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10.pdf - Formules

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DOMAINES VOISINS<br />

Un sot portait dans un seau le sceau du Saint-Père. En passant sur un<br />

pont, le sot fit un tel saut que les trois |so| . tombèrent à l’eau.<br />

Dès lors, on ne traduit jamais qu’à moitié l’épigramme d’Optatien,<br />

sinon avec un « aiguillage » ; par exemple :<br />

208<br />

Les Muses bienheureuses composent de rudes poèmes :<br />

Elles nouent des liens divergents suivant la diversité des mètres,<br />

Les ajustages vont à cloche-pied, tordant le cœur du poète ;<br />

Et (pourtant) tous, partout, seront faits de mots {interchangeables<br />

{en synaphie<br />

Mais la plaisanterie pose un problème réel. Qu’en est-il d’un vers<br />

employé depuis cinq cents ans par de nombreux poètes – nous sommes<br />

loin de les connaître tous –, alors que les possibilités métrico-rythmiques<br />

offertes sont en nombre fini, et que son public tend à se restreindre ? On a<br />

pu estimer, à l’aube du XX e siècle, que certaines formes de l’art occidental<br />

— l’alexandrin, la peinture figurative, la musique tonale — étaient arrivées<br />

au bout de leurs ressources créatives. De l’avis d’Optatien, l’hexamètre<br />

était-il, au IV e siècle, une forme en voie d’épuisement ? L’effet de pastiche<br />

prend un relief très net si l’on rapproche ces vers plus particulièrement de<br />

la poésie de Stace, de Valérius Flaccus ou de Silius Italicus. Il ne semble<br />

pas impossible de repérer, par exemple, de Virgile à Silius Italicus, une<br />

certaine mécanisation du vers, par un certain relâchement de la synaphie,<br />

justement, — et c’est peut-être ce qu’Optatien veut mettre en valeur.<br />

On est tout près de l’époque charnière où vont s’esquisser des formes<br />

poétiques nouvelles, répondant à des besoins nouveaux, et qui supplanteront<br />

les anciennes. Dans la seconde moitié du IV e siècle, saint Ambroise<br />

composera, pour les fidèles de sa cathédrale de Milan, des hymnes où il<br />

jouera un autre double jeu en fabriquant des vers qui puissent être lus par<br />

les lettrés comme des vers de facture quantitative classique, et chantés par<br />

le peuple comme des vers qui sont, en réalité, les ancêtres des vers italiens<br />

à venir.<br />

Or, dans le temps où saint Ambroise se livre à cet exercice pieux et<br />

savant à la fois, saint Augustin reprend, dans son traité De la musique<br />

(De musica), la théorie gréco-latine traditionnelle du rythme. Au livre V,<br />

à partir d’un vers de Virgile à peine modifié, il montre qu’un vers fait<br />

de deux parties interchangeables n’est plus un vers 90 . Il est frappant de<br />

retrouver là, en latin, pour condamner la permutabilité comme destruc-<br />

90 Augustin, De Musica, V, III, 3-4. — Virgile, Énéide, III, 549, transformé en un pseudohexamètre<br />

dssdss.

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