usait de paroles humbles pour les saluer, et il éprouvait plus de joie à se trouver avec les pauvres qu'avec les riches. Il agissait ainsi sous mes yeux de façon pour ainsi dire continue et je le voyais se comporter avec cette humilité. C'était un homme d'une grande patience. Je l'ai connu sur une longue période. Or, jamais je ne l'ai vu énervé contre quelqu'un ni en colère, sauf quand il entendait dire qu'on machinait quelque injustice contre son prochain. Il se fâchait alors contre celui qui cherchait injustement à intenter un mauvais procès ; et il le pressait et l'amenait par ses saintes paroles à un accord de paix. Il était d'une très grande régularité dans l'oraison, qu'il pratiquait à genoux, le capuchon tiré sur son visage, et il célébrait la messe presque tous les jours. Je l'ai vu très souvent prier ainsi et célébrer bien des messes. Il prêchait fréquemment au peuple la parole de Dieu. C'est ce que j'ai vu bien des fois et entendu. Il avait une grande compassion envers les mineurs, les orphelins, les veuves et les autres malheureuses personnes. Je l'ai vu maintes fois aller à la rencontre de telles gens, et il leur disait alors de venir chez lui, qu'il leur partagerait les biens qu'il avait reçus de Dieu. A diverses reprises je l'ai vu envoyer aux veuves et autres personnes qui habitaient l'«hôtellerie» un ou deux boisseaux de blé à faire passer au moulin. Un jour, je ne me rappelle pas lequel, qu'il y avait grande disette en été et que dom <strong>Yves</strong> n'avait à donner aux pauvres qu'un cheval qu'il gardait pour cultiver ses terres, il s'en alla de Ker Martin à la ville de Tréguier trouver un bourgeois nommé Rivalan Tranquie, qui avait épousé une de ses sœurs. «Achetez-moi mon cheval, lui dit-il». Le bourgeois se mit à le railler : «Vous êtes un sot, lui dit-il, de vouloir vendre votre cheval pour faire des cadeaux aux pauvres». Dom <strong>Yves</strong> ne tint pas compte de ces paroles outrageantes, mais il insista auprès du bourgeois, qui lui acheta son cheval cinquante sols. Une fois le prix fixé et payé, dom <strong>Yves</strong> rentra en toute hâte chez lui et pria sa sœur de lui envoyer dix sols de pain à distribuer aux pauvres, car de tous côtés des pauvres le suivaient presque continuellement. J'ai vu et entendu comment dom <strong>Yves</strong> vendit son cheval et je l'ai entendu prier sa sœur de lui envoyer les pains et j'ai vu son serviteur mettre les pains dans une corbeille, et j'ai l'absolue conviction que ces pains-là furent distribués aux pauvres, étant donné que des pauvres, comme je l'ai dit précédemment, le suivaient». Etc. Etc. TEMOIN 33 Dame Oliva, veuve du seigneur Olivier Charruel, chevalier, de la paroisse de Pleumeur, diocèse de Tréguier... « J'ai connu dom <strong>Yves</strong> durant les huit années ou environ qui ont précédé sa mort. J'ai la conviction que c'était un homme chaste. Jamais je n'ai remarqué chez lui un symptôme de mal ni entendu de sa bouche une parole mauvaise ou déshonnête ; bien au contraire les paroles qu'il proférait étaient toujours vertueuses, chastes, pures, voire très pures, et de toute manière de résonance chaste. Il s'abstenait des aliments ordinairement servis et de vin, et pourtant le chevalier, mon mari, et moi-même nous insistions beaucoup et bien souvent pour le faire agir autrement ; si parfois d'aventure las de nos prières, il se trouvait forcé, il se contentait de verser en souriant un tout petit peu de vin dans un gobelet plein d'eau et c'était nos prières qui le contraignaient à en boire. Et bien qu'il ne prît pas les aliments communs, il feignait pourtant de le faire. Sa nourriture ordinaire se composait de pain grossier avec des plantes potagères ou d'autres potages préparés uniquement au sel et à l'eau ; mais parfois, rarement, il mangeait ou faisait semblant de manger un peu de poisson pour céder à nos instances, mais c'était contre sa volonté libre. Je le sais pour l'avoir constaté bien des fois tant chez moi que chez le seigneur Guillaume de Tournemine, dans la ville de Tréguier, où j'ai eu maintes occasions de le voir manger et boire de la manière que j'ai décrite. C'était un homme d'une grande bonté envers les pauvres et les malades ; il visitait les impotents, et distribuait aux pauvres tout ce qu'il pouvait avoir. Bien des pauvres me l'ont dit, à qui il faisait des aumônes. Et j'ai constaté que des pauvres le suivaient bien souvent. D'ailleurs tout cela est de notoriété publique sur le territoire de la Bretagne. C'était un homme d'une grande humilité. J'ai vu l'humilité avec laquelle il saluait les pauvres du Christ. J'ai constaté l'humilité de ses gestes, de son maintien, de sa démarche, expressions visibles de l'humilité de son âme. C'était un homme d'une grande patience. Il se fâchait rarement, voire jamais. En effet si je l'ai vu fréquemment, jamais je n'ai constaté chez lui de la colère ou de l'agacement contre quelqu'un. Il priait assidûment, célébrait de même, et prêchait aussi quand il pouvait trouver un endroit et du temps pour le faire. Je l'ai vu bien des fois prier ; je l'ai vu et entendu célébrer la Messe et maintes fois prêcher. C'était un homme d'une grande compassion envers les pauvres, les orphelins et les veuves, et les personnes malheureuses. Je l'ai vu compatir aux malheurs de ces gens-là. Il s'est chargé gratuitement du procès qu'un pauvre (j'ai totalement oublié son nom) avait contre le seigneur Olivier, mon mari, et il les a mis d'accord, après une longue contestation. L'affaire de ce pauvre, j'ai vu dom <strong>Yves</strong> la prendre en main lui-même contre mon mari ». Etc. Etc. page 40 / 123
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sont arrivés Jean Kanig, de la par
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