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Le licenciement des salariés protégés (DE février 2006) (pdf - 1.1 Mo)

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III E PARTIE<br />

LE LICENCIEMENT ENTRE ARRANGEMENT ET SORTIE <strong>DE</strong><br />

CRISE<br />

Une fois la décision de l'inspecteur du travail rendue, deux perspectives s'ouvrent aux parties : la persistance (I) ou la fin<br />

du conflit (II).<br />

I- <strong>Le</strong> <strong>licenciement</strong> peut être vécu comme inéluctable ou avantageux<br />

Signalons tout d'abord que le volume <strong>des</strong> dossiers de demande de <strong>licenciement</strong>s constitués par les inspecteurs du travail<br />

est très fluctuant. Certains dossiers sont uniquement constitués de la demande de <strong>licenciement</strong> de l’entreprise et du refus<br />

(rare dans ce cas) ou de l'accord de l’inspecteur du travail. Cette épaisseur ne dit rien de la nature <strong>des</strong> relations entre<br />

<strong>salariés</strong> et l’entreprise. Par contre, elle indique clairement que le motif de <strong>licenciement</strong> apparaît indubitable pour les<br />

<strong>salariés</strong> ou, ce qui revient pratiquement au même, que ceux-ci se trouvent dans une telle position de faiblesse qu’ils sont<br />

dans l’incapacité d’argumenter.<br />

En effet, certains <strong>licenciement</strong>s ne donnent pas lieu à dispute car les raisons invoquées sont acceptées de part et d'autre.<br />

<strong>Le</strong> <strong>licenciement</strong> pour motif économique, notamment lorsqu’il est collectif, en est une illustration. Si, dans certains cas,<br />

le <strong>licenciement</strong>, n’est pas accepté de "gaieté de cœur", il apparaît aussi comme une réalité dont toutes les parties sont<br />

conscientes. La dégradation, depuis le milieu <strong>des</strong> années soixante-dix, du marché de l'emploi ainsi que les fermetures<br />

d'entreprise ont rendu cette réalité difficilement contournable.<br />

De ce fait, la protection accordée aux représentants du personnel doit être relativisée et mesurée à l’aune de l'évolution<br />

du marché du travail. En effet, dans une période de plein emploi, le <strong>licenciement</strong> apparaît comme une mesure<br />

exceptionnelle. Il peut alors avoir pour objectif de se débarrasser d'un gêneur ou se révéler peut être une mesure<br />

antisyndicale. À l’inverse, la banalisation du chômage donne un tout autre sens à la demande de <strong>licenciement</strong> d'un<br />

représentant du personnel : si tout le monde peut être licencié, pourquoi serait-il protégé ? L'acceptation du <strong>licenciement</strong><br />

économique va alors presque de soi.<br />

"C’était un motif économique, elle était d’accord pour reconnaître que l’entreprise allait très mal et les<br />

chiffres financiers, c’est elle-même qui me les avait fournis d’ailleurs. […] Mais en tout cas, elle ne<br />

contestait absolument pas la réalité du motif économique, et elle m’avait adressé un courrier où ces<br />

chiffres figuraient […] Il était donc difficile de nier la réalité <strong>des</strong> difficultés économiques de l’entreprise.<br />

[…] On voyait bien que l’activité de l’entreprise était un peu en péril. Là-<strong>des</strong>sus, le motif, par rapport aux<br />

critères de jurisprudence, était difficilement niable. Sur la réalité de la suppression de son poste, il n’y<br />

avait pas d’autres postes équivalents à celui qu’elle occupait dans l’entreprise.» (Inspecteur du travail)<br />

Dans ce cas précis, le <strong>licenciement</strong> apparaît comme une contrainte exogène que Reynaud (1989) oppose aux contraintes<br />

endogènes (qui résultent <strong>des</strong> volontés <strong>des</strong> parties qui se rencontrent dans l'accord) et qui s'impose aux parties<br />

indépendamment de leur volonté. <strong>Le</strong> <strong>licenciement</strong> devient alors, sous réserve que les <strong>salariés</strong> portent la même<br />

appréciation sur les difficultés économiques de l'entreprise, affaire de « pas de chance » ou, pour le dire autrement,<br />

comme un effet mécanique du fonctionnement du marché.<br />

Ce constat se vérifie d’autant plus dans les procédures de règlement judiciaire où le retrait <strong>des</strong> dirigeants de la gestion<br />

de l’entreprise, associé à l'intervention d'un administrateur, marque symboliquement ce glissement vers une gestion de<br />

« l’urgence économique » sur laquelle les dirigeants antérieurs n'ont que peu de prise. Corrélativement, la présentation<br />

que font les administrateurs de leur rôle apparaît circonscrite au champ de la technique juridique ou encore de<br />

l’intervention consensuelle.<br />

"Il faut quand même savoir que le liquidateur n’est pas forcément l’ennemi du salarié, bien au contraire, il<br />

hérite d’une situation[…] donc il n’y a pas de raison pour que ça se passe mal." (Administrateur<br />

judiciaire, PME)<br />

En outre, la relative objectivation <strong>des</strong> critères du <strong>licenciement</strong> conduit parfois le salarié licencié à appréhender son<br />

<strong>licenciement</strong> sous le seul angle technique, c’est-à-dire comme une procédure qui n'est pas dirigée contre lui ou dont il<br />

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