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titre concret, et en faire la preuve, et que le fardeau de la preuve tendant<br />

à renverser cette présomption s’impose au verus dominus revendiquant.<br />

La première règle, complétée par les autres dispositions de<br />

l’article 2279, s’applique à des cas où un verus dominus s’est dessaisi<br />

volontairement ou involontairement d’un bien meuble corporel individualisé,<br />

qui se retrouve dans les mains d’un tiers, possesseur de bonne<br />

ou de mauvaise foi, selon les cas. La seconde s’applique à un conflit entre<br />

possesseur antérieur et possesseur actuel du bien — ou des ayants<br />

cause de ceux-ci — une revendication étant dirigée contre le possesseur<br />

actuel. Dans ce cas, peu importe la bonne ou la mauvaise foi du possesseur<br />

— ce dernier sait de toute façon qu’il a acquis le bien auprès de son<br />

verus dominus — mais importent en revanche les caractères de la possession<br />

qui doivent être réunis pour que celle-ci soit pleine et complète<br />

(« utile »), le fardeau de la preuve d’un éventuel vice de la possession<br />

(ou d’une absence de celle-ci, le défendeur n’étant qu’un détenteur), ou<br />

d’une éventuelle cause de restitution, incombant au revendiquant, de<br />

sorte que le possesseur actuel est à nouveau protégé par la présomption.<br />

Ce qui est remarquable, c’est qu’il semble que les auteurs du Code civil<br />

aient eu essentiellement à l’esprit la règle de fond, lorsqu’ils ont élaboré<br />

l’article 2279, alinéa 1er (8), tiré d’un adage de l’ancien droit, en ayant<br />

quelque peu perdu de vue la règle de preuve (9), qui devait toutefois demeurer<br />

pertinente et était même, semble-t-il, plus ancienne que la règle<br />

de fond. Les auteurs, au XIXe siècle, firent donc réapparaître la règle de<br />

preuve (10), en donnant de l’article 2279, alinéa 1 er , une lecture tout à<br />

fait complète, alors que telle n’avait pas été la volonté expresse de ceux<br />

qui écrivirent le Code. Mais rien dans la volonté de ces derniers et dans<br />

le texte de l’article 2279, ne s’opposait à une telle lecture et n’empêchait<br />

la réémergence de la règle de preuve. Il suffisait d’ajouter que la<br />

(8) Cf. d’ailleurs la suite de l’article qui porte sur le cas du dessaisissement involontaire,<br />

et l’article 2280.<br />

(9) Cf. exposé des motifs par M. Bigot Préameneu, in Fenet, ouvrage cité, t. 15,<br />

spéc. p. 600; et discussion devant le Conseil d’Etat, plus précisément discours<br />

prononcé par le tribun Goupil-Préfeln, spéc. p. 609.<br />

J.T. n° 6132 - 12/2004<br />

Larcier - © Groupe Larcier s.a.<br />

aopsomer@gbl.be / Groupe Bruxelles Lambert / aopsomer@gbl.be<br />

possession vaut « présomption » de titre, pour donner sens à cette<br />

deuxième règle également lue à l’article 2279, alinéa 1 er .<br />

Restait à la jurisprudence, sous le contrôle bienveillant et parfois à juste<br />

titre critique de la doctrine, de faire bonne application aux cas litigieux<br />

des deux règles de l’article 2279. La Cour de cassation a notamment<br />

rendu de nombreux arrêts sur la question, essentiellement en ce qui concerne<br />

la règle de preuve (11).<br />

7. — Le lecteur voudra enfin se reporter aux commentaires des dispositions<br />

du Code concernant la prescription, pour voir si le même constat<br />

de pertinence que celui que nous venons de dresser pour la possession,<br />

s’applique en ce qui les concerne.<br />

8. — Au total, nous ne changerions rien au Code en matière de possession,<br />

si ce n’est peut-être la définition du concept et le titre du titre contenant<br />

son régime. Ces deux corrections ne sont pas indispensables et ne<br />

justifient pas, à elles seules, une réforme législative. Elles pourraient<br />

simplement prendre place dans une réforme sur d’autres points, dont le<br />

bilan se trouvant dans le présent numéro du J.T., ferait peut-être apparaître<br />

l’opportunité. Ayons toutefois à l’esprit qu’il faudrait y procéder<br />

avec l’économie et la pertinence d’approche qui a été celle des auteurs<br />

du Code : c’est-à-dire aller à l’essentiel, sans expression de norme superflue<br />

et en gardant, ou en tentant de retrouver, l’élégance de plume qui<br />

fut celle des grands jurisconsultes du Code Napoléon.<br />

Jean-François ROMAIN<br />

Chargé de cours à l’U.L.B.<br />

Avocat au barreau de Bruxelles<br />

(10) Pour un historique de l’article 2279 du Code civil, cf. C. Renard et<br />

J. Hansenne, « Possession », in Rép. not., t. II, l. XII, mis à jour au 1 er septembre<br />

1987 par J. Hansenne, plus précisément n o 129, p. 102.<br />

(11) Pour une analyse détaillée de cette jurisprudence, cf. cours de droits réels<br />

du soussigné, P.U.B., 2 e éd., 2003, pp. 242 à 260.<br />

2004<br />

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