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seul capab<strong>le</strong> d’<strong>en</strong> révé<strong>le</strong>r <strong>le</strong>s secrets par l’usage des mêmes lois de création que cel<strong>le</strong>s que Dieu met <strong>en</strong> œuvre<br />

dans <strong>le</strong> Cosmos. Mais cette conception orphique ne reste pas l’apanage exclusif des artistes : de nombreux<br />

savants se reconnaiss<strong>en</strong>t, après Sénèque, dans cette philosophie naturel<strong>le</strong>, qui <strong>en</strong>joint <strong>le</strong> philosophe à se<br />

comporter dans <strong>le</strong> temp<strong>le</strong> de la Nature comme un fidè<strong>le</strong> et un adorateur de la création, dans <strong>le</strong> respect de<br />

préceptes qui ti<strong>en</strong>n<strong>en</strong>t à la fois de l’objectivité sci<strong>en</strong>tifique et de la mystique contemplative. Il existe ainsi<br />

une reconnaissance implicite que <strong>le</strong> mystère d’une certaine ess<strong>en</strong>ce doit être préservé. Paradoxa<strong>le</strong>m<strong>en</strong>t, <strong>le</strong><br />

thème de la nature personnifiée sous <strong>le</strong>s traits de la déesse Isis que l’on dévoi<strong>le</strong>, n’apparaîtra qu’au XVII ème<br />

et XVIII ème sièc<strong>le</strong>s, précisém<strong>en</strong>t au mom<strong>en</strong>t de l’avènem<strong>en</strong>t de la nouvel<strong>le</strong> sci<strong>en</strong>ce expérim<strong>en</strong>ta<strong>le</strong> 125 . C’est <strong>le</strong><br />

sujet dont traite <strong>en</strong> détail l’ouvrage de Pierre Hadot.<br />

L’attitude orphique r<strong>en</strong>aîtra alors à l’époque romantique avec l’apparition de la Naturphilosophie, vaste<br />

protestation é<strong>le</strong>vée contre deux sièc<strong>le</strong>s de mécanisation et de mathématisation du monde, notamm<strong>en</strong>t<br />

incarnés par Descartes. Ce dernier explicite sa conception de la nature dans son traité du Monde comme suit:<br />

« Par la Nature, je n’<strong>en</strong>t<strong>en</strong>ds point ici quelque déesse ou quelque autre sorte de puissance imaginaire,<br />

mais […] je me sers de ce mot pour signifier la matière même <strong>en</strong> tant que je la considère avec toutes <strong>le</strong>s<br />

qualités que je lui ai attribué comprises toutes <strong>en</strong>semb<strong>le</strong> 126 … »<br />

Des artistes comme Sch<strong>le</strong>gel, Hölderlin, Schil<strong>le</strong>r et Novalis ou des philosophes tels Hegel et Schelling<br />

compteront alors parmi <strong>le</strong>s plus fameux déf<strong>en</strong>seurs de cette tradition orphique, héritage plus ou moins<br />

transformé et actualisé, exprimé avec une inéga<strong>le</strong> naïveté, mais néanmoins omniprés<strong>en</strong>te derrière nombre de<br />

<strong>le</strong>urs œuvres et travaux. Il existe, certes, des différ<strong>en</strong>ces profondes <strong>en</strong>tre <strong>le</strong>s conceptions romantiques d’un<br />

Fichte, d’un Schelling, d’un Hegel, ou d’un Novalis, mais on y retrouve toujours, de manière plus ou moins<br />

explicite, une certaine id<strong>en</strong>tification de la Nature et de l’Esprit. Ainsi Schelling, pour qui la nature est l’esprit<br />

dev<strong>en</strong>u visib<strong>le</strong>, et l’esprit, la nature dev<strong>en</strong>ue invisib<strong>le</strong> 127 , formalise avec clarté et concision <strong>le</strong>s grands traits<br />

de cette philosophie de la nature étroitem<strong>en</strong>t liée à une vision de l’art comme révélateur des mystères du<br />

monde :<br />

« Ce que nous appelons Nature est un poème dont la merveil<strong>le</strong>use et mystérieuse écriture reste pour<br />

nous indéchiffrab<strong>le</strong>. Mais si l’on pouvait résoudre l’énigme, on y découvrirait l’Odyssée de l’Esprit qui,<br />

victime d’une remarquab<strong>le</strong> illusion, se fuit, tout <strong>en</strong> se cherchant, car il n’apparaît à travers <strong>le</strong> Monde que<br />

comme <strong>le</strong> s<strong>en</strong>s à travers <strong>le</strong>s mots 128 . »<br />

125 Hadot, Pierre, Le Voi<strong>le</strong> d’Isis, p. 149<br />

126 Descartes, R<strong>en</strong>é, Le Monde, Garnier 1963, p. 348<br />

127 Godin, Chistian, La nature, p. 84<br />

128 Schelling, Système de l’idéalisme transc<strong>en</strong>dantal, in Schelling, Essais, Paris, 1946, p. 175<br />

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