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Le Graal tome 6 - Perceval Le Gallois

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chemin sur la mule qui savait parfaitement quelle route prendre. Dès la première heure, il avait parcouru<br />

une longue distance, et il ne se lassait pas de regarder l’anneau et sa pierre. Il parvint bientôt à une<br />

rivière que traversait un pont de verre. Alors, il s’arrêta et regarda : large d’une portée d’arbalète, la<br />

rivière était si profonde et périlleuse qu’aucune barque, si grande et si parfaite fût-elle, n’eût pu la<br />

franchir, car le courant était fort et rapide. Quant au pont, il semblait des plus fragiles : il était en verre,<br />

large de deux pieds et demi, et si transparent que l’on pouvait voir, en dessous, l’eau véhémente comme<br />

une tempête.<br />

Sans s’attarder davantage, <strong>Perceval</strong> relâcha le frein et, aussitôt, la mule monta sur le pont fragile.<br />

Derrière, venait le cheval, mené par la bride. <strong>Le</strong> <strong>Gallois</strong> y tenait beaucoup et n’aurait jamais consenti à<br />

l’abandonner. Or, si la blanche mule avançait lentement, d’un pas très sûr, le cheval néanmoins suivait à<br />

grand-peine et grande terreur, tant le pont était périlleux. Quand ils se trouvèrent en son milieu, des<br />

craquements sinistres se firent entendre, et le pont ployait, vacillait si fort qu’il sembla devoir s’effondrer<br />

dans l’abîme. Mais <strong>Perceval</strong>, se fiant aveuglément à la mule, ne s’en alarma point.<br />

Cependant, une fois parvenu de l’autre côté, il jeta un regard en arrière et s’ébahit de voir le pont<br />

intact et en bon état. « Pourtant, se disait-il, je l’ai bien senti se briser et voler en éclats ! Certes, ce doit<br />

être une chose terrible pour un poltron que de traverser ce pont de verre ! » Il aperçut alors, à l’orée d’un<br />

bois, un homme d’aspect fort sage qui, un cor d’ivoire au col, tenait une épée dans son poing. Deux<br />

lévriers l’accompagnaient. Il avait fière prestance sur son cheval bai, tout désarmé qu’il fût, haut<br />

retroussé et simplement chaussé de bottes. Après l’avoir examiné, <strong>Perceval</strong> le salua le premier. L’homme<br />

répondit : « Seigneur, que Dieu te donne joie et bonheur et qu’Il te procure tout ce que ton cœur peut<br />

désirer ! – Beau seigneur, qu’il en soit ainsi pour toi-même. Maintenant, dis-moi qui tu es et ce que tu fais<br />

ici. – Je n’ai pas de raison de te le cacher, cher seigneur, je suis Briol de la Forêt Brûlée. Et toi ? Il me<br />

tarde de savoir ton nom. – Jadis, on m’appelait le Fils de la Veuve Dame, mais on me nomme aujourd’hui<br />

<strong>Perceval</strong> le <strong>Gallois</strong>. Or je t’en prie par Dieu tout-puissant, si tu le sais, dis-moi sans nulle feinte où se<br />

trouve la forteresse où réside un roi boiteux qui se fait appeler le Roi Pêcheur. – Voilà une étrange<br />

question ! s’étonna Briol de la Forêt Brûlée. Du moins me prouve-t-elle que tu n’es pas l’un de ces<br />

chevaliers qui ne pensent qu’à tuer des comtes pour épouser leurs veuves et hériter de leurs domaines.<br />

D’ailleurs, tu es passé par le Pont de Verre, épreuve que peu de gens ont surmontée jusqu’à ce jour. Je<br />

n’en éprouve que davantage de respect pour toi.<br />

— Voilà qui est fort bien, dit <strong>Perceval</strong> qui commençait à s’impatienter, mais je t’ai demandé si tu<br />

savais quel chemin mène à la demeure du Roi Pêcheur ! – J’ai bien entendu, répondit Briol, seulement,<br />

pour s’y rendre, il faut emprunter un pont que personne ne peut franchir. – Je le franchirai bien, moi ! » dit<br />

<strong>Perceval</strong>. Briol de la Forêt Brûlée se prit à sourire. « Enfant ! dit-il, tu ne sais de quoi tu parles. À ma<br />

connaissance, nul ne l’a jamais franchi parce qu’il est inachevé. Or, il ouvre le seul chemin vers la<br />

forteresse du Roi Pêcheur. – Peu importe ! répliqua le <strong>Gallois</strong>. Je t’en prie, pour l’amour de Dieu,<br />

conduis-moi à ce pont. – Il est tard, et la nuit va bientôt tomber. Je t’y mènerai demain. D’ici là, mieux<br />

vaudrait venir te reposer en mon manoir. – Volontiers, seigneur ! » dit <strong>Perceval</strong>.<br />

Ils entrèrent tous deux dans le bois et, tout en chevauchant, devisèrent de choses et d’autres. Comme le<br />

trophée du Blanc Cerf n’avait pas manqué d’attirer les regards de Briol et de susciter sa curiosité,<br />

<strong>Perceval</strong> lui conta ses aventures et lui montra le brachet qu’il tenait toujours en son giron. Il ne cacha rien<br />

non plus de la mule que lui avait prêtée la jeune fille, ni de l’anneau qu’il portait au doigt.<br />

En suivant de conserve le sentier, ils arrivèrent bientôt devant le manoir que protégeaient de<br />

puissantes murailles de marbre et, sitôt devant la porte, Briol sonna par deux fois de son cor. À<br />

l’intérieur, un valet répliqua de même et à longue haleine, et la cour se remplit de serviteurs et de<br />

chevaliers qui vinrent à leur rencontre. <strong>Le</strong> maître du château commanda de faire honneur à <strong>Perceval</strong> et de<br />

le servir comme leur seigneur. <strong>Le</strong>s chevaliers les aidèrent alors à descendre de leurs montures et prirent

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