03.06.2020 Views

UN FRANÇAIS EN LOUISIANE 1860-1862

Notes et observations d'un écrivain et géographe français pendant la guerre de Sécession en Louisiane

Notes et observations d'un écrivain et géographe français pendant la guerre de Sécession en Louisiane

SHOW MORE
SHOW LESS

Create successful ePaper yourself

Turn your PDF publications into a flip-book with our unique Google optimized e-Paper software.

5

de fouet. L’esclave noir est une chose et non pas un homme, et ceux qui le transportent

d’un endroit à un autre sont responsables de sa perte ou des accidents qui peuvent lui

arriver, comme ils le seraient de la perte ou des avaries d’un colis ou de toute autre

marchandise. La loi a décrété que les esclaves n’ont pas d’âme, elle a condamné à mort

leur intelligence et leur volonté, elle ne laisse vivre que leurs bras. Les esclaves n’ont pas

d’âme ! Tel est le principe qui donne naissance à tant de crimes, il est la source impure

de laquelle un torrent d’iniquités déborde à grands flots sur l’Amérique. Les droits des

esclaves, si cet auguste mot peut être profané pour des hommes qui n’ont pas la liberté,

se rapportent exclusivement à leur vie animale. Tout planteur est tenu de donner chaque

mois à son esclave une pinte de sel et un baril de maïs, ou bien l’équivalent en riz, haricots

ou autres grains. Chaque été, il doit délivrer, à chacun de ses Nègres, une chemise de toile

et une paire de pantalons. Au commencement de l’hiver, il donne des vêtements de

rechange et une couverture de laine.

Le Code Noir louisianais, calqué en grande partie sur celui

rédigé en 1685 pour les Antilles, est promu en 1724. Ses 55

articles qui réglementent le statut des esclaves et des Noirs libres,

ainsi que les relations entre maîtres et esclaves. Il prohibe par

exemple les mariages et les relations sexuelles entre Blancs et

Noirs - contrairement à l’Édit de 1685. Il détaille également les

châtiments corporels en cas de de vol ou de fuite, oblige les

planteurs à faire instruire leurs esclaves dans la religion

catholique, à leur fournir la nourriture et l’habillement, à les faire

chômer les dimanches et jours de fêtes, et à ne pas les maltraiter

de façon abusive, etc.

Comme dans les Antilles toutefois, le Code Noir est souvent

contourné. Les planteurs, avec la complicité passive des autorités

locales et de la justice royale, ne mettent en application le texte

que lorsqu’il leur convient. Ainsi, s’il n’y a guère de mariage

mixte en Louisiane, les concubinages entre Blancs et Africaines

se développent et donnent naissance à une petite population de

mulâtres ; les planteurs, contrevenant au Code, autorisent souvent

leurs esclaves à élever des volailles ou des cochons, à cultiver des

petits lopins individuels et même parfois à posséder des armes,

leur accordant de fait une relative liberté d’action ; certains

maîtres, sans être inquiétés par les autorités judiciaires, n’hésitent

pas non plus à faire preuve d’une sévérité extrême à l’encontre de

leurs esclaves.

Cette version du Code Noir de Louisiane de 1724, a été

publiée dans le troisième volume des Historical Collections of

Louisiana (1851) de French (Gallica.bnf.fr).

En page 21 du Code Noir qui est toujours en vigueur en Caroline du Sud, il serait

interdit aux planteur blancs de faire travailler leurs esclaves plus de quinze heures par

jour en été, et plus de quatorze en hiver. Le repos du dimanche ne peut être ravi aux Noirs,

sauf si les planteurs leur donnent 50 cents pour le travail de cette journée. Les maîtres

n’ont jamais à rendre aucun compte des coups de fouet qu’ils distribuent à leurs esclaves

ni des heures de travail auxquels ils les soumettent. Cependant en Caroline du Sud, le

Code Noir renferme la clause suivante :

« Toute personne qui, volontairement, coupera la langue à un esclave ou lui arrachera

l’œil, le châtrera, l’échaudera cruellement, le privera de l’usage d’une partie de son corps,

ou lui infligera une punition féroce autre que la peine du fouet, du nerf de bœuf, du bâton,

des fers, de la prison et du cachot, sera passible d’une amende pour chacun de ces délits. »

Cet État fixe cette amende à 61 dollars, quoiqu’elle puisse s’élever à 200 et même à

500 dollars en Louisiane. Cet article de loi offrirait au moins une garantie aux esclaves

africains si leur maître pouvait être accusé par ses victimes, mais les Noirs n’existent pas

devant la loi.

Hooray! Your file is uploaded and ready to be published.

Saved successfully!

Ooh no, something went wrong!