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Le licenciement des salariés protégés (DE février 2006) (pdf - 1.1 Mo)

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CONCLUSION GENERALE<br />

La question qui avait été posée en préalable à cette enquête portait à la fois sur les causes de la stabilité <strong>des</strong> deman<strong>des</strong><br />

de <strong>licenciement</strong> <strong>des</strong> <strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong> et sur leur plus grande acceptation. À l'issue de l'étude, plusieurs réponses peuvent<br />

être avancées.<br />

Une première explication peut être tirée de la présence de contraintes exogènes qui s'imposent indifféremment le salarié<br />

protégé et son employeur : c'est le cas pour certaines inaptitu<strong>des</strong> et pour une grande partie, <strong>des</strong> <strong>licenciement</strong>s pour<br />

motifs économiques. Ces derniers, dès lors qu'ils s'accompagnent de plans de sauvegarde de l'emploi comportant <strong>des</strong><br />

dispositions qui peuvent apparaître, d’un certain point de vue, relativement avantageuses, et intégrant un plan de<br />

volontariat peuvent expliquer que certains <strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong> se prononcent pour leur intégration dans le volant de ceux<br />

qui seront touchés par les <strong>licenciement</strong>s.. D'autre part, certains <strong>licenciement</strong>s économiques collectifs ne sont pas perçus<br />

par les <strong>salariés</strong> comme <strong>des</strong> <strong>licenciement</strong>s mais comme <strong>des</strong> mesures d'âge permettant aux <strong>salariés</strong> concernés de pouvoir<br />

enfin se retirer de l'activité professionnelle.<br />

Toutefois, cette acceptation "consensuelle" est loin d'épuiser l'explication, car tous les <strong>licenciement</strong>s ne sont pas<br />

acceptés par les <strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong>.<br />

En premier, les motifs de <strong>licenciement</strong> ne peuvent, à eux seuls, parvenir à expliquer les réactions <strong>des</strong> <strong>salariés</strong>.<br />

L'assentiment à un <strong>licenciement</strong> pour motif économique n'est donné par les <strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong> que si les mesures<br />

économiques prises, qui intègrent le <strong>licenciement</strong>, apparaissent comme une fatalité. Autant que les déterminants<br />

économiques, c'est en effet la perception, par les <strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong>, que l'entreprise ne fait pas un usage stratégique de<br />

l'évolution du contexte, qu'elle est bien soumise à <strong>des</strong> contraintes qui lui échappent, qui conditionne leur accord. En<br />

outre, le motif économique est sur représenté dans les deman<strong>des</strong> de <strong>licenciement</strong>s de <strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong>. Certains<br />

<strong>licenciement</strong>s pour inaptitude se révèlent être aussi <strong>des</strong> habillages juridiques permettant de sortir de situations<br />

conflictuelles complètement bloquées.<br />

En second, il reste un fort taux de <strong>licenciement</strong>s pour lesquels l'accord ne va pas de soi au départ.<br />

La compréhension du fondement <strong>des</strong> désaccords et de leur dynamique va donc nous permettre de compléter le premier<br />

élément de réponse.<br />

<strong>Le</strong>s <strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong> occupent <strong>des</strong> mandats très différents, notamment quant aux enjeux qu'ils véhiculent. Ils<br />

bénéficient pour cela d'une protection qualifiée par les juges d'exceptionnelle et exorbitante du droit du commun. La<br />

jurisprudence fonde, en droit, une objectivation du mandat : il s'agit moins de protéger la personne que les fonctions<br />

qu'elle assume. C'est donc le mandat, comme lieu d'expression collective <strong>des</strong> <strong>salariés</strong> qui est l'objet de la protection.<br />

C'est aussi le mandat qui donne au salarié qui le détient un certain nombre de prérogatives, notamment de demander <strong>des</strong><br />

comptes à l'employeur sur sa gestion, mais aussi <strong>des</strong> pouvoirs. Ces droits ainsi reconnus impliquent, corrélativement,<br />

<strong>des</strong> devoirs ; leur interdépendance fondant l'idée de statut. La relation de subordination liée au contrat de travail se<br />

trouve ainsi fortement tempérée par le fait que le mandat fournit un statut qui échappe, en partie, à la relation<br />

contractuelle.<br />

Cette conception juridique du mandat trouve une traduction sociologique dans les comportements d'une partie <strong>des</strong><br />

<strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong>. Ceux-ci conçoivent leur relation à l'employeur comme antagoniste par nature, car les intérêts <strong>des</strong><br />

<strong>salariés</strong> et <strong>des</strong> dirigeants sont différents. Porteur de l'intérêt collectif <strong>des</strong> <strong>salariés</strong>, leur mandat a pour objectif de réduire<br />

les déséquilibres de l'échange salaire – travail, qui est au désavantage <strong>des</strong> <strong>salariés</strong>. Ce sont les <strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong> les plus<br />

militants, les plus politiques – c'est-à-dire qui se référent à une conception du monde à l'opposé <strong>des</strong> inégalités qu'ils<br />

constatent - qui décrivent cette conception du mandat. On peut alors trouver dans leur parcours un élément déterminant :<br />

le sentiment d'avoir vécu <strong>des</strong> situations injustes en raison de leur appartenance aux couches les moins favorisées de la<br />

société.<br />

L’entreprise n’est pas toujours hostile à cette conception du rôle du représentant du personnel. Au contraire, les<br />

organisations les plus formalisées, où la gestion du personnel fait appel à <strong>des</strong> procédures et <strong>des</strong> outils standardisés, se<br />

satisfont bien de ce fonctionnement : elles y trouvent même leur compte puisqu'elles disposent d'un interlocuteur.<br />

La congruence entre conception du mandat et formes organisationnelles configure ainsi un cadre de jeu où les <strong>salariés</strong><br />

<strong>protégés</strong> peuvent accroître leur valeur sociale. <strong>Le</strong> droit définit en quelque sorte les règles du jeu et constitue en même<br />

temps une ressource pour objectiver les différentes positions, c'est-à-dire fixer les frontières <strong>des</strong> positions ainsi que les<br />

droits et devoirs de chacun, dotant les relations sociales d'une grande stabilité.<br />

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