70La pose et d’utilisation d’un ponton pour le débarquement de l’arméede Sherman à Beaufort le 7 novembre 1861. (National Archives)Rassemblement de Noirs à Beaufort après l’installation de l’armée fédérale.(National Archives)
71Le 9 janvier 1861, le général Sherman ordonna à ses hommes de restituer un esclavequ’un planteur virginien, qui était resté fidèle à l’Union, prétendait lui appartenir.Heureusement que la majeure partie des planteurs de l’archipel s’étaient enfuis, laissantderrière eux des milliers d’Africains qui étaient devenus les maîtres des riches habitationsdont ils n’osaient naguère s’approcher qu’en tremblant. Plusieurs d’entre eux, fous dejoie, ivres de leur liberté d’un jour, toutefois secrètement épouvantés de leur audace,s’étaient installés dans ces palais et faisaient litière de tous les objets de luxe,incompréhensibles pour eux. D’autres, profitant plus noblement de leur soudaineémancipation, allaient à la recherche d’un ami, d’un frère ou bien de la femme et desenfants dont ils avaient jadis été séparés, et qui habitaient des plantations éloignées. Enfin,un certain nombre de Noirs, livrés en proie à une folle épouvante, ne songeaient qu’àéchapper à ces hommes du Nord, qu’on leur avait dépeints sous des couleurs si atroces,et qu’ils craignaient presque autant que leurs anciens maîtres. En apercevant de loin lessoldats fédéraux, ils couraient se réfugier dans les champs de cotonniers, dans lesbosquets ou bien dans les bayous marécageux. Plusieurs centaines de Nègres allèrentmême chercher asile dans les îlots de l’archipel, et ne se décidèrent à rentrer sur lesplantations que rassurés par leurs amis ou poussés par la faim.Il est à croire que la plupart des Nègres de Beaufort, même ceux qui s’étaient livrés àune joie délirante en voyant leurs maîtres s’enfuir, n’osaient pas encore se flatter d’êtredevenus libres. Comme des enfants échappés de l’école, ils profitaient de l’absence deséconomes, et jouissaient de leur liberté inattendue avec une frénésie d’autant plus sauvagequ’ils y voyaient un simple répit à leur longue servitude. Du reste, la routine ordinaire deleur vie fut à peine troublée par quelques jours d’effervescence. L’intendant noir, naguèrenommé par le planteur lui-même, avait encore gardé les clés du grenier et du magasin.C’était lui qui distribuait les rations quotidiennes de maïs et dirigeait les travauxaccomplis en commun. Seulement il avait déposé le fouet, cet insigne distinctif de sonancien pouvoir, et ne s’imposait plus à ses compagnons que par le prestige d’autoritéattaché à ses fonctions. On le voit, la servitude avait produit ses conséquences ordinaires,elle avait si bien tué la dignité dans l’âme des esclaves, que les malheureux, délivrés deleurs maîtres, obéissaient encore aux hommes qui, il y a peu de temps encore, étaientchargés de les fouetter !Telle est l’influence démoralisante de la captivité, telle est aussi la défiance naturellede l’esclave, qui incitaient de nombreux Nègres des champs à répondre d’une manièreévasive lorsqu’on leur demandait s’ils préféraient la liberté ou la continuation del’esclavage. Pauvres gens abrutis, qui comprenaient à peine le sens du mot liberté qu’onn’avait jamais prononcé devant eux, si ce n’est pour en flétrir les Noirs affranchis, ilsrépondaient que le Blanc pouvait disposer de leur sort à sa guise, mais que s’ils tombaiententre les mains d’un bon maître, ils ne tiendraient pas à être libres. D’autresaccepteraient volontiers la liberté, mais assortie d’un protecteur blanc. Quand ondemandait s’ils combattraient pour repousser une attaque de leurs anciens maîtres, cesesclaves répliquaient en frissonnant que le Noir, si longtemps traité comme un chien,n’oserait pas résister au Blanc, et s’enfuirait devant lui.Sentant par instinct que leur scolarisation serait la véritable initiation à leur liberté, cesNoirs nés dans l’esclavage n’exprimaient avec énergie d’autre désir que celuid’apprendre, et ne réclamaient pas même la possession de leur propre corps. Biendifférents des Africains assignés aux travaux des champs, que la tâche monotone etpénible des plantations avait généralement transformés en véritables machines, lesesclaves accoutumés à un travail plus intellectuel et plus indépendant, notamment lespilotes, les charpentiers, les forgerons, parlaient un tout autre langage et réclamaienthardiment la liberté.
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