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-C’est ça, tu y arrives. C’est <strong>le</strong> grand si<strong>le</strong>nce du Karoo. La paix, la<br />
quiétude des grands espaces. Un air pur, loin des vil<strong>le</strong>s et du stress. Ça<br />
n’a aucune va<strong>le</strong>ur marchande, ça mon grand. Tu peux ajouter quelques<br />
zéros à mon prix et je ne vends pas. Pour moi, c’est sublime.<br />
-Pour moi, ça me donne la chiasse, ce si<strong>le</strong>nce, répond Cédric.<br />
-Tu es trop habitué au bruit et à la pollution. Sais-tu ce que veut dire<br />
Karoo en langue bochiman ? C’est « la terre qui n’en finit pas », <strong>le</strong>s<br />
horizons infinis, la terre qui court jusqu’au bout du monde, <strong>le</strong> grand vide,<br />
la source de toute inspiration. Voilà ce qui m’attire dans ces lieux. Ici,<br />
rien ne me distrait. J’y rencontre l’éternité, chaque jour.<br />
-N’empêche que ça me donne la chiasse . . .Et j’ai pas envie d’avoir la<br />
chiasse pour l’éternité !<br />
-Quel âge as-tu ?<br />
-Vingt trois !<br />
-Tu ne connais rien à la vie.<br />
-… ! »<br />
Marc tape <strong>le</strong> culot de sa pipe contre la semel<strong>le</strong> de sa bottine et reste un<br />
moment si<strong>le</strong>ncieux. Son regard se perd vers la voûte cé<strong>le</strong>ste. Il poursuit :<br />
« Il n’est pas d’ignorance plus grave que <strong>le</strong> refus de reconnaître <strong>le</strong><br />
merveil<strong>le</strong>ux de la nature dans toutes ses manifestations anima<strong>le</strong>s ou<br />
végéta<strong>le</strong>s et l’inouïe comp<strong>le</strong>xité du mystère de la vie. Cette ignorance<br />
restera toujours <strong>le</strong> plus grand danger à la survie de l’espèce humaine.<br />
Certainement bien plus grand danger que <strong>le</strong>s météores, <strong>le</strong>s tsunamis ou<br />
<strong>le</strong>s extra terrestres!<br />
-Moi j’ai déjà bien vécu, annonce Gonzague. Je connais la vie…<br />
-Quel<strong>le</strong> effroyab<strong>le</strong> prétention! Dans quelques décennies tu te<br />
réveil<strong>le</strong>ras peut-être de ton ignorance.<br />
-Ca t’arrive jamais de te sentir seul? Demande Olivier.<br />
-Oui, bien sur que ça m’arrive.<br />
-Alors qu’est ce que tu fais ? Tu allumes la télé ou tu vas danser au<br />
village ? Demande Cédric.<br />
-Et bien détrompez vous. Ni l’un, ni l’autre. Je prends des provisions,<br />
mon fusil et mon sac de couchage et je pars en moto <strong>le</strong> plus loin<br />
possib<strong>le</strong> dans <strong>le</strong> Karoo.<br />
-Encore plus désolé qu’ici ?<br />
-Oui, dans <strong>le</strong> coin <strong>le</strong> plus désertique que je puisse trouver….<br />
-Ce gars est complètement barjot! Bafouil<strong>le</strong> Gonzague.<br />
-Alors, comme ça tu guéris la solitude par encore plus de solitude ?<br />
Demande Raphaël.<br />
-Exact ! C’est la meil<strong>le</strong>ure approche. Si tu cherches des amusements<br />
factices, tu ne fais que repousser ta solitude pour quelque temps. Alors<br />
qu’en t’isolant davantage tu te guéris complètement de la solitude.<br />
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