br />
conduite.<br />
Sur un autre plan, l’ascendant que Leïla a sur son mari s’explique, selon certains, par la<br />
profonde implication de cel<strong>le</strong>-ci, au cours des vingt dernières années, dans <strong>le</strong>s affaires de<br />
l’Etat et sa connaissance pour ainsi dire intime des rouages du système mis en place par <strong>Ben</strong><br />
<strong>Ali</strong>: implication et connaissance qui en font, au regard de son mari, la principa<strong>le</strong> garante de la<br />
pérennité de ce système. On comprend dès lors <strong>le</strong> rô<strong>le</strong> joué par Leïla dans la Tunisie<br />
d’aujourd’hui et qui dépasse largement celui que pourrait jouer une première dame dans un<br />
"banal" système présidentiel. Car outre <strong>le</strong> fait qu’el<strong>le</strong> a son mot à dire sur <strong>le</strong>s nominations à<br />
tous <strong>le</strong>s postes de responsabilité politique, économique et administrative, el<strong>le</strong> intervient de<br />
manière active dans la vie publique. El<strong>le</strong> préside des associations caritatives (Besma pour <strong>le</strong>s<br />
handicaps et Saïda pour la lutte contre <strong>le</strong> cancer). Ce qui est dans <strong>le</strong>s prérogatives d’une<br />
première dame. Ce qui l’est moins, en revanche, c’est sa participation aux côtés de son époux,<br />
aux grandes joutes politiques. Mme <strong>Ben</strong> <strong>Ali</strong> donne aussi des interviews aux journaux<br />
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