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Le Graal tome 6 - Perceval Le Gallois

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conduis ainsi.<br />

— Je te remercie, seigneur, et vais te révéler pourquoi je suis venu en ce lieu. C’est la jeune fille aux<br />

cheveux noirs, la même qui t’a confié le brachet, qui me dépêcha ici. Pour mériter son amour, je chassai<br />

le Blanc Cerf et le pris, grâce au brachet qu’elle m’avait confié à moi aussi. Sur ces entrefaites, la<br />

cavalière qui t’a ravi la tête et le brachet vint aussitôt me les prendre pareillement. Ainsi qu’à toi-même,<br />

elle promit de me les rendre si je venais ici demander à quelqu’un de me combattre. Je le fis, et un<br />

chevalier sorti de dessous cette pierre m’attaqua. Mais lorsque, l’ayant vaincu, je voulus reprendre<br />

possession de la tête et du brachet, je m’aperçus que la cavalière avait disparu, emportant ce qu’elle<br />

devait me rendre.<br />

« J’allai alors conter mon aventure à celle qui m’avait promis son amour. Elle m’assura que je<br />

l’obtiendrais si j’accomplissais son service trois années durant. Elle m’envoya donc en ce lieu, me disant<br />

d’y remplacer l’homme que j’avais défait et de livrer bataille à qui viendrait me provoquer. Mais si<br />

j’avais le malheur de mordre la poussière, alors elle ne m’aimerait jamais. Voilà, seigneur, ce qu’il en<br />

est de moi. Je sais que j’ai été fou d’aimer cette femme. Elle est aussi fausse que malveillante, mais je ne<br />

saurais vivre sans l’espoir de la conquérir. Au-dessous de cette pierre est un souterrain qui mène à une<br />

vaste salle. C’est là que je réside et que j’ai emmené ton cheval. Si tu le veux bien, nous allons conclure<br />

un arrangement. Tu reprendras ton cheval, mais nous troquerons nos boucliers. Ainsi pourrai-je montrer<br />

le tien à celle que je désire si follement, et elle ne pourra douter de ma prouesse. – Par ma foi, dit<br />

<strong>Perceval</strong>, j’y consens, mais à une condition : c’est que tu ne te vantes jamais devant personne de m’avoir<br />

pris par la force ce bouclier. – Je t’en fais le serment », dit l’homme noir.<br />

Sur ce, ils entrèrent dans le souterrain qui les mena dans une salle grande et belle, aux murs de<br />

laquelle étaient suspendus nombre de boucliers. Des torches éclairaient cette salle où se pouvaient<br />

admirer une mappemonde, la plus belle qu’on eût jamais vue et faite d’or fin, ainsi que des meubles de<br />

haut prix, en marqueterie ou en ivoire. <strong>Perceval</strong> remit son bouclier à l’homme noir qui l’accrocha sur une<br />

cheville puis dit : « Seigneur, choisis parmi les autres celui qui te plaît le mieux. » <strong>Perceval</strong> fit le tour de<br />

la salle et y remarqua un bouclier très large, tout en sinople sur argent. Il s’en saisit et le mit à son cou.<br />

« J’en ai trouvé un qui me convient, dit-il. Il ressemble fort au mien, mais il est encore plus beau, et je<br />

dois me réjouir de l’échange. Toutefois, je voudrais te demander quelque chose : puisque tu es céans<br />

depuis si longtemps, peut-être as-tu entendu dire où se trouvait une forteresse en laquelle réside un roi<br />

boiteux qui se fait appeler le Roi Pêcheur ?<br />

« Par ma foi, répondit l’homme noir, si je le savais, je te le dirais de grand cœur. Mais je n’ai rien<br />

entendu à ce sujet, je peux te l’assurer. Cependant, si tu veux en savoir davantage, traverse cette vallée et<br />

descends le cours de la rivière jusqu’à la mer. Il y a là une cité où je n’ai jamais mis les pieds, mais que<br />

l’on connaît sous le nom de Château des Merveilles. Quelles sont ces merveilles, je l’ignore, mais là,<br />

peut-être pourra-t-on te renseigner sur le Roi Pêcheur. Au sortir d’ici, tu verras un grand pin au pied<br />

duquel s’ouvre un chemin. Si tu suis celui-ci, tu ne te perdras pas. » <strong>Perceval</strong> salua le chevalier, et,<br />

reprenant son cheval qu’il était tout heureux d’avoir retrouvé, il sortit. L’homme noir le raccompagna<br />

jusqu’à la pierre plate. « Je te recommande à Dieu, chevalier ! » lui dit-il. Alors, <strong>Perceval</strong> aperçut le pin<br />

et s’engagea sur le chemin que l’autre lui avait indiqué.<br />

À une lieue de là, il aperçut la cavalière qui avait prétendu lui ravir le brachet et la tête du Blanc Cerf.<br />

Sachant à quoi s’en tenir sur elle, il ne s’arrêta pas, ne la salua pas et se contenta de la dépasser.<br />

Toutefois, après un instant de réflexion, il se ravisa et l’attendit et, dès qu’elle fut parvenue à sa hauteur,<br />

il porta la main au frein de son cheval et l’apostropha en ces termes : « Femme ! sache que je ne<br />

retournerai jamais au Château de l’Échiquier. Tu peux dire à celle qui m’a confié le brachet qu’elle a eu<br />

tort de s’imaginer pouvoir me duper et me tourner en dérision. Je m’en vais et ne reviendrai jamais en ces<br />

lieux. – C’est grand dommage, répondit la cavalière. Ton amie s’attristera fort en apprenant que tu

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