Marculphe, cité dans le mémoire, rappelle que « selon les règles de la nature et du bon sens »il vaut mieux que l'autorité revienne à l'abbé plutôt qu'à l'évêque.Le pouvoir de l'évêque est traditionnellement composé de deux puissances 197 . Lapremière, la puissance de l'Ordre, est selon saint Thomas spirituelle, immuable etimprescriptible. C'est surtout l'administration des sacrements. La seconde, la puissance deJuridiction, concerne le gouvernement de l'Eglise , comme la discipline. D'après GrégoireIV 198 , si l'Eglise de Rome s'est déchargée sur les évêques, elle ne leur a pas accordés laplénitude de son pouvoir. Les évêques ne peuvent rien s'attribuer, ni prétendre en matière dejuridiction et de discipline, au-delà de ce qui leur est acquis ou laissé par la concession despapes, les saints décrets et les coutumes anciennes. Aussi la limitation de l'autorité n'est-ellepas un relâchement de discipline. En effet, pour saint Bernard, les évêques sont établis parDieu pour conserver, sans envie, à un chacun, ce qui lui appartient.En conclusion les évêques-commissaires ne paraissent pas pouvoir avoir une autoritéhors de leur diocèse, tout comme ils doivent se contenter d'un droit de visite restreint. Parailleurs, l'argumentation des réguliers, afin d'être inattaquable, s'efforce de procéder à denombreuses références savantes. La glose, le Décret, les Clémentines et des canonsconciliaires côtoient ainsi le Docteur Angélique, le canoniste ultramontain Fagnan,Marculphe, l'historien de l'Eglise Thomassin ou encore saint Bernard.L'argumentation des réguliers ne se contente pas d'exposer une simple succession detextes avec un lien logique minimal. A deux reprises elle avance l'idée d'un droit de résistancedont bénéficieraient les religieux contre les abus. Il s'agit toujours, à l'origine, de contrer lesingérences néfastes 199 . Parce que l'évêque est d'un autre ordre et d'une autre qualité que lesréguliers, son ingérence le transforme eu un monstre dans le corps de l'Eglise, pour reprendrel'image de saint Bernard. Les prélats n'ont en effet aucun intérêt à se rendre maîtres d'unepratique monastique qu'ils n'ont jamais appliquée, car tout oppose la fonction épiscopale et lavie dans le cloître : sont inconciliables l'esprit du gouvernement épiscopal et la régularitémonastique, tout comme la pompe et la magnificence face au recueillement dans la retraite etle silence, ce que rappelle le mémoire.La première résistance possible reconnue aux religieux est active 200 . « Si des évêquesse livrent avec un peu trop d'ardeur et de force contre les libertés monastiques, les abbésdoivent s'armer de quelque fermeté pour se défendre ». A l'occasion du troisième concile deLatran en 1179, Alexandre III avait proposé aux réguliers de prêter son autorité pour soutenir197 Id. p. 4-8.198 Dans le Décret.199 A.D.N. placards 8340 pièce 6, pp. 29-30.200 Id. pp. 39-41.52
leurs droits et leurs libertés. Cette résistance se justifie par l'abandon de « l'obligation qu'ontles prélats de s'attacher inviolablement aux anciennes constitutions de l'Eglise ». En effet leDécret confie aux prélats la garde des canons, ce qui fait écrire à saint Léon que touteentreprise sur ces saintes règles troubles l'ordre des juridictions et affaiblit l'union que tout lecorps de l'Eglise doit conserver.Une seconde voie, passive, plus accessible et peut-être plus efficace, est proposée auxreligieux 201 . Elle s'appuie sur l'idée que douze siècles ont pu confirmer les libertésmonastiques par une possession continuelle. Elle seule d'ailleurs pourrait suffire à défaut detout autre moyen. La maxime quidquid potest quis possidere, potest et praescribere permet àl'abbé d'en prescrire le droit. En effet quarante à cinquante années autorisent la possession etcent ans prescrivent contre l'Eglise et les princes : mille ans de présence monastique sont parconséquent une garantie. Les religieux poursuivent leur raisonnement avec Fagnan, quireconnaît, à leur avantage, que tout ce que possèdent les évêques est sujet aux lois de laprescription, sauf ce qui concerne l'Ordre et le caractère épiscopal. Sûrs de leurs droits lesréguliers justifient ainsi leur refus de se soumettre aux contrôles de l'épiscopat.Cette démonstration demeure toutefois bien théorique. La Règle de saint Benoît,attestée par les autorités ecclésiastiques, protège certes le cloître du regard épiscopal; elleencourage pourtant ce dernier à intervenir en matière disciplinaire. L'objectif de laCommission étant de restaurer en priorité la discipline, ce mémoire ne peut donc pas s'yopposer en totalité. Tout au plus démontre-t-il l'illégalité, au regard du droit ecclésiastique, ducontrôle du temporel et des novices auquel procède l'épiscopat français.b) les atteintes laïques et abbatiales au pouvoir juridictionnel de l'évêqueLe droit purement ecclésiastique ne peut être le seul garde-fou contre les abus del'autorité épiscopale. La législation laïque a en effet développé un droit particulier touchantl'organisation épiscopale. C'est ainsi que les religieux démontrent dans un premier temps lalégitimité de l'intervention étatique dans la discipline ecclésiastique 202 , afin de justifier ensuitel'existence d'un intérêt pour le roi dans le domaine monastique.Le mémoire utilise l'argument traditionnel de la théorie des deux puissances : « lemonde politique et chrétien, aussi bien que le naturel, roule en quelque façon sur deux pôles ;ces deux pôles sont l'Autorité de l'Eglise et celle de l'Etat ». « Le bel ordre du monde et lafélicité des hommes dépend du concert et de l'union de ces deux puissances ». Chacun esttenu de rester dans les bornes de sa juridiction; ces bornes sont pour l'évêque les canons de201 Id. p. 45.202 Id. pp. 8-9.53
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