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2004 252 s’agit assurément d’une fonction que n’avaient pas imaginée les rédacteurs du Code civil... IV. — DES ACTES DE MARIAGE, ET DES « ACTES DE DÉCLARATION » Alors que, comme le mariage lui-même, il avait assez bien résisté aux assauts du temps, c’est également à la fin du XXe siècle que le chapitre III de cette partie du Code civil, consacré aux actes de mariage, va être profondément revu. Le nouveau millénaire a sonné le glas des publications de mariage par voie d’affichage « devant la porte de la maison commune ». Un système entièrement nouveau d’acte de déclaration du désir de se marier, de constitution et contenu du dossier à déposer, de possible refus par l’officier de l’état civil de dresser l’acte ou de célébrer le mariage (et de recours contre ces décisions) a été mis en place par la loi du 4 mai 1999 (19) qui a totalement modifié les articles 63 et suivants du Code civil. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, ce n’est pas la nécessité de moderniser le système mis en place par le Code Napoléon qui est à l’origine de cette réforme, mais bien le souci de lutter contre un phénomène certainement beaucoup moins présent il y a deux cents ans, et en tout cas moins préoccupant : les mariages simulés... C’est pour mieux lutter préventivement contre ces « faux mariages » que les formalités préalables à la célébration du mariage ont été totalement réorganisées. Quant aux modifications successives de l’article 76 relatif au contenu de l’acte de mariage, elles ne sont quant à elles que les suites lo- (19) Entrée en vigueur le 1 er janvier 2000. Pour plus de détails, cf. J. Sosson, « Les mariés de l’an 2000 - Les nouvelles dispositions relatives à la simulation et aux formalités préalables au mariage », J.T., 2000, pp. 649-658. J.T. n° 6132 - 12/2004 Larcier - © Groupe Larcier s.a. aopsomer@gbl.be / Groupe Bruxelles Lambert / aopsomer@gbl.be giques d’autres modifications législatives de dispositions de fond dans des matières diverses (20). Il en est de même de la modification apportée par la loi du 13 février 2003 à l’article 75 relatif au déroulement de la cérémonie : il appartient maintenant aux mariés de déclarer solennellement qu’ils se prennent pour « époux » et non plus pour « mari et femme », puisqu’ils peuvent désormais être de même sexe... V. — DE L’AVENIR POSSIBLE...? Alors même qu’il fait l’objet de sévères et nombreuses critiques depuis fort longtemps (21), d’une manière générale le système d’état civil mis en place par les révolutionnaires puis par les rédacteurs du Code civil a en définitive assez bien résisté à l’épreuve du temps. On peut certes penser qu’il faudrait des registres centralisés, complets (reprenant tous les événements susceptibles d’affecter l’état mais aussi la capacité des personnes), généraliser les mentions marginales, etc. Il est possible qu’une réforme générale provienne un jour d’un autre législateur, européen par exemple, s’il s’avérait que la libre circulation des personnes rende nécessaire une harmonisation des différents systèmes. Mais est-ce indispensable et surtout possible, alors même que certains Etats (de common law notamment) ne connaissent ni la notion d’état, ni, a fortiori, la notion d’état civil...? Jehanne SOSSON (20) Modification par les lois du 14 juillet 1976 (régimes matrimoniaux), 31 mars 1987 (filiation), 19 janvier 1990 (majorité civile), 4 mai 1999 (mariage). (21) Notamment par de nombreux auteurs français tels que Planiol, Colin et Capitant, Weill, Terre, Marty et Raynaux, cités par H. De Page et J.-P. Masson, Traité élémentaire de droit civil belge, op. cit., t. I, p. 268, n o 264.
DU DOMICILE Livre I - Titre III I. — CONSTAT Qu’il est loin le temps de la mélodie de Philippe Chatel, « Avec ma maison sur le dos, comme un escargot ... »! Depuis la naissance du Code civil, en 1804, le domicile, considéré comme un attribut de la personnalité, est réglementé au travers des articles 102 à 111. Dix articles pour le définir, le déterminer et organiser les modalités de son changement; dix articles qui, somme toute, n’ont subi que peu de modifications durant ces deux siècles. Considéré comme une nécessité sociale en ce qu’il situe l’homme dans l’espace, le domicile est consacré par la loi aussi, et peut-être principalement, dans l’intérêt des tiers qui doivent pouvoir s’y adresser, avec la certitude d’atteindre l’individu qu’ils cherchent (1). II. — LE DOMICILE CIVIL La notion de domicile civil, encore appelé domicile réel, général ou de droit commun, s’entend, au sens de l’article 102 du Code, du lieu où une personne a son principal établissement, c’est-à-dire celui où elle a, à la fois, sa demeure, le centre de ses affaires, le siège de sa fortune, ses affections de famille, ses attaches permanentes, bref, le lieu où on la rencontre et la trouve généralement. L’acception du principal établissement est large : il dépend d’éléments factuels qui relèvent de l’appréciation souveraine du juge du fond (2). A côté de cet élément de fait coexiste un élément intentionnel qui conditionne la notion de domicile : le caractère réel du domicile s’accompagne de l’intention d’y fixer son principal établissement. Ce dernier élément apparaît clairement en cas de changement de domicile, qui ne se produit que « par le fait d’une habitation réelle dans un autre lieu, joint à l’intention d’y fixer son principal établissement » (art. 103, C. civ.). En principe, chaque citoyen choisit librement son domicile et peut le changer à sa convenance. Toutefois, la loi assigne d’office un domicile à certaines personnes pour des raisons qui dépendent soit de leur état, soit de leurs fonctions. C’est l’article 108, qui vise le domicile de droit tenant à l’état des personnes, qui a le plus évolué au fil du temps. La loi du 30 avril 1958 a d’abord supprimé la puissance maritale et l’incapacité de la femme mariée. Que les plus jeunes n’oublient pas qu’avant cette loi, le mariage entraînait l’attribution automatique pour la femme du domicile de droit de son mari : « la femme mariée n’a point d’autre domicile que celui de son mari », sauf en cas de séparation de corps ou de divorce (art. 108 et 204, C. Napoléon de 1804)! Le législateur de 1958, confirmé par celui de 1965, a reconnu à chacun des époux le droit d’établir, seul et librement, son domicile, tandis que le législateur de 1990, confirmé par celui de 1995, a introduit à l’article 108 la notion de résidence commune des père et mère, en lieu et place de domicile commun. Les époux peuvent donc avoir des domiciles distincts, notamment lorsqu’ils pratiquent chacun une profession, tout en exerçant le devoir réciproque de cohabitation à la résidence conjugale (3). (1) De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, t. 1 er , 2 e éd., n o 306. (2) Rép. not., « Le domicile, une notion plurielle » (V. d’Huart), t. I, 1. VII, éd. 2001, n o 20 et réf. cit. (3) Ibid., n o 11. J.T. n° 6132 - 12/2004 Larcier - © Groupe Larcier s.a. aopsomer@gbl.be / Groupe Bruxelles Lambert / aopsomer@gbl.be De même, le domicile du mineur non émancipé ne varie plus selon que l’enfant est légitime ou naturel (4). La loi du 31 mars 1987 sur la filiation a réalisé un bouleversement fondamental de notre droit civil, en mettant tous les enfants sur le même pied au regard de leurs parents et la loi du 13 avril 1995 relative à l’exercice conjoint de l’autorité parentale consacre le principe en traitant de la même façon les enfants du mariage et ceux nés hors mariage. Désormais, le mineur non émancipé a son domicile à la résidence commune de ses père et mère ou, si ceux-ci ne vivent pas ensemble, à la résidence de l’un d’eux (5). En sens inverse, l’article 109 du Code civil, qui vise le domicile de droit tenant aux fonctions, est resté intact : « les majeurs qui servent ou travaillent habituellement chez autrui, auront le même domicile que la personne qu’ils servent ou chez laquelle ils travaillent, lorsqu’ils demeureront avec elle dans la même maison ». Cette domiciliation légale, qui correspondait certes aux réalités sociales du début du XIXe siècle, paraît particulièrement surannée aujourd’hui et fait d’ailleurs l’objet des critiques de la doctrine moderne (6). III. — LE DOMICILE, UNE NOTION PLURIELLE La difficulté de la notion de domicile réside incontestablement dans le fait qu’elle est plurielle. Même si chaque individu n’a qu’un seul et unique domicile, celui de son principal établissement, il n’en reste pas moins que le sens du terme domicile varie selon les matières concernées. Il en va ainsi des domiciles dits spéciaux, créés en vue de circonstances particulières et qui ne coïncident pas nécessairement avec le domicile du Code civil. Le domicile élu est un domicile fictif, indépendant du domicile général, qui subsiste entièrement par ailleurs, créé volontairement ou imposé par la loi, pour l’exécution d’un acte ou d’une série d’actes déterminés. Le domicile politique, électoral ou d’éligibilité est celui où le citoyen peut exercer ses droits politiques, c’est-à-dire le domicile réel, le lieu d’habitation réelle. Le domicile de secours est le lieu où le citoyen a droit à l’aide sociale, soit le lieu de sa présence effective et habituelle. Le domicile en droit pénal et en droit constitutionnel s’entend, quant à son inviolabilité, de toute habitation, même passagère, occupée par une personne qui y a droit, à ce titre, au respect de son intimité, de sa tranquillité et plus généralement, de sa vie privée. Le Code judiciaire a introduit une autre notion du domicile. En effet, pour l’application du Code de 1967 et de l’ensemble des autres lois de procédure, sauf dispositions dérogatoires de stricte interprétation (art. 2, C. jud.), seul le lieu de l’inscription sur les registres de la population peut être pris en considération pour déterminer le domicile d’une personne physique établie en Belgique (art. 36, C. jud.). Il est vrai cependant que l’adresse renseignée pour le domicile est généralement la même en droit civil et en droit judiciaire, lorsqu’une personne est inscrite à titre principal au lieu de son principal établissement. Cette solution est d’ailleurs requise tant par le contenu de l’article 102 du Code civil (le domicile est au lieu du principal établissement) que par le critère déterminant l’inscription dans les registres de la population (la résidence principale). Ainsi, au-delà de la distinction théorique des concepts, les deux notions se rapprochent : le domicile est le lieu du principal établissement (art. 102, C. civ.), c’est-à-dire le lieu où la personne a son habitation réelle (art. 103, C. civ.) et où elle a établi le centre de ses (4) De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, t. 1 er , 2 e éd., n o 321. (5) Rép. not., « Le domicile, une notion plurielle », op. cit., n os 22 et s. (6) De Page, Traité élémentaire de droit civil belge, t. 1 er , 2 e éd., n o 174; R.P.D.B., v o « Domicile » (N. Gallus), compl. t. VIII, n o 49. 2004 253
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