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Le licenciement des salariés protégés (DE février 2006) (pdf - 1.1 Mo)

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Une telle différence de traitement, parfois accentuée par la dualité contentieuse 1 , peut, si elle n’est pas clairement<br />

fondée sur l’existence d’un mandat qui la "légalise" tout en la légitimant, apparaître comme une source de<br />

discrimination à rebours. Il n’en demeure pas moins que le contexte social peut également jouer un rôle dans la prise de<br />

décision du Ministre, rendue sur recours hiérarchique. La décision ministérielle intègre parfois <strong>des</strong> éléments<br />

d’appréciation tels que la volonté de pacifier <strong>des</strong> relations sociales, auxquels sont moins sensibilisés les juges. Il se peut<br />

ainsi que les appréciations portées par le Ministre et par les juges divergent pour une même situation.<br />

B) <strong>Le</strong>s effets de ce mandat<br />

<strong>Le</strong> mandat confère à celui qui l’occupe certaines prérogatives (1) qui participent de la construction d’un statut social du<br />

salarié protégé (2). Ce faisant, le droit a institué une relation juridique duale : le salarié protégé se situe à la fois sous<br />

contrat et sous statut, lesquels obéissent à <strong>des</strong> logiques juridiques différentes (3).<br />

1) <strong>Le</strong> mandat confère certaines prérogatives au salarié protégé<br />

Ces prérogatives octroyées par les textes sont étendues : la représentation <strong>des</strong> <strong>salariés</strong> implique, selon l’esprit <strong>des</strong> lois, la<br />

mise à disposition de moyens <strong>des</strong>tinés à obtenir et/ou à diffuser l’information ou encore à transmettre <strong>des</strong> réclamations.<br />

<strong>Le</strong>s textes positionnent, alternativement ou cumulativement, le salarié protégé dans un rôle d’opposition et/ou de<br />

contestation et/ou de proposition (lire l’encadré). <strong>Le</strong> Code du travail 2 a même doté le délégué du personnel d’un droit<br />

d’alerter l’employeur de toute atteinte aux libertés, instituant une procédure contraignante. En effet, s’il constate luimême<br />

ou par le biais d’un salarié, qu’il existe une atteinte aux libertés individuelles qui ne trouve pas sa justification<br />

dans l’article L. 120-2 3 , le délégué du personnel doit saisir l’employeur qui est tenu de procéder sans délai à une<br />

enquête avec le délégué et de remédier à cette situation. En cas d’inaction de l’employeur ou de désaccord, le délégué<br />

saisit le Conseil de prud’hommes en référé, ce dernier pouvant ordonner toute mesure propre à faire cesser cette<br />

atteinte. Ce droit d’alerte n’est pas sans rappeler le droit d’alerte existant en cas de danger grave et imminent pour la<br />

sécurité physique <strong>des</strong> <strong>salariés</strong> et qui autorise le retrait du salarié de son poste de travail 4 .<br />

<strong>Le</strong> Code du travail offre aux <strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong> investis d’un mandat représentatif le pouvoir de "demander <strong>des</strong> comptes"<br />

à l’employeur sur sa gestion. C’est sur cet équilibre, ainsi que l’explique très justement Alain Supiot, que s’est bâti le<br />

droit du travail : "Dès lors que l’action <strong>des</strong> uns se trouve fondée par le droit de propriété et la liberté d’entreprendre,<br />

l’action <strong>des</strong> autres doit être garantie par un triple droit à la représentation, l’action et la négociation collective. C’est ce<br />

jeu de poids et de contrepoids entre action économique <strong>des</strong> entrepreneurs et action collective <strong>des</strong> <strong>salariés</strong> qui a constitué<br />

le véritable moteur du droit du travail et lui a permis tout à la fois de guider les transformations du monde du travail et<br />

d’être guidé par elles" 5 . C’est cette prise en compte de la nécessaire articulation entre <strong>des</strong> intérêts divergents visant la<br />

recherche d’un certain équilibre que traduit la Cour de cassation lorsqu’elle énonce que le pouvoir de direction dont<br />

dispose l’employeur, qui se traduit par le "droit d’organiser le travail dans son entreprise", doit se concilier avec<br />

d’autres impératifs 6 .<br />

1 Cf. Infra, IIIe partie sur l’issue de la procédure.<br />

En vertu du principe de la séparation <strong>des</strong> pouvoirs seuls les tribunaux de l’ordre administratif ont compétence pour statut sur la<br />

légalité d’une décision administrative, les tribunaux judiciaires intervenant alors dans le cadre de la réparation. <strong>Le</strong>s tribunaux<br />

judiciaires doivent ainsi surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la juridiction administrative (Cass. soc. 3 juillet 1985 - N°<br />

391). <strong>Le</strong>s juridictions judiciaires sont tenues, sur le fond, par les décisions de la juridiction administrative (Cass. Soc. 12 mars 1987 -<br />

N° 149). <strong>Le</strong> juge judiciaire ne peut, en l'état de l'autorisation administrative accordée à l'employeur de licencier les <strong>salariés</strong> <strong>protégés</strong><br />

et sans violer le principe de la séparation <strong>des</strong> pouvoirs, apprécier le caractère réel et sérieux du motif de <strong>licenciement</strong> y compris en ce<br />

qui concerne le respect de l'obligation de reclassement. Il lui appartient seulement de surseoir à statuer en renvoyant l'appréciation de<br />

légalité à la juridiction administrative (Cass. Soc. 25 novembre 1997 - N° 399).<br />

2 Art. L. 422-1-1.<br />

3 "Nul ne peut apporter aux droits <strong>des</strong> personnes et aux libertés individuelles et collectives de restrictions qui ne seraient pas justifiées<br />

par la nature de la tâche à accomplir ni proportionnées au but recherché". Article issu de la loi du 31 décembre 1992.<br />

4 Art. L. 213-9.<br />

5 Supiot (A), "Revisiter les droits d’action collective", Dr. Soc. 2001, p. 687 à 704, p. 687.<br />

6 Cass. Soc., 1 er avril 2003, N° de pourvoi : 00-41873, Bulletin 2003 V N° 125 p. 121 : "Mais attendu que si, en application de l'article<br />

L. 122-28-1 du Code du travail, tout salarié dispose du droit, sous certaines conditions, soit de bénéficier d'un congé parental<br />

d'éducation durant lequel le contrat de travail est suspendu, soit de réduire sa durée de travail d'au moins un cinquième de celle qui<br />

est applicable dans l'établissement sans que cette activité à temps partiel puisse être inférieure à seize heures hebdomadaires, la<br />

fixation de l'horaire de travail, à défaut d'accord <strong>des</strong> parties, relève du pouvoir de direction de l'employeur ; que néanmoins le refus<br />

du salarié d'accepter les horaires proposés n'est pas constitutif d'une faute grave dès lors que la proposition de l'employeur n'est pas<br />

compatible avec <strong>des</strong> obligations familiales impérieuses ;<br />

Et attendu que la cour d'appel a relevé, d'une part, qu'en l'absence d'accord, l'employeur avait fixé sans qu'il soit établi qu'il ait<br />

commis une faute dans l'exercice de son droit d'organiser le travail dans son entreprise, les horaires de travail de la salariée, et, d'autre<br />

part, que la salariée, qui s'est présentée à son travail un jour où elle devait être de repos tandis que le lendemain où elle aurait dû venir<br />

aussi bien selon son propre horaire qu'elle croyait devoir appliquer que selon celui demandé par l'employeur, et ne s'est pas présentée<br />

les jours suivants malgré la mise en demeure de l'employeur de reprendre le travail, n'apportait aucun élément permettant d'apprécier<br />

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