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condesc<strong>en</strong>dance comme la manifestation de l’une de ces faib<strong>le</strong>sses que l’on suggère propres à tous <strong>le</strong>s grands<br />
hommes. On ne saurait admettre qu’il est possib<strong>le</strong> de retirer d’un approfondissem<strong>en</strong>t de ses travaux de<br />
naturaliste ou de physici<strong>en</strong> quelque chose que la sci<strong>en</strong>ce n’ait aujourd’hui dépassé. Les considérations<br />
sci<strong>en</strong>tifiques de Goethe, et <strong>en</strong> particulier ses observations sur la lumière et la cou<strong>le</strong>ur, s’avérai<strong>en</strong>t déjà si<br />
origina<strong>le</strong>s <strong>en</strong> <strong>le</strong>ur temps qu’el<strong>le</strong>s suscitèr<strong>en</strong>t souv<strong>en</strong>t incompréh<strong>en</strong>sion, dédain et moquerie de la part de ses<br />
contemporains 14 , à l’exception de quelques cerc<strong>le</strong>s de proches admirateurs et d’artistes peintres. Les années<br />
n’y ont ri<strong>en</strong> fait, el<strong>le</strong>s sont demeurées méconnues et ont continué à subir <strong>le</strong>s critiques au cours des deux<br />
derniers sièc<strong>le</strong>s.<br />
Les acquisitions que la sci<strong>en</strong>ce moderne concède aujourd’hui à Goethe pourrai<strong>en</strong>t nous apparaître<br />
secondaires pour peu que nous cherchions à approfondir l’ess<strong>en</strong>tiel, à savoir <strong>le</strong>s conceptions et méthodes sur<br />
<strong>le</strong>squel<strong>le</strong>s <strong>le</strong> poète s’est appuyé pour m<strong>en</strong>er à bi<strong>en</strong> ses observations naturalistes. Il semb<strong>le</strong> évid<strong>en</strong>t que ces<br />
découvertes isolées (découvertes de l’os intermaxillaire, des cou<strong>le</strong>urs physiologiques, etc.) aurai<strong>en</strong>t été<br />
réalisées aussi sans son interv<strong>en</strong>tion, bi<strong>en</strong> que d’une manière certainem<strong>en</strong>t très différ<strong>en</strong>te. Mais il n’est pas<br />
exclu que nous trouvions dans la démarche philosophique de Goethe quelques germes que notre modernité<br />
puisse continuer à développer et à <strong>en</strong>richir des nouvel<strong>le</strong>s connaissances acquises au cours des deux derniers<br />
sièc<strong>le</strong>s. Il ne saurait bi<strong>en</strong> <strong>en</strong>t<strong>en</strong>du être question ici d’opposer simp<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t sci<strong>en</strong>ce mathématique et sci<strong>en</strong>ce<br />
phénoménologique, et de <strong>le</strong>s confronter pour déclarer la préémin<strong>en</strong>ce de l’une sur l’autre. J’essaierai plutôt<br />
de replacer la conception du poète dans une perspective autant culturel<strong>le</strong> qu’historique, et de démontrer son<br />
actualité et son importance, dans la mesure où el<strong>le</strong> est pourrait être à même de nous éclairer sur <strong>le</strong>s rapports<br />
qu’<strong>en</strong>treti<strong>en</strong>t l’homme d’aujourd’hui avec <strong>le</strong>s sci<strong>en</strong>ces, <strong>le</strong>s arts et la nature.<br />
Je proposerai un plan <strong>en</strong> trois grandes parties.<br />
Dans la première, je comm<strong>en</strong>cerai par formaliser, à la lumière de ses écrits autobiographiques et travaux<br />
sci<strong>en</strong>tifiques, <strong>le</strong>s concepts qui font l’originalité et l’unité du naturalisme de Goethe. Je rassemb<strong>le</strong>rai <strong>le</strong>s<br />
réf<strong>le</strong>xions souv<strong>en</strong>t éparses du poète pour expliquer <strong>le</strong>s trois notions récurr<strong>en</strong>tes qui m’apparaiss<strong>en</strong>t<br />
fondam<strong>en</strong>ta<strong>le</strong>s. Je mettrai <strong>en</strong> évid<strong>en</strong>ce <strong>le</strong> fait que ces concepts constitu<strong>en</strong>t des invariants que l’on retrouve<br />
avec une constance étonnante dans <strong>le</strong>s œuvres sci<strong>en</strong>tifiques voire parfois littéraires du poète, et j’examinerai<br />
comm<strong>en</strong>t des notions tel<strong>le</strong>s que cel<strong>le</strong>s de phénomènes primitifs, de polarité, de métamorphose et<br />
d’int<strong>en</strong>sification s’articu<strong>le</strong>nt <strong>en</strong>tre el<strong>le</strong>s.<br />
dernier des magici<strong>en</strong>s ». Si l’on n’ignorait pas purem<strong>en</strong>t et simp<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t ces recherches considérées comme<br />
« malheureuses », on essayait de déresponsabiliser Newton <strong>en</strong> alléguant qu’il faut aussi savoir faire preuve d’indulg<strong>en</strong>ce<br />
à l’égard des grands de ce monde, tout aussi sujets aux égarem<strong>en</strong>ts que <strong>le</strong> commun des mortels. Cf. Bortoft, H<strong>en</strong>ri, La<br />
démarche sci<strong>en</strong>tifique de Goethe, p. 8<br />
14 Lacoste, Jean, Goethe, sci<strong>en</strong>ce et philosophie, p. 12<br />
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