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Bi<strong>en</strong> qu’il se distingue des déf<strong>en</strong>seurs <strong>le</strong>s plus naïfs de cette Naturphilosophie par <strong>le</strong> pragmatisme et la<br />

rigueur intel<strong>le</strong>ctuel<strong>le</strong> de ses recherches naturalistes, Goethe incarne aussi dans une large mesure l’approche<br />

orphique de la connaissance 129 .<br />

Après cette brève mise <strong>en</strong> perspective historique, nous allons nous focaliser plus particulièrem<strong>en</strong>t sur la<br />

philosophie de la connaissance du poète de Weimar et préciser comm<strong>en</strong>t el<strong>le</strong> s’harmonise avec une<br />

philosophie de l’art vouée à l’expression de l’ess<strong>en</strong>ce des objets et des êtres. La p<strong>en</strong>sée du poète tisse <strong>en</strong><br />

effet, dans la plus pure tradition classique, des li<strong>en</strong>s très étroits <strong>en</strong>tre sci<strong>en</strong>ce et art : comme il l’exprime dans<br />

l’un des derniers paragraphes consacrés à l’héritage romain dans la partie historique de la Farb<strong>en</strong><strong>le</strong>hre,<br />

Goethe semb<strong>le</strong> t<strong>en</strong>ir d’emblée une démarche artistique comme supérieure à une démarche exclusivem<strong>en</strong>t<br />

sci<strong>en</strong>tifique, dans la mesure où l’œuvre d’art est seu<strong>le</strong> à même d’édifier, par l’union de l’extériorité et de<br />

l’intériorité, la totalité qui doit constituer <strong>le</strong> terme de la connaissance :<br />

« Si nous rev<strong>en</strong>ons à prés<strong>en</strong>t à la comparaison de l’art et de la sci<strong>en</strong>ce, nous nous heurtons alors à la<br />

considération suivante : du fait que dans <strong>le</strong> savoir comme dans la réf<strong>le</strong>xion, nul<strong>le</strong> totalité ne peut être<br />

constituée, car au premier manque l’intériorité, tandis que l’extériorité échappe à la seconde, nous devons<br />

nécessairem<strong>en</strong>t concevoir la sci<strong>en</strong>ce comme un art, si nous nous att<strong>en</strong>dons à y trouver un certain g<strong>en</strong>re de<br />

totalité. Et nous ne devrions même pas la chercher dans la généralité et dans la surabondance car, de même que<br />

l’art s’expose toujours tout <strong>en</strong>tier <strong>en</strong> chaque œuvre singulière, de même la sci<strong>en</strong>ce devrait chaque fois<br />

apparaître <strong>en</strong> chacun des sujets dont el<strong>le</strong> traite. 130 »<br />

Goethe considère ainsi la rédaction de ses ouvrages sci<strong>en</strong>tifiques comme une partie intégrante de son travail<br />

littéraire 131 , <strong>en</strong> cohér<strong>en</strong>ce avec <strong>le</strong> principe de continuité qui guide à la fois son investigation des phénomènes<br />

de la nature et <strong>le</strong>s diverses manières dont il <strong>en</strong> r<strong>en</strong>d compte, que ce soit au travers de ses poèmes, de ses<br />

pièces ou <strong>en</strong>core sous la forme d’ouvrages sci<strong>en</strong>tifiques où <strong>le</strong> sty<strong>le</strong> du poète ne sacrifie <strong>en</strong> ri<strong>en</strong> au cont<strong>en</strong>u.<br />

Mettre la connaissance de la nature au service de l’expression poétique constitue la mission même du poète à<br />

l’image même de l’ambition du premier poète de la nature, Lucrèce, dont Goethe fait l’éloge à Knebel <strong>le</strong> 14<br />

février 1821:<br />

« Ce qui confère une place si é<strong>le</strong>vée à notre Lucrèce <strong>en</strong> tant que poète et lui assure son rang pour<br />

l’éternité, c’est une capacité hautem<strong>en</strong>t s<strong>en</strong>sib<strong>le</strong> d’intuition-perception, qui lui donne cette force de<br />

représ<strong>en</strong>tation ; il dispose éga<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t d’une vive imagination qui lui permet de poursuivre ce qu’il perçoit<br />

jusque dans <strong>le</strong>s profondeurs invisib<strong>le</strong>s de la nature, au-delà des s<strong>en</strong>s, dans <strong>le</strong>s recoins <strong>le</strong>s plus secrets 132 . »<br />

129 Il serait d’ail<strong>le</strong>urs intéressant d’ouvrir <strong>le</strong> débat sur l’utilisation du terme de « connaissance poétique » <strong>en</strong> s’appuyant<br />

sur <strong>le</strong>s réf<strong>le</strong>xions de Bachelard sur <strong>le</strong> sujet.<br />

130 Goethe, JW, Matériaux pour l’histoire de la théorie des cou<strong>le</strong>urs, p. 107<br />

131 Lescourret, Marie-Anne, Goethe, la fatalité poétique, p. 291<br />

132 Le 14 février 1821 Goethe, JW, Briefe III, p.499 cité in Lescourret, Marie-Anne, Goethe, la fatalité poétique, p. 291<br />

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