Le ton des mémoires est optimiste. Cette attitude explique sans doute le faible soucides religieux d’étayer leurs propos. Ils répondent ainsi qu’ils n’ont pas besoin decommuniquer une Règle qui est déjà connue de tous. La Règle de saint Benoît ne se trouve-tellepas dans tout le royaume 88 ? De plus les constitutions particulières sont observées detemps immémorial, assurant de fait leur légitimité et leur valeur 89 . De toute façon,l’observance des règles est bien accomplie ; les prévaricateurs sont punis 90 . L’inutilité de laréforme est donc une évidence. Comment se sentir concerné ? Les nombreuses lacunes desmémoires ne viennent pas uniquement du peu d’efforts des réguliers. Elles manifestentégalement une certaine insoumission à l’égard de la Commission. Les généralités développéesavoisinent les lieux communs, telle la stricte observance, les droits seigneuriaux, la juridictiondu père abbé, etc. En fait, les réguliers procèdent à une rétention d’informations. Les abus, lesdysfonctionnements, l’obéissance, le respect de la régularité sont éludés. Ce mouvement deméfiance vis-à-vis des questionnaires se traduit également par le recours systématique desreligieux aux ordinaires. En cas de doute ou d’informations insuffisantes, l’abbé de Maroillesinvite son correspondant, le président de la Commission, Mgr La Roche-Aymon, à s’adresserà l’archevêque de Cambrai 91 . L’abbaye d’Auchy-les-moines rappelle à son tour que lemonastère est sous la juridiction de l’évêque de Boulogne. A ce titre le silence est gardé sur larégularité, les devoirs et les offices. Elle demande au rapporteur de la Commission des’enquérir de tout cela auprès de l’évêque du lieu 92 . La même logique est reprise par lesmoines d’Anchin en réponse à la lettre de l’archevêque de Reims 93 . En ce sens la soumissiondes religieux aux projets de la Commission est imparfaite. Sans amorcer de réelle résistance,certains commencent, dès l’automne 1766, à développer une ébauche de contre-arguments àopposer à la Commission. Ainsi les bénédictins d’Anchin rappellent-ils à la Commission lesprivilèges dont ils bénéficient par leur appartenance au corps des Etats d’Artois qui « segouvernent par des privilèges particuliers que le Roi a bien voulu […] conserver et protéger ».Ces premiers échanges épistolaires annoncent donc les futurs débats entre des religieuxméfiants et une Commission audacieuse.b) Un tableau général de la situation monastique88 L’argument est développé par les abbayes d’Anchin (voir A.D.N. 11H6 pièce 82) et de Maroilles (A.D.N.11H6 pièce 88).89 En effet les constitutions manuscrites de Maroilles sont « observées de temps immémorial » (A.D.N. 11H6pièce 88) ; tout cela « s’observe et s’est observé ponctuellement de temps immémorial » (A.D.N. 11H6 pièce87).90 A.D.N. 11H6 pièce 88.91 Ibid.92 A.N. G 9 27, Abbaye d’Auchy-les-Moines.93 A.D.N. 11H6 pièce 82.26
Quoique incomplets, les mémoires réunis répondent aux premiers vœux de laCommission. La phase initiale étant de dresser un tableau plus ou moins fidèle de la situationmonastique, les commissaires réussissent l’effort de centralisation. La richesse desinformations collectées permet ainsi, à plus de deux siècles de distance, d’apprécier l’étatglobal des religieux du Nord.Grâce à la Commission, un travail de synthèse permet d’établir précisément lasituation monastique du Nord. Des tableaux statistiques recensent l’ensemble des maisonsreligieuses, classées par ordre. Des renseignements annexes fournissent des informationsutiles, tel le nombre de religieux par maison, ainsi que le niveau des revenus 94 . Ainsi établies,ces données font d’abord apparaître un réseau important d’abbayes bénédictines moyennesdans le Nord. Ces bénédictins appartiennent pour la majorité d’entre eux aux « anciensbénédictins », et non aux nouvelles congrégations telles que Cluny, Saint-Vanne, Saint-Maur,Cîteaux ou Fontevraud. Ces-dernières ne rassemblent que neuf maisons sur les trente-neufsuivant la règle de saint Benoît. C’est dire l’importance des anciens bénédictins sur les terresdu Nord. Ceux-ci se répartissent équitablement à travers la région, dans des établissementsaux effectifs équilibrés 95 . De nombreuses annexes, appelées prieurés ou prévôtés occupent lereste du territoire, avec des communautés plus modestes de quelques religieux à peine. Latotalité de ces maisons bénédictines relèvent de la juridiction de l’ordinaire. Le diocèsed’Arras regroupe huit maisons et cent vingt-six réguliers, dont Anchin, Hasnon etMarchiennes. C’est un territoire bien doté, à l’image de celui de Cambrai où Hautmont,Liessies, le Saint-Sépulcre et Maroilles sont de grands centres spirituels. Les autres siègessont bien moins garnis. Côté français, Boulogne recense cinq maisons occupées par trente sixreligieux, avec notamment Auchy-les-moines, tandis que Saint-Omer compte seulementl’abbaye de Ham et ses treize occupants. Enfin, de l’autre côté de la frontière, l’évêqued’Ypres est l’ordinaire du monastère français de Bergues-Saint-Winocq et de ses vingtréguliers. Les abbayes de Maroilles, d’Auchy, d’Anchin et du Saint-Sépulcre dont lesmémoires viennent d’être étudiés, se rattachent ainsi à ce réseau de monastères bénédictinsnon réformés aux effectifs suffisants 96 . C’est parmi ce réseau que vont se coaliser certains94 LECESTRE (L.), Abbayes, prieurés et couvents d’hommes en France. Liste générale d’après les papiers de laCommission des Réguliers en 1768.95 COTTINEAU (L. H.), Répertoire topo-bibliographique des abbayes et prieurés.96 D’après la Commission, l’abbaye d’Anchin regroupe 43 religieux (voir LECESTRE (L.), Abbayes, prieurés etcouvents d’hommes en France. Liste générale d’après les papiers de la Commission des Réguliers en 1768),Auchy-les-Moines 11 (voir A.N. G 9 27), Maroilles 26 (voir A.D.N. 11H6 pièce 87) et le Saint-Sépulcre 20 (voirLECESTRE (L.), op. cit.).27
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