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-On pourrait quand même demander <strong>le</strong>ur aide. Tonton Hector n’a qu’à<br />
<strong>le</strong>ver son petit doigt pour te pistonner, lui qui a un poste é<strong>le</strong>vé à<br />
l’administration.<br />
-Je ne veux pas de sa charité. Et puis, il ne <strong>le</strong> fera jamais, mon chéri. Ni<br />
pour moi, ni pour toi»<br />
Raphaël passe en revue menta<strong>le</strong>ment <strong>le</strong>s membres de sa famil<strong>le</strong><br />
maternel<strong>le</strong>. Tout d’abord il y avait <strong>le</strong> grand-père, Léon Dutoit, qui suce<br />
<strong>le</strong>s pissenlits par la racine depuis cinq ans. Sa femme, la grand-mère<br />
acariâtre Maggy Pevard Dutoit avec laquel<strong>le</strong> il eut trois fil<strong>le</strong>s : Adè<strong>le</strong>,<br />
épouse d’Hector Lemaître, directeur des Impôts et géniteurs de ses<br />
cousins Gonzague et Cédric. Puis Louise, épouse de Pedro Sanchez,<br />
argentin d’origine et roi du tango sur <strong>le</strong>s premières côtes du bordelais. Ils<br />
ont deux enfants : Sandrine et Olivier. Enfin, en tout dernier à tous <strong>le</strong>s<br />
niveaux selon <strong>le</strong>s perceptions familia<strong>le</strong>s, sa mère, Martine, divorcée de<br />
Félix Jadot, imprimeur, ce père qui abuse terrib<strong>le</strong>ment de son fils<br />
ado<strong>le</strong>scent.<br />
Mais selon la grand-mère acrimonieuse, il y eu aussi une brebis ga<strong>le</strong>use<br />
dans la famil<strong>le</strong> : <strong>le</strong> fils du premier mariage de Léon Dutoit, donc un<br />
demi-frère d’Adè<strong>le</strong>, Louise et Martine. Il s’est enfui de chez lui très<br />
jeune, d’un coup de tête. Parti vers <strong>le</strong>s colonies à ce qu’il paraît. On ne l’a<br />
plus jamais revu. On <strong>le</strong> croit mort, dévoré par <strong>le</strong>s canniba<strong>le</strong>s ou <strong>le</strong>s<br />
crocodi<strong>le</strong>s du Congo.<br />
Raphaël joue distraitement avec une bouc<strong>le</strong> des cheveux de sa mère. Il<br />
poursuit sa réf<strong>le</strong>xion alors que sa mère se morfond sur <strong>le</strong>ur sort. Martine<br />
est cependant fière de son fils. El<strong>le</strong> sait très bien que Raphaël se distingue<br />
des ado<strong>le</strong>scents de son âge par une curiosité inassouvie, une envie de<br />
découvrir, d’apprendre par l’expérience tout autant que par <strong>le</strong>s <strong>livre</strong>s. Il<br />
est éga<strong>le</strong>ment pourvu d’une persistance a toute épreuve. A l’age de dix<br />
ans, il écrivait déjà aux ambassades, pour <strong>le</strong>ur demander des brochures<br />
sur <strong>le</strong>urs pays en prétendant être un adulte curieux de découvrir <strong>le</strong> monde.<br />
Il en avait reçu des dizaines.<br />
« Tu connais bien tes cousins, Raphaël, lui dit-el<strong>le</strong>. Ils ne manquent<br />
jamais l’occasion de te traiter comme une paillasse. Tes onc<strong>le</strong>s et tantes<br />
ont réussi. Ils se regorgent de <strong>le</strong>urs succès. Il n’y en a que pour eux. Tout<br />
<strong>le</strong>ur réussit et moi… Regarde un peu où on vit !<br />
-Ils pourraient t’aider quand même, murmure Raphaël.<br />
-Tes onc<strong>le</strong>s Hector et Pedro n’arrêtent pas de s’engueu<strong>le</strong>r chaque fois<br />
qu’ils se rencontrent. La solidarité n’existe chez aucun d’eux. Mes sœurs<br />
ne font pas mieux. Chacune tire la couverture de son coté et ta grandmère<br />
aime voir la famil<strong>le</strong> s’entre-déchirer.<br />
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