Actes - Perspectives étudiantes féministes - Les Études féministes ...
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L<br />
es nouvelles techniques de reproduction (ou NTR), qui prennent leur essor<br />
dans les années 1980 en Occident, ont suscité de vives critiques de la part<br />
de la mouvance féministe. Bien que les avis soient quand même partagés,<br />
schématiquement, entre d’une part les possibilités en matière de maternité ouvertes<br />
par les NTR, et de l’autre la crainte que ces techniques engendrent un accroissement<br />
du contrôle social sur le corps des femmes et leur maternité, cette dernière position<br />
est majoritaire dans les rangs <strong>féministes</strong>. Cette large réprobation n’est pourtant pas<br />
si évidente, car les <strong>féministes</strong> s’étaient presque unanimement ralliées en faveur de la<br />
contraception et de l’avortement. Or dans les deux cas, il s’agit pour les femmes<br />
d’accéder à une souveraineté plus grande à l’égard de la maternité : après avoir acquis<br />
le droit de ne pas avoir d’enfants, elles doivent aussi pouvoir faire dépendre de leur<br />
volonté la capacité d’en avoir, fûtce, dans le cas de la maternité libre, comme dans<br />
celui du désir d’enfant, en déjouant « la nature ». Dès lors cette contestation féministe<br />
des NTR s’avère finalement délicate, voire contradictoire, quand elle finit par faire<br />
le jeu des adversaires de l’avortement. C’est le risque que véhicule la définition de<br />
l’embryon comme « personne humaine potentielle », introduite dans un souci de<br />
protection des embryons surnuméraires 1 visàvis de l’expérimentation scientifique.<br />
C’est également le danger que court le recours / retour au naturalisme, mobilisé pour<br />
préserver les femmes d’une surenchère technicienne sur leurs corps, alors que la<br />
critique antinaturaliste est fondamentale au féminisme matérialiste. Afin d’éviter ces<br />
confusions qui desservent au final les deux causes – droit à l’avortement et accès<br />
aux NTR – et empêchent une analyse des rapports sociaux de sexe en jeu dans les<br />
deux cas de figure, il me semble qu’il est impératif d’identifier précisément la<br />
1 <strong>Les</strong> embryons dits « surnuméraires » résultent de l’anticipation par les praticiennes et praticiens du<br />
fort taux d’échec de la fécondation in vitro. Ils produisent à l’avance de nombreux embryons à<br />
partir des gamètes des deux géniteurs de manière à pouvoir d’une part en introduire plusieurs dans<br />
l’utérus de la femme, espérant que l’un d’entre eux s’implante, de l’autre recommencer l’opération<br />
plusieurs fois si besoin est. Ceux qui ne sont pas utilisés, pour cause de réussite ou d’abandon du<br />
projet parental, sont dits « surnuméraires » (Vandelac 1996 : 63).<br />
<strong>Actes</strong> – <strong>Perspectives</strong> <strong>étudiantes</strong> <strong>féministes</strong> 208