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On peut ainsi rapprocher <strong>le</strong> <strong>texte</strong> de la Métamorphose des Plantes de 1790 de l’Essai sur la simp<strong>le</strong> imitation<br />

de la nature, la manière et <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> 186 de 1789 : qu’il s’agisse de l’art ou de la nature, Goethe veut rapporter la<br />

diversité luxuriante des phénomènes naturels à un principe simp<strong>le</strong> et universel, une loi de l’art et de la nature<br />

susceptib<strong>le</strong> d’<strong>en</strong>g<strong>en</strong>drer de multip<strong>le</strong>s et infinies variations dans ses manifestations s<strong>en</strong>sib<strong>le</strong>s. La conception<br />

de l’art que Goethe expose dans ce <strong>texte</strong> se distingue par son caractère objectif et rationnel. Le sty<strong>le</strong>, forme<br />

suprême de l’expression artistique, est tributaire d’une connaissance de l’ess<strong>en</strong>ce des objets : <strong>le</strong> but ultime de<br />

l’artiste est de donner une représ<strong>en</strong>tation s<strong>en</strong>sib<strong>le</strong> de l’ess<strong>en</strong>ce secrète des objets et des phénomènes. A<br />

chacun des trois niveaux artistiques correspond ainsi un degré d’appréh<strong>en</strong>sion de l’ess<strong>en</strong>ce du monde. Ces<br />

trois niveaux, simp<strong>le</strong> imitation, manière et sty<strong>le</strong>, peuv<strong>en</strong>t être décrits comme suit. La simp<strong>le</strong> imitation,<br />

d’abord, est basée sur la perception purem<strong>en</strong>t s<strong>en</strong>sib<strong>le</strong>, l’artiste reproduit l’appar<strong>en</strong>ce des choses tel<strong>le</strong> qu’el<strong>le</strong><br />

apparaît immédiatem<strong>en</strong>t : l’art est alors concret et figuratif. La manière, <strong>en</strong> second lieu, est basée sur l’effet<br />

que l’ess<strong>en</strong>ce produit sur la personnalité et l’imagination subjective de l’artiste ; ce dernier parvi<strong>en</strong>t déjà à<br />

s’é<strong>le</strong>ver du conting<strong>en</strong>t au général, mais il est <strong>en</strong>core dans l’incapacité d’atteindre l’ess<strong>en</strong>ce dans sa pureté et<br />

de l’incarner p<strong>le</strong>inem<strong>en</strong>t dans l’œuvre, car il ne dépasse pas <strong>le</strong> stade subjectif ; cette démarche et ce niveau<br />

de connaissance de l’Idée génèr<strong>en</strong>t un art allégorique, qui constitue, selon <strong>le</strong> poète, <strong>le</strong> modè<strong>le</strong> de l’art<br />

romantique. Le sty<strong>le</strong>, <strong>en</strong>fin, est fondé sur la saisie supras<strong>en</strong>sib<strong>le</strong> de l’ess<strong>en</strong>ce des choses, ess<strong>en</strong>ce située au-<br />

delà de <strong>le</strong>urs appar<strong>en</strong>ces immédiates ; l’artiste donne une forme s<strong>en</strong>sib<strong>le</strong> à l’ess<strong>en</strong>ce idéel<strong>le</strong> et l’art<br />

symbolique réalise alors la synthèse <strong>en</strong>tre l’intériorité du créateur et l’extériorité objective de l’esprit tel qu’il<br />

apparaît dans la nature.<br />

Goethe donne au mot sty<strong>le</strong> une signification tout à fait inédite : <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> est pour lui quelque chose de<br />

profondém<strong>en</strong>t différ<strong>en</strong>t de la manière subjective, et surtout d’unique. Il n’existe qu’un sty<strong>le</strong> alors qu’une<br />

infinité de manières différ<strong>en</strong>tes et subjectives est possib<strong>le</strong>. Le sty<strong>le</strong> est <strong>en</strong> fait une imitation vraie, idéel<strong>le</strong> et<br />

adéquate de la nature, et l’artiste qui veut parv<strong>en</strong>ir à ce niveau de compréh<strong>en</strong>sion et d’expression doit utiliser<br />

un langage universel qui se fonde sur une « étude approfondie des objets ». L’artiste doit percevoir <strong>le</strong>s<br />

différ<strong>en</strong>tes formes et manifestations d’un objet avant de <strong>le</strong>s assimi<strong>le</strong>r dans <strong>le</strong>ur globalité, <strong>en</strong> une série ( ou<br />

« Folge ») harmonieuse de « formes caractéristiques » qui exprime la multiplicité <strong>en</strong> puissance, et rétablit<br />

par-là l’unité ess<strong>en</strong>tiel<strong>le</strong>. Le sty<strong>le</strong> est <strong>le</strong> sommet de l’art et ce dernier peut alors prét<strong>en</strong>dre à la même nob<strong>le</strong>sse<br />

que la sci<strong>en</strong>ce. Les deux derniers modes d’imitation de la nature, correspondant aux deux niveaux de<br />

connaissance, <strong>le</strong> conting<strong>en</strong>t et <strong>le</strong> nécessaire, sont l’allégorie et <strong>le</strong> symbo<strong>le</strong> : ils reconduis<strong>en</strong>t la même<br />

différ<strong>en</strong>ce hiérarchique qualitative : l’allégorie, subjective, n’est qu’un exemp<strong>le</strong> particulier illustrant<br />

l’universel, <strong>en</strong> quelque sorte une photographie figée de quelques-unes des visions partiel<strong>le</strong>s de la série, tandis<br />

que <strong>le</strong> symbo<strong>le</strong>, objectif, incarne l’universel, la série <strong>en</strong>tière, dans <strong>le</strong> particulier.<br />

186 Goethe, JW, Ecrits sur l’art, Simp<strong>le</strong> imitation, manière, sty<strong>le</strong> (1789), p. 95-101<br />

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