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autour du Monde. 287
jette à la mer toutes nos falaifons ; mais il falloit manger
le mauvais comme le bon. Qui pouvoit fçavoir quand cela
finir oit ? Telle étoit notre fituation de fournir en même
tems du parlé qui nous avoir affoiblis ,
du préfent dont les
triftes détails fe répétoient à chaque inftant, & de l'avenir
dont le terme indéterminé étoit prefquele plus cruel de nos
maux. Mes peines perfonnelles fe
multiplioient par celles
des autres. Je dois cependant publier qu'aucun ne s'efl laiffé
abattre , & que la patience à fournir a été fupérieure aux
portions les plus critiques. Les Officiers donnoient l'exemple
, & jamais les matelots n'ont ceffé de danfer le foir,
dans la difette comme dans les tems de la plus grande
abondance. 11 n'avoit pas été nécefîaire de doubler leur
paie.
Nous eûmes conilamment la vue de la nouvelle Bre-
mit i
Defcyiptîon
des habitans
tagne jufqu'au 3 Août. Pendant ce tems il venta peu, deianouveile
c o Bretagne,
il plut iouvent , les courans nous turent contraires, ck
les navires marchoient moins que jamais. La côte prenoit
de plus en plus du Oueft.. Le 29 au matin nous nous
en trouvâmes plus près que nous n'avions encore
été. Ce voifinage nous valut la vifite de quelques pirogues
, deux vinrent à la portée de la voix de la frégate ,
cinq autres furent à l'Etoile. Elles étoient montées chacune
par cinq ou fîx hommes noirs , à cheveux crépus &
laineux, quelques-uns les avoient poudrés de blanc. Ils
portent la barbe aifez longue, ck des ornemens blancs
aux bras en forme de bracelets. Des feuilles d'arbre
couvrent
, tant bien que mal , leur nudité. Ils font grands &
paroifTent agiles & robuftes. Ils nous monîroient une espèce
de pain & nousinvitoient par lignes à venir à terre 5
nous les invitions à venir à bord j mais nos invitations