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Olivier Twist I<br />
Chapitre XX<br />
— Pour quoi faire ? dit Olivier, en reculant de deux pas.<br />
— Pour quoi faire ? répéta la jeune fille en regardant l’enfant ; mais,<br />
dès qu’elle rencontra le regard d’Olivier, elle baissa les yeux. Oh ! pour<br />
rien de mal.<br />
— J’en doute, dit Olivier, qui l’observait aentivement.<br />
— Comme tu voudras, repartit la jeune fille avec un rire affecté. Pour<br />
rien de bien, alors. »<br />
Olivier put voir qu’il avait quelque influence sur la sensibilité de<br />
Nancy, et il eut un instant la pensée de faire appel à sa commisération ;<br />
mais il songea tout à coup qu’il était à peine onze heures, qu’il y avait<br />
encore du monde dans les rues, et qu’il trouverait sans doute quelqu’un<br />
qui ajouterait foi à ses paroles. Dès que cee réflexion se fut présentée à<br />
son esprit, il s’avança vers la porte, et dit bien vite qu’il était prêt à partir.<br />
Ni cee réflexion ni le projet de l’enfant n’échappèrent à Nancy. Tandis<br />
qu’il parlait, elle le regardait aentivement, et elle lui lança un coup<br />
d’œil qui indiquait assez qu’elle devinait parfaitement ce qui se passait en<br />
lui.<br />
« Chut ! dit-elle en se penchant vers Olivier, et en montrant du doigt la<br />
porte, tandis qu’elle regardait autour d’elle avec précaution. Tu ne peux<br />
pas te sauver. J’ai fait pour toi tout ce que j’ai pu, mais il n’y a pas eu<br />
moyen. Tu es cerné de tous côtés, et, si jamais tu dois parvenir à t’échapper,<br />
sois sûr que ce n’est pas en ce moment. »<br />
Frappé du ton énergique de la jeune fille, Olivier la regarda avec étonnement.<br />
Évidemment elle parlait sérieusement. Elle était pâle et agitée, et<br />
tremblait de tous ses membres.<br />
« Je t’ai déjà fait éviter des mauvais traitements, dit-elle, et je t’en<br />
ferai éviter encore ; c’est pour cela que je suis ici : car, si d’autres que moi<br />
étaient venus te chercher, ils t’auraient mené plus durement. J’ai promis<br />
que tu serais sage et tranquille ; s’il en est autrement, tu ne feras que<br />
te nuire et à moi aussi, et peut-être seras-tu cause de ma mort. Tiens !<br />
regarde : voilà ce que j’ai déjà enduré pour toi, aussi vrai que Dieu nous<br />
voit. »<br />
En même temps, elle montrait à Olivier son cou et ses bras couverts<br />
de meurtrissures.<br />
Elle continua, en parlant très vite :<br />
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