Les Collections de L’Histoire
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Un modèle <strong>de</strong><br />
gouvernement <br />
Professeur à l’université<br />
Bor<strong>de</strong>aux-Montaigne,<br />
Philippe Chassaigne a notamment publié<br />
une Histoire <strong>de</strong> l’Angleterre, <strong>de</strong>s origines à nos<br />
jours (Flammarion, rééd. « Champs », 2015).<br />
Il publie en octobre 2017 Victoria, reine<br />
d’Angleterre (Gallimard, « Folio biographies »).<br />
NOTE<br />
1. « Twinkle,<br />
Twinkle, Little<br />
Star », Punch,<br />
8 février 1967.<br />
Si la reine Élisabeth II ne dispose que <strong>de</strong> pouvoirs<br />
symboliques, le souverain britannique a été, pendant<br />
plusieurs siècles, un acteur politique majeur. Son<br />
influence s’est fortement réduite à partir du xix e siècle.<br />
Par PHILIPPE CHASSAIGNE<br />
Henri Viii Un <strong>de</strong>s grands souverains <strong>de</strong> la Renaissance,<br />
Henri VIII (1509-1547), représenté sur cette médaille<br />
en majesté, tenta <strong>de</strong> gouverner sans parlement.<br />
Mais la rupture avec Rome en 1534 l’obligea à rechercher<br />
son appui. Le parlement, pourtant encore loin d’être une<br />
« représentation nationale », sauva ainsi son existence.<br />
En février 1967, à la veille <strong>de</strong> la visite<br />
d’État du prési<strong>de</strong>nt du Conseil soviétique<br />
Alekseï Kossyguine à Londres<br />
– la première d’un dignitaire soviétique<br />
<strong>de</strong>puis la révolution d’Octobre ! –, le<br />
magazine satirique britannique Punch<br />
publiait le texte, totalement inventé, d’une note <strong>de</strong>s<br />
services diplomatiques russes expliquant à Kossyguine<br />
qui était la reine Élisabeth II : « chef d’État, chef <strong>de</strong>s forces<br />
armées, chef <strong>de</strong> la fonction publique, détient tous les pouvoirs.<br />
Aucune Constitution, celle-ci restant délibérément<br />
non écrite, et transmise oralement d’un monarque à<br />
l’autre. Nomme personnellement tous les personnages<br />
fantoches [ministres], inaugure et clôt les sessions du<br />
Parlement entièrement à sa volonté, peut le dissoudre<br />
comme elle le souhaite. […] Aucune loi adoptée sans le<br />
consentement du souverain, système judiciaire entièrement<br />
soumis à la tyrannie monarchique » 1 .<br />
Punch voulait ainsi souligner le fossé qui existait entre<br />
les pouvoirs nominaux <strong>de</strong> la reine, inchangés ou presque<br />
<strong>de</strong>puis la fin du Moyen Age, et la pratique institutionnelle.<br />
De fait, si on s’en tient à la lettre <strong>de</strong>s institutions, chacun<br />
<strong>de</strong>s éléments avancés était exact. On le sait bien, néanmoins<br />
: ces pouvoirs sont désormais purement formels<br />
et la fonction avant tout cérémonielle, ce qui n’était pas<br />
le cas quatre ou cinq siècles plus tôt, et même encore<br />
au début du xix e siècle. Comment en est-on arrivé là ?<br />
Il faut remonter à la Glorieuse Révolution <strong>de</strong> 1688<br />
pour voir les premières limitations au pouvoir monarchique.<br />
« Glorieuse » car elle n’entraîna pas mort d’homme,<br />
et encore moins <strong>de</strong> roi, à la différence <strong>de</strong> l’exécution <strong>de</strong><br />
Charles I er en 1649, celle-ci vit Jacques II, soupçonné<br />
<strong>de</strong> tendances absolutistes et, pire encore, <strong>de</strong> confession<br />
TIMOTHY MILLETT COLLECTION/BRIDGEMAN IMAGES<br />
34 LES COLLECTIONS DE L’HISTOIRE N°77