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dans <strong>le</strong> poème de la Métamorphose des Plantes 34 , <strong>en</strong> six phases successives de contraction et d’expansion, de<br />

la graine à la f<strong>le</strong>ur et de la f<strong>le</strong>ur au fruit, édifie selon Goethe l’Idée, <strong>le</strong> type commun qui permet de<br />

reconnaître qu’une plante est une plante. Goethe relate dans son Histoire de mes études botaniques comm<strong>en</strong>t<br />

l’observation de boutures prés<strong>en</strong>tées par <strong>le</strong> conseil<strong>le</strong>r aulique Reiff<strong>en</strong>stein lui fournit par ail<strong>le</strong>urs une<br />

illustration concrète de cette intuition. Des rameaux une fois détachées, se développ<strong>en</strong>t et devi<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t des<br />

plantes complètes. Ce phénomène, estime Goethe, nous fait percevoir que la feuil<strong>le</strong> conti<strong>en</strong>t, <strong>en</strong> idée, la<br />

plante <strong>en</strong>tière. Les rameaux latéraux issus des yeux sont de véritab<strong>le</strong>s plantes, qui, au lieu du sol, part<strong>en</strong>t<br />

d'une plante-mère :<br />

« Un plant d’œil<strong>le</strong>t qui avait poussé jusqu’à atteindre la hauteur d’un buisson fut ce qui me frappa <strong>le</strong><br />

plus. On connaît la vitalité et la faculté de reproduction puissantes de cette plante ; sur ses rameaux, <strong>le</strong>s yeux se<br />

press<strong>en</strong>t <strong>le</strong>s uns à la suite des autres, un nœud est <strong>en</strong>châssé dans l’autre ; ici ce phénomène s’était int<strong>en</strong>sifié<br />

avec <strong>le</strong> temps, et <strong>le</strong>s yeux, dans un <strong>en</strong>tassem<strong>en</strong>t confus, s’étai<strong>en</strong>t développés autant qu’il était possib<strong>le</strong>, si bi<strong>en</strong><br />

que même la f<strong>le</strong>ur parfaite donnait à son tour naissance à quatre autres f<strong>le</strong>urs parfaites. 35 »<br />

Goethe imagine pouvoir expliquer toutes <strong>le</strong>s structures du monde végétal, <strong>en</strong> concevant cette notion de<br />

plante primitive et <strong>en</strong> la maint<strong>en</strong>ant suffisamm<strong>en</strong>t soup<strong>le</strong> et générique pour revêtir toutes <strong>le</strong>s formes<br />

adéquates. L’Urpflanze permettra de compr<strong>en</strong>dre non seu<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t <strong>le</strong> développem<strong>en</strong>t de chaque plante <strong>en</strong><br />

particulier, mais éga<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t de mettre <strong>en</strong> lumière comm<strong>en</strong>t tous <strong>le</strong>s g<strong>en</strong>res, espèces et variétés répond<strong>en</strong>t à cet<br />

archétype. Et davantage <strong>en</strong>core, el<strong>le</strong> caractérisera avec plus d’évid<strong>en</strong>ce que jamais <strong>le</strong> fossé irréductib<strong>le</strong> qui<br />

sépare <strong>le</strong>s plantes des autres règnes, animaux et minéraux, donnant par-là même au poète la réponse à la<br />

question qu’il se posait alors qu’il déambulait au milieu des nombreuses espèces végéta<strong>le</strong>s du jardin<br />

botanique de Pa<strong>le</strong>rme.<br />

Le statut de cette plante primitive tel<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong> est diversem<strong>en</strong>t prés<strong>en</strong>tée dans ses écrits botaniques ou ses<br />

correspondances demeure néanmoins ambigu sur deux aspects : d’une part, cette plante doit-el<strong>le</strong> cont<strong>en</strong>ir au<br />

moins un caractère de chaque végétal particulier, c’est-à-dire <strong>en</strong> être d’une certaine manière la réunion, ou au<br />

contraire doit-el<strong>le</strong> prés<strong>en</strong>ter une morphologie de base, simplifiée que <strong>le</strong>s autres suivrai<strong>en</strong>t par analogie, une<br />

sorte d’intersection formant un modè<strong>le</strong> générateur de toutes <strong>le</strong>s plantes ? D’autre part, sa nature est-el<strong>le</strong><br />

d’ess<strong>en</strong>ce intelligib<strong>le</strong> ou s<strong>en</strong>sib<strong>le</strong> ? Goethe répond partiel<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t à notre première interrogation lorsqu’il écrit<br />

à Herder <strong>le</strong> 17 mai 1787 :<br />

« La plante primitive devi<strong>en</strong>t la chose la plus étrange du monde, et que la nature el<strong>le</strong>-même<br />

m’<strong>en</strong>viera... Avec ce modè<strong>le</strong> et sa c<strong>le</strong>f on pourra <strong>en</strong>suite inv<strong>en</strong>ter des plantes à l’infini qui seront conséqu<strong>en</strong>tes,<br />

c’est-à-dire qui, sans exister véritab<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t, pourrai<strong>en</strong>t cep<strong>en</strong>dant exister, et qui ne seront pas des ombres et des<br />

34 Nous détail<strong>le</strong>rons <strong>le</strong>s phases de cette métamorphose lors de nos illustrations du concept de polarité.<br />

35 Goethe, JW, Histoire de mes études botaniques, In La métamorphose des plantes, p. 103<br />

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