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a le pouvoir d’ « imposer les conditions qu’il estime justes et<br />

raisonnables » (1927, C.c.Q.).<br />

La rédaction d’un code bilingue dont les deux versions, française et anglaise,<br />

ont valeur officielle, présente des problèmes particuliers. La difficulté<br />

d’harmoniser les deux versions demeure un objectif recherché,<br />

encore que la rédaction d’un Code par différentes équipes de juristes<br />

rend parfois l’exercice complexe. Des discordances entre les deux versions<br />

du Code qui avaient été identifiées par des chercheurs ont récemment<br />

été corrigées par le législateur (39).<br />

III. — LES GRANDES ORIENTATIONS<br />

DU NOUVEAU CODE CIVIL<br />

Au terme du processus de révision du Code civil, il est indéniable que<br />

le droit civil québécois n’a plus la configuration qui était la sienne sous<br />

le Code précédent. Une présentation des grandes orientations du nouveau<br />

droit civil permettra d’en saisir les caractéristiques principales. A<br />

plusieurs égards, le Code civil se situe dans le prolongement du droit exposé<br />

dans le Code civil du Bas-Canada. Il amène cependant des changements<br />

qui tiennent compte de l’évolution sociale et économique de la<br />

société québécoise. Il s’inscrit donc dans la continuité, tout en marquant<br />

des ruptures par rapport au droit antérieur.<br />

1. — L’expression du droit commun<br />

L’éparpillement de matières relevant du droit civil dans des lois particulières<br />

incita le législateur à intégrer plusieurs de ces textes dans le Code.<br />

Cet effort de consolidation fut accompagné d’une volonté manifeste<br />

d’accorder une place centrale au Code comme expression du droit commun.<br />

Afin de parvenir à cette finalité, il fut décidé d’exprimer ce dessein<br />

en l’inscrivant dans une disposition préliminaire. Le texte précise,<br />

en outre, que le Code, dans les matières qu’il régit doit agir en harmonie<br />

avec les grands principes qui gouvernent l’ordre juridique :<br />

« Le Code civil du Québec régit, en harmonie avec la Charte des droits<br />

et libertés de la personne et les principes généraux du droit, les personnes,<br />

les rapports entre les personnes, ainsi que les biens.<br />

» Le Code est constitué d’un ensemble de règles qui, en toutes matières<br />

auxquelles se rapportent la lettre, l’esprit ou l’objet de ses dispositions,<br />

établit, en termes exprès ou de façon implicite, le droit commun. En ces<br />

matières, il constitue le fondement des autres lois qui peuvent ellesmêmes<br />

ajouter au Code ou y déroger ».<br />

D’abord vue avec suspicion, cette disposition préliminaire fut défendue<br />

par ses rédacteurs au nom de l’illustration du droit civil dans un environnement<br />

où domine la common law (40). La doctrine et la jurisprudence<br />

ont souvent eu l’occasion depuis la mise en vigueur du Code de<br />

commenter et d’interpréter cette disposition. Elle a fait prendre conscience<br />

aux juristes que le Code exprime bel et bien le droit commun<br />

(41); on va même jusqu’à proclamer que le Code civil constitue la<br />

« pierre angulaire » du droit québécois (42) ou « la loi fondamentale du<br />

(39) Loi modifiant le Code civil, L.Q. 2002, c. 19, art. 15. Sur l’inventaire des<br />

discordances, voy., Jean-Maurice Brisson et Nicholas Kasirer (dir.), Code civil<br />

du Québec. Édition critique / Civil Code of Québec. A Critical Edition, 2002-<br />

2003, 10 e éd., Cowansville, éditions Yvon Blais, 2001, xvi-xxi.<br />

(40) Alain-François Bisson, « La disposition préliminaire du Code civil du<br />

Québec », (1999) 44, Rev. droit de McGill 539, 551.<br />

(41) Doré c. Ville de Verdun, [1997] 2 R.C.S. 862, 874 (le juge Gonthier).<br />

(42) Communauté urbaine de Montréal c. Syndicat des fonctionnaires municipaux<br />

de Montréal - section locale 429, Cour supérieure (district de Montréal),<br />

n o 500-05-046573-984, le 12 mai 1999, [1999] J.Q., n o 1585, § 23 (en ligne :<br />

disponible sur le site de Quicklaw).<br />

J.T. n° 6132 - 12/2004<br />

Larcier - © Groupe Larcier s.a.<br />

aopsomer@gbl.be / Groupe Bruxelles Lambert / aopsomer@gbl.be<br />

Québec » (43). Comme expression du droit commun, le Code fournit<br />

des règles supplétives. La valeur normative de la disposition préliminaire<br />

est désormais avérée (44). La reconnaissance de la portée opérationnelle<br />

de ce texte a été grandement facilitée par son intégration au Code<br />

sous forme de disposition. Son caractère normatif aurait, sans doute, été<br />

moins affirmé si elle avait plutôt pris la forme d’un préambule.<br />

Le législateur ne s’est pas limité à affirmer dans une disposition préliminaire<br />

le rôle fondamental joué par le Code dans l’ordonnancement du<br />

droit québécois, il s’est efforcé de nouer des liens avec des matières souvent<br />

éloignées de la sphère d’attraction du Code. Au chapitre des personnes<br />

morales, le Code distingue celles-ci suivant qu’elles relèvent du<br />

droit public ou du droit privé (298, C.c.Q.). Tout en reconnaissant que<br />

les « personnes morales de droit public sont d’abord régies par les lois<br />

particulières qui les constituent et par celles qui leur sont applicables »,<br />

le Code ajoute que ces personnes sont également assujetties aux prescriptions<br />

du droit civil lorsque les dispositions de ces lois particulières<br />

doivent être complétées (300, C.c.Q.) (45). Le Code fournit, par<br />

ailleurs, une définition du contrat de consommation (1384, C.c.Q.),<br />

même si le législateur a renoncé à son projet initial d’intégrer au Code<br />

les règles particulières applicables à ce type de contrat. Pour sa part, le<br />

contrat de travail est l’objet d’un chapitre distinct au titre consacré aux<br />

contrats nommés (2085-2097, C.c.Q.). La pertinence de ce chapitre<br />

avait toutefois été remise en question au nom de la cohésion d’un droit<br />

déjà régi par le Code du travail (46).<br />

2. — La prééminence accordée à la personne<br />

Les nouvelles orientations privilégiées par le Code concernent au premier<br />

plan le droit de la personne. Si le Code précédent s’était caractérisé<br />

par la place centrale qu’il accordait au droit des obligations dans l’ordonnancement<br />

du droit, le nouveau Code se distingue par la prééminence<br />

qu’il reconnaît au droit des personnes ainsi que l’affirme le ministre<br />

de la Justice dans sa présentation du livre consacré aux personnes : « Il<br />

met davantage en lumière que ne le faisait le Code civil du Bas-Canada,<br />

la primauté accordée à la personne humaine » (47). Cette orientation est<br />

tout à fait compatible avec les instruments de droit public, que sont la<br />

Charte canadienne des droits et libertés (48) et la Charte [québécoise]<br />

des droits et libertés de la personne (49), qui sont venus consacrer les<br />

droits fondamentaux de la personne en droit canadien et québécois.<br />

La volonté manifeste d’assurer la prépondérance de la personne amène<br />

le législateur à énoncer des droits et des libertés fondamentales déjà reconnus<br />

par la Charte [québécoise] des droits et libertés de la personne<br />

(50). En reprenant certains de ces principes, le Code en précise la portée<br />

pour les matières qui relèvent du droit civil. Après avoir affirmé que<br />

tout être humain possède la personnalité juridique (1, C.c.Q.), le Code<br />

reconnaît à la personne la titularité de droits de la personnalité dont « le<br />

droit à la vie, à l’inviolabilité et à l’intégrité de sa personne, au respect<br />

de son nom, de sa réputation et de sa vie privée » (3, C.c.Q.). Ces droits<br />

extrapatrimoniaux sont, en outre, déclarés incessibles.<br />

Un titre, consacré à certains droits de la personnalité, vient compléter<br />

l’article qui énonce ces droits (10-49, C.c.Q.). Le principe de l’inviola-<br />

(43) Procureur général du Québec c. Tribunal d’arbitrage de la Fonction publique,<br />

[1998] R.J.Q. 2771, 2779 (C.S.).<br />

(44) Prud’homme c. Prud’homme, 2002 C.S.C. 85, § 30 (en ligne : disponible<br />

à l’adresse électronique suivante : http://www.lexum.umontreal.ca/csc-scc/fr/.<br />

(45) Patrice Garant, « Code civil du Québec, Code de procédure civile et société<br />

distincte », (1996) 37, Les Cahiers de droit 1141-1148 et Doré c. Ville de<br />

Verdun, supra, note 41, pp. 874-877 (le juge Gonthier).<br />

(46) Pierre Verge, « Faut-il “ nommer ” le contrat de travail? », (1988) 29, Les<br />

Cahiers de droit, 977-992.<br />

(47) Commentaires du ministre de la Justice, supra, note 24, p. 3.<br />

(48) Partie I de la loi constitutionnelle de 1982, constituant l’annexe B de la loi<br />

constitutionnelle de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, ch. 11.<br />

(49) L.R.Q., C-12.<br />

(50) Idem.<br />

2004<br />

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