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10.pdf - Formules

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DOMAINES VOISINS<br />

Lindos 49 , d’après l’Anthologie Palatine 50 . Elle a tantôt quatre vers et tantôt<br />

six. Dans ce dernier cas, elle n’est plus « cyclique », et ne pourrait donc<br />

pas servir d’argument à Socrate… On n’ajoutera rien ici aux fleuves<br />

d’encre qu’elle a fait couler (« Tant qu’il coulera de l’encre… » etc.), mais<br />

Diogène Laërce affirmait déjà : « L’épigramme n’est pas d’Homère, qui a<br />

vécu, dit-on, bien des années avant Midas 51 . » En tout cas, sa première<br />

attestation, en quatre vers, se trouve dans le Phèdre de Platon, et il peut<br />

paraître étrange – ou savoureux – que l’attribution la plus simple et la plus<br />

naturelle ait été la moins fréquemment envisagée. Léon Parmentier, qui<br />

avait sans doute lu La lettre volée, d’Edgar Poe, a découvert ce qui n’était<br />

aucunement dissimulé : l’épigramme est tout simplement de Platon luimême<br />

52 . Il n’y a rien de surprenant à ce que l’on compose des épitaphes<br />

fictives, dès lors que l’épigramme (l’« inscription » en vers) est devenue<br />

un genre littéraire, et Platon, c’est connu, a le goût du pastiche : il s’y est<br />

déjà livré avec l’oraison funèbre des soldats morts, dans le Ménexène, où<br />

l’a étudié Nicole Loraux 53 . Et il vient très probablement de refaire le coup<br />

dans le Phèdre même : le prétendu discours de Lysias a toutes chances<br />

d’être de la main de Platon.<br />

Loup y es-tu ? — Je finis mon pastiche…<br />

Quel mauvais caractère, ce Phèdre ! Peut-être, mais les contemporains<br />

d’un pastiche ont l’avantage d’en reconnaître le modèle… Wilamowitz,<br />

qui n’aimait pas les vers de Castorion, a presque découvert le pot aux<br />

roses — si ce n’est qu’il prenait le pastiche pour le modèle. Un fragment<br />

de Critias, fait allusion, dit-il 54 , à l’« épitaphe de Midas ». Il suffirait, je<br />

crois, d’inverser le propos pour mieux comprendre la mauvaise humeur<br />

de Phèdre.<br />

Critias, cousin de Platon dont un dialogue porte le nom, était un aristocrate,<br />

ennemi de la démocratie, partisan de la loi dite naturelle — c’est-àdire<br />

celle du plus fort — et donc, en 404-403, dans Athènes vaincue, chef<br />

49 Un des « Sept Sages » de la Grèce. Voir Diogène Laërce, Vies et doctrines des philosophes<br />

illustres, I, 89-90.<br />

50 Anthologie Palatine, VII, 153, Les Belles Lettres, C.U.F./Budé, 1960, texte établi par<br />

Pierre Waltz, et, pour cette épigramme, traduction et annotation d’Alphonse Dain. Le<br />

lecteur trouvera là toutes les références utiles.<br />

51 Diogène Laërce, op. cit. (n° 49).<br />

52 La place manque aussi, bien sûr, pour examiner ici la question en détail. Voir Léon<br />

Parmentier, « L’épigramme du tombeau de Midas et la question du cycle épique » dans<br />

Bulletins de la Classe des Lettres et des Sciences morales et politiques et de la Classe des Beaux-<br />

Arts de l’Académie royale de Belgique, Bruxelles, 1914, p. 341-394. Dain renvoie à cet<br />

article.<br />

53 Nicole Loraux, L’Invention d’Athènes, Mouton-E.H.E.S.S. 1981, p. 308-332.<br />

54 Ulrich von Wilamowitz-Moellendorf, Sappho und Simonides, Berlin, 1913, p. 109 (cité<br />

par L. Parmentier, op. cit. p. 357, n. 4).<br />

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