Le cinéma et les autres arts : la citation de la peinture et ... - Archipel
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<strong>peinture</strong> <strong>et</strong> du <strong>cinéma</strong>, du tableau <strong>et</strong> du p<strong>la</strong>n, peut donc s'avérer explicite <strong>et</strong>, selon le cas,<br />
comique <strong>et</strong>/ou dramatique. En fait, « le film questionne à sa façon <strong>les</strong> re<strong>la</strong>tions entre <strong>les</strong> <strong>de</strong>ux<br />
<strong>arts</strong>, <strong>peinture</strong> <strong>et</strong> <strong>cinéma</strong>, en m<strong>et</strong>tant en scène <strong>les</strong> péripéties d'un tournage <strong>de</strong> film l33 » sur <strong>de</strong>s<br />
chef-d'œuvres picturaux illustrant <strong>la</strong> passion du Christ. <strong>Le</strong>s <strong>citation</strong>s-reconstitutions <strong>de</strong>s<br />
œuvres <strong>de</strong>s <strong>de</strong>ux maniéristes italiens ont donc une fonction d'autorité car el<strong>les</strong> ne sont pas<br />
anodines. <strong>Le</strong>ur contenu est étroitement relié au message que Pasolini veut transm<strong>et</strong>tre dans le<br />
film. Dans le court-métrage <strong>de</strong> Pasolini, le personnage du réalisateur (personnifié par Orson<br />
Wel<strong>les</strong>) doit obéir à son producteur. Mais malgré <strong>les</strong> contraintes imposées par <strong>la</strong> production<br />
d'un film sur <strong>la</strong> Passion du Christ, il fournit ses propres interprétations. Alors que <strong>les</strong> <strong>de</strong>ux<br />
représentations traitent du même suj<strong>et</strong>, <strong>la</strong> déposition du Christ sur <strong>la</strong> croix, nous sommes<br />
invités à s'interroger sur <strong>la</strong> manière dont ils sont représentés plutôt que sur ce qu'ils<br />
signifient. De ce fait, <strong>les</strong> <strong>citation</strong>s-reconstitutions <strong>de</strong> La Déposition <strong>de</strong> Fiorentino <strong>et</strong> <strong>de</strong><br />
Pontormo dans le film <strong>de</strong> Pasolini représentent bien le maniérisme italien. <strong>Le</strong>s peintres<br />
maniéristes ont souvent accepté <strong>de</strong> peindre <strong>de</strong>s œuvres religieuses, mais avec <strong>de</strong>s anges aux<br />
ai<strong>les</strong> noircies ou aux visages brouillés. Pendant c<strong>et</strong>te pério<strong>de</strong> <strong>de</strong> <strong>la</strong> Renaissance où <strong>les</strong><br />
conventions artistiques <strong>de</strong> l'idéal humaniste se dissipent peu à peu, <strong>les</strong> peintres Fiorentino <strong>et</strong><br />
Pontormo créent <strong>de</strong>s œuvres avec « the sense of tragic iso<strong>la</strong>tion, intellectual anarchy and<br />
formai extravagence 134 ». <strong>Le</strong> personnage du réalisateur dans La ricotta n'est peut-être pas un<br />
rebelle, mais refuse <strong>de</strong> s'inspirer <strong>de</strong> <strong>la</strong> tradition canonique <strong>et</strong> pieuse du <strong>cinéma</strong> religieux. Pour<br />
illustrer son détachement spirituel ou m<strong>et</strong>tre en cause <strong>la</strong> véracité d'un Dieu tout puissant, le<br />
réalisateur dans Je film déci<strong>de</strong> <strong>de</strong> m<strong>et</strong>tre en scène <strong>les</strong> œuvres <strong>de</strong> peintres qui suivent <strong>la</strong><br />
tradition naturaliste du point <strong>de</strong> vue du suj<strong>et</strong>, mais qui se révoltent contre le réalisme<br />
stylistique. En choisissant <strong>les</strong> œuvres maniéristes <strong>de</strong> Fiorentino <strong>et</strong> <strong>de</strong> Pontormo, le<br />
personnage du cinéaste essaie bravement <strong>de</strong> démontrer que <strong>la</strong> raison peut être tout aussi<br />
passionnée que passionnante que <strong>la</strong> religion à <strong>la</strong>quelle il n'adhère pas 135.<br />
progressive <strong>de</strong>s <strong>autres</strong> personnages rieurs en contre-champ. Mais Stracci, un homme vulgaire en apparence, à<br />
l'appétit dévorant, est en fait l'image du Christ mort sur <strong>la</strong> croix. La ricol<strong>la</strong> révèle j'étendu selon <strong>la</strong>quelle <strong>les</strong><br />
aRparences (Stracci mérite le mépris <strong>et</strong> le ridicule) cachent une vérité opposée (Stracci est admirable). lb id.<br />
1 3 Marie-France Chabat-Houillon, Anthony Wall, op. cil., p. 114.<br />
134 Giuliano Briganti, l<strong>la</strong>/ian Mannerism, <strong>Le</strong>ipzig, Éditions VEB, 1962, p. 26, cité in Maurizio Viano, op. cil.,<br />
p. lOS.<br />
135 <strong>Le</strong> personnage du réalisateur dans le film est l'alter ego <strong>de</strong> Pasolini. Reconnu <strong>et</strong> dénoncé à l'époque pour ses<br />
positions anti-cIérica<strong>les</strong>, Pier Paolo Pasolini dévoile au travers le personnage du cinéaste <strong>de</strong> La ricotta, son<br />
cynisme vis-à-vis <strong>de</strong> <strong>la</strong> religion catholique. En ajoutant à ses propos b<strong>la</strong>sphématoires, pour l'époque, <strong>de</strong>s scènes<br />
suggérant <strong>de</strong>s liaisons homosexuel<strong>les</strong>, Pasolini fût condamné à quatre mois <strong>de</strong> prison avec sursis pour outrage à <strong>la</strong><br />
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