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-Tu m’as compris ! Tu sais que je me saigne pour payer ta pension<br />
alimentaire et <strong>le</strong> divorce m’a coûté <strong>le</strong>s yeux de la tête. Tu n’vas quand<br />
même pas me lâcher au moment où j’ai <strong>le</strong> plus besoin de toi, non ?<br />
-Mais c’est une offre extraordinaire, une possibilité de pratiquer<br />
l’anglais…<br />
-Je ne te demande que de m’aider, Raphaël. Tu ne peux pas me refuser<br />
ton aide quand même ? C’est seu<strong>le</strong>ment pour quinze jours.<br />
-J’ai travaillé tout l’été à l’atelier, gémit l’ado<strong>le</strong>scent. Je n’ai jamais pris<br />
de vacances.<br />
-L’été, c’est fini ! Maintenant, ce sont <strong>le</strong>s vacances de Noël. Tu feras<br />
bien de ne pas me fausser compagnie. Tu sais ce que ça te coûtera !<br />
-Ce n’est pas ma faute si <strong>le</strong> tonton d’Afrique veut nous voir. Tonton<br />
Pedro dit qu’il y a peut- être un héritage.<br />
-Peut-être ? Grogne Félix Jadot. Et ici, à l’atelier, pour qui crois-tu que<br />
je travail<strong>le</strong> ? Dis-moi ?…<br />
-Pour…<br />
-C’est pour toi tout ça ! C’est ça ton héritage, ton futur. Qu’est-ce que tu<br />
vas al<strong>le</strong>r chercher en Afrique ? Des maladies… Moi, ici je te prépare ton<br />
avenir. Si ce n’était que pour moi, y’a longtemps que j’aurais tout vendu.<br />
-Qu’est-ce que je vais <strong>le</strong>ur dire…<br />
-Je m’en fou ! Tout ce qui compte est que tu sois à l’atelier comme<br />
d’habitude, <strong>le</strong> premier jour de tes congés »<br />
Raphaël a <strong>le</strong>s larmes aux yeux. Il sait que c’est peine perdue.<br />
Sa mère saisit <strong>le</strong> téléphone.<br />
« Raphaël, veux-tu al<strong>le</strong>r dans ta chambre. Je vais par<strong>le</strong>r à ton père»<br />
Le jeune garçon s’éloigne.<br />
« Alors, comme ça, tu ne lui offres même pas cette opportunité à ton<br />
fils ? Tu veux que je te rapporte à la brigade ?<br />
-Essaie toujours ! J’ai encore mes fusils. Tu fais ça et je t’éclate la<br />
marmite.<br />
-Tu ne pourrais pas être généreux avec ton fils, pour une fois? On dirait<br />
que tu ne l’aimes pas.<br />
-Bien sur que je l’aime, ce galopin ! C’est pour son bien que je <strong>le</strong> fais<br />
travail<strong>le</strong>r. Au moins, lui, il ne sera par comme tous ces fils d’enfoirés, ces<br />
pourris qui traînent la savate et ne savent rien faire.<br />
-Il étudie très fort pendant toute l’année scolaire !<br />
-Je <strong>le</strong> sais. Crois-moi, je suis fier qu’il soit <strong>le</strong> premier de sa classe.<br />
-Et malgré ça tu n’es pas prêt à lui accorder cette récompense?<br />
-Je n’en ai pas <strong>le</strong>s moyens.<br />
-Tu exploites ton fils. Un jour, tu <strong>le</strong> perdras.<br />
-Il me remerciera de l’avoir fait travail<strong>le</strong>r»<br />
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