Passe Murailles n° 35 : Rester debout au trou - Webnode

# 35 MMARS/AVRIL 2012
dossier
GENEPI / Quelles relations entretenez-vous avec les
enfants des personnes détenues ?
Jeannette Favre / Les enfants sont accueillis dans les maisons
d’accueil des familles avec une attention toute particulière.
G / Vous arrive-t-il de les accompagner au parloir ? Comment
l’enfant garde-t-il le contact avec le parent incarcéré
quand le parent libre refuse de voir son conjoint
et/ou l’interdit à son enfant ?
JF / Pour l’enfant, lorsque le père est incarcéré (ce qui est
la situation la plus fréquente), la relation au père passe le
plus souvent par sa mère. Il dépend affectivement d’elle
lorsqu’il l’interroge au sujet de celui-ci et il dépend
concrètement d’elle pour lui rendre visite au parloir.
G / Vous permettez-vous parfois de conseiller un(e)
conjoint(e) de détenu(e) quant à la façon de maintenir au
mieux les liens entre le parent incarcéré et l’enfant ?
JV / Dans les accueils, il appartient aux accueillants d’être
à l’écoute de ces mères qui ont du mal à se situer à distance
de leur propre ressenti, de ces mères qui transmettent
parfois à leur enfant des représentations péjoratives
de la personne détenue. Il s’agira dans tous les cas d’attirer
leur attention sur la souffrance de l'enfant, sur l’intérêt
le plus souvent pour lui d’être en lien avec son père
lorsque les actes posés ne le concernent pas directement,
sur l’importance éventuellement d’un accompagnement
psychologique.
L’UFRAMA propose parmi ces formations un
stage sur site sur le thème « Accueillir et écouter l’enfant
autour de l’incarcération d’un parent ». Il est également
Avoir un parent en prison
Entretien avec Jeannette Favre,
présidente de l’UFRAMA 1
70
Par Claire vd Bogaard
« OOnn eessttiimmee eennttrree 7700 000000 eett 8800 000000 llee nnoommbbrree dd’’eennffaannttss qquuii oonntt uunn ppèèrree oouu uunn bbeeaauu--ppèèrree iinnccaarrccéérréé eenn
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« Plus de 95 % des personnes détenues sont des
hommes. Ce qui veut dire que pour la plupart des
enfants concernés par l’incarcération d'un proche, il
s’agit d’une “figure paternelle”, un père, un beau-père,
un grand frère ou un oncle, ou encore un grand-père. » 3
envisagé la création d’un nouveau stage sur l’accueil des
enfants lorsque l’association est amené à assurer la prise
en charge de l’enfant pendant le parloir.
G / Vous arrive-t-il d’accompagner les enfants au parloir ?
Comment gardent-ils le contact avec le parent incarcéré
quand le parent libre refuse de voir son conjoint et/ou
l’interdit à son enfant ?
JF / L’accompagnement des enfants au parloir tend à se
développer dans les lieux où il n’existe pas d’associations
spécialisées pour répondre à ce besoin. On compte
actuellement une trentaine d’associations de maisons
d’accueil qui assurent cet accompagnement. Une formation
spécifique est proposée par l’UFRAMA pour les
accueillants qui se sont spécialisés au sein des association
de maisons d’accueil pour cette mission particulière.
G / Le mieux selon vous est-il de dire la vérité à l’enfant ?
Quelles conséquences peuvent advenir d’un mensonge
(travail à l’étranger, maladie...) pour expliquer l’absence
du parent incarcéré ?
JF / L’incarcération représente pour les familles une situation
nouvelle, le plus souvent imprévue et toujours douloureuse,
à laquelle elles ne sont pas préparées. Elles sont
démunies pour aborder la question de l’incarcération
avec leurs enfants et sont amenées parfois à taire ou
transformer la réalité.
Que dire aux enfants du pourquoi de l’absence d’un de
leur parent ? Que dire de l’acte délictueux à l’origine de
l’incarcération ? Comment affronter le regard des autres ?
Beaucoup d’enfants ayant leur mère ou leur père
incarcéré vivent douloureusement le fait d’être privés de
la présence de leur parent. Cette douleur est d’autant plus
vive qu’en l’absence d’explications, elle est souvent
accompagnée de sentiment d’abandon, de culpabilité, de
honte. On sait, combien l’absence de mots peut être déstructurant
pour un enfant, quelles répercussions ces nondits
peuvent avoir sur son développement psychique, sa
confiance dans les adultes qui l’entourent, son bien-être,
la construction de son identité, son rapport à la loi.