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2004<br />

344<br />

Et comme une lectrice assidue a le tort de lui répondre : ... si je vous ai bien<br />

compris, le centième anniversaire du Code a été célébré un an trop tard » Edmond<br />

Picard lui répond un peu cavalièrement... « Eh bien, lectrice que<br />

j’aime à supposer belle, comptez sur vos doigts fuselés et charmants.<br />

» Le Code est promulgué le 21 mars 1804. La date de sa naissance revient<br />

pour la première fois, le 21 mars 1805, pour la deuxième fois le<br />

21 mars 1806, etc., pour la dixième fois le 21 mars 1814, ... pour la centième<br />

fois le 21 mars 1904! Voilà le centième anniversaire!<br />

» C’est long ce petit travail, mais pas plus embêtant que de tricoter.<br />

Quant au XIX e siècle, il accomplissait le dernier jour de ses cent ans le<br />

31 décembre 1900 et le XX e siècle son premier jour le 1 er janvier 1901.<br />

» Une année a 365 jours mais une date de naissance n’en a qu’un. Sur<br />

ce, bonsoir! »?<br />

Le Code a-t-il été abrogé, en Belgique, en 1831<br />

Un problème plus ardu a été soulevé par un autre « lecteur assidu ».<br />

« Pourquoi » — interroge jonkheer F. Bol du barreau d’Amsterdam —<br />

«le J.T. fait-il tant de tapage autour du centenaire d’un code obsolète en<br />

Belgique? ». Et de démontrer avec des arguments qui en déroutent plus<br />

d’un, qu’il ne serait plus en vigueur depuis le 1 er février 1831! On imagine<br />

le tremblement de droit si la Cour suprême en venait à partager ce<br />

point de vue! Cette lettre entraîne une polémique endiablée avec pas<br />

moins de dix échanges, parfois très vifs, surtout de la part de<br />

M e Witteman du barreau d’Anvers. Les arguments de l’illustre praticien<br />

batave — que le J.T. prend fort au sérieux — peuvent se résumer ainsi :<br />

1) la loi (des Pays-Bas) du 16 mai 1829 abroge les Codes Napoléon et<br />

les arrêtés et règlements y relatifs à partir de la mise en exécution des<br />

codes nationaux;<br />

2) les arrêtés des 5 juillet et 3 septembre 1830 ont fixés au 1 er février<br />

1831 la date d’entrée en vigueur des nouveaux codes; la « regrettable<br />

révolution » — comme la nomme jonkheer Bol — a débuté le 25 août;<br />

3) l’arrêté du gouvernement provisoire belge du 14 janvier 1831 stipulant<br />

« que les arrêtés du précédent gouvernement en date des 16 mai<br />

1829 (il s’agit d’une loi!) et du 5 juillet 1830 sont et demeurent<br />

révoqués » serait dépourvu de légalité pour la raison que depuis le<br />

11 novembre 1830, date à laquelle il l’a remis au Congrès national, il ne<br />

dispose plus du pouvoir législatif;<br />

4) la proposition de loi du 1 er février 1831, visant à ratifier et confirmer<br />

l’arrêté du gouvernement provisoire du 14 juillet 1831 que M. van<br />

Snick, membre du Congrès national, a déposée « pour prévenir les procès<br />

nombreux que fera naître le problème de la constitutionnalité de<br />

l’arrêté du gouvernement provisoire » a été rejetée et n’a jamais été reprise<br />

par aucune assemblée législative belge.<br />

M e Wittman entend, quant à lui, tirer argument des articles 138 et 139,<br />

11 o , de la Constitution belge entrée en vigueur le 25 février 1831. Le premier<br />

stipule qu’à dater de l’entrée en vigueur de la Constitution toutes les<br />

lois, décrets, arrêtés, règlements et autres actes qui y sont contraires sont<br />

abrogés. Le second déclare qu’il « est nécessaire de pourvoir par des lois<br />

séparées et dans le délais le plus court, à la révision des Codes ».<br />

Jonkheer Bol répond que la première disposition peut, sans doute,<br />

s’appliquer à des dispositions particulières mais qu’il voit mal que toutes<br />

les dispositions des codes hollandais seraient contraires à la Constitution<br />

belge. Quant au second, il n’a pas été exécuté.<br />

M e Wittman réplique mais ne convainc pas la rédaction du J.T. qui reste<br />

à ce point perturbée par les arguments de jonkheer Bol qu’elle interroge<br />

un jurisconsulte spécialisé en la matière. Lequel? Je l’ignore, mais cet<br />

anonyme conclut la diatribe en déclarant que le Code Napoléon n’a pas<br />

été abrogé en Belgique.<br />

Son argumentation est brève et péremptoire : après avoir rappelé que le<br />

Code Napoléon a été abrogé par la loi (hollandaise) du 10 mars 1829 et<br />

l’arrêté royal (hollandais) du 5 juillet 1830 et que le gouvernement provisoire<br />

(belge) a cru pouvoir, par arrêté du 14 janvier 1831 abroger les<br />

J.T. n° 6132 - 12/2004<br />

Larcier - © Groupe Larcier s.a.<br />

aopsomer@gbl.be / Groupe Bruxelles Lambert / aopsomer@gbl.be<br />

deux dispositions hollandaises, il conclut que si le gouvernement provisoire<br />

ne pouvait plus, à cette date, abroger la loi de 1829 (puisqu’il ne<br />

disposait plus du pouvoir législatif) il pouvait parfaitement abroger l’arrêté<br />

du 5 juillet 1830, mettant en vigueur les Codes, compte tenu du fait<br />

qu’il disposait toujours du pouvoir exécutif.<br />

Interdiction d’évoquer le nom de Napoléon<br />

dans la république de M. Loubert<br />

Fin octobre 1903 le gouvernement français a organisé trois jours de festivités<br />

pour célébrer le centenaire du Code civil. Réunion de travail à la<br />

Faculté de droit suivie d’une réception à l’hôtel de ville; séance d’apparat<br />

à la Sorbonne et dîner au palais d’Orsay et enfin réception et banquet<br />

au ministère de la Justice. Il s’agissait — il est utile de le préciser — du<br />

centenaire du Code civil des Français et non du Code Napoléon. La République<br />

ne peut glorifier l’empereur. Le nom de Napoléon est mal en<br />

cour tout comme celui de Dieu dans la France d’Emile Loubet. Les deux<br />

gouvernements de « défense républicaine » de Waldek-Rousseau et<br />

Combes ne sont pas commodes avec les récalcitrants.<br />

Les orateurs, tant les étrangers que les nationaux, se vont vu interdire l’emploi<br />

du nom Napoléon pour désigner le Code. Parmi les Belges on trouve<br />

Edmond Picard, son ancien patron de stage Jules Lejeune et son stagiaire<br />

et disciple Hennebicq. On connaît le caractère porc-épic de Picard. Dès la<br />

première manifestation à la Faculté de droit, il s’élève, impertinent, goguenard,<br />

provoquant, contre cette tentative mesquine et surnoise de débaptiser<br />

un code qui pas plus qu’une constellation ne peut l’être. On applaudit avec<br />

enthousiasme. Cette intervention était volontaire. Il est satisfait. On lui fait<br />

comprendre qu’il doit aussi songer à ses hôtes. Il en convient. Mais, à l’hôtel<br />

de ville, on lui demande de remercier la municipalité au nom des étrangers.<br />

Il le fait bien volontiers — comme on s’en doute! — et dans le feu de<br />

l’improvisation le mot épouvantail, le mot proscrit revient tout naturellement<br />

et plus d’une fois. Si le public applaudit longuement, le vice-président<br />

du conseil municipal, le préfet de la Seine et le préfet de police restent cette<br />

fois, de marbre. C’est qu’il existe encore un prétendant.<br />

Le petit-fils de Jérôme, le prince Victor qui attendra le décès de Léopold<br />

II avant de pouvoir épouser Clémentine de Belgique. Et il se manifeste le<br />

prince Victor. A la sortie de la Sorbonne, des camelots distribuent un écrit<br />

en criant « la lettre du prince Victor ». Lettre très digne au demeurant et<br />

expliquant, en peu de mots, que si le nom de Napoléon a pu être effacé du<br />

Code, celui-ci n’en demeure pas moins l’œuvre du premier consul.<br />

Le Code n’est pas celui des femmes<br />

Si aucune d’elles ne s’en explique en participant aux célébrations (mes<br />

recherches à ce sujet, tant en France qu’en Belgique, sont restées<br />

vaines) elles font connaître leur réprobation à Paris, par affiches, confettis,<br />

coups de gueule et ballons rouges. Les affiches sont placardées<br />

dans le périmètre des locaux choisis pour la célébration. En noir sur<br />

fond bleu on pouvait lire : « Le Code écrase la femme. Nous protestons<br />

contre cette glorification. Les Français et les Françaises égaux devant<br />

l’impôt devraient l’être devant la loi ».<br />

En cortège, avec des ciseaux et des textes du Code, des femmes gagnent<br />

le Panthéon. A défaut de pouvoir pénétrer jusqu’au mausolée et accéder<br />

à la colonne représentant le Code, elles se rendent dans la cour d’honneur<br />

face à une autre colonne supportant la statue de Napoléon regardant<br />

avec mélancolie son tombeau et là, tout simplement, elles déchiquettent<br />

ses codes, en font des confettis et les lancent à ses pieds.<br />

Impavides, elles s’invitent ensuite à la séance d’apparat avec de curieux<br />

petits paquets rouges et au moment où le garde des sceaux M. Vallé allait<br />

achever sa péroraison... « nous » héritiers légitimes des auteurs du<br />

Code civil et les continuateurs de leur œuvre, ... une femme crie : « à bas<br />

le Code Napoléon, il déshonore la République », tandis que s’élèvent<br />

tant bien que mal des petits ballons rouges portant une inscription identique<br />

au cri de la femme. Brouhahas. Rires. La musique du 22e de ligne

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