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Le Graal tome 6 - Perceval Le Gallois

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armes. » <strong>Le</strong> chevalier à la coupe d’or ne put se retenir de rire, vu l’accoutrement du jeune <strong>Gallois</strong>. « Tu<br />

as bien raison, lui répondit-il. Va donc et reviens vite. Au fait, tu en profiteras pour dire au roi, un<br />

mauvais roi que Dieu maudisse, que, s’il ne veut tenir sa terre de moi, il me la rende ou envoie quelqu’un<br />

la défendre. Car, je le déclare solennellement, tout ce que le roi Arthur s’imagine posséder m’appartient.<br />

— Je ne comprends rien à tes paroles, répondit le jeune homme. Tout ce que je sais, c’est que je veux<br />

tes armes et que je vais de ce pas les demander au roi Arthur. » Alors, sans plus attendre, il pénétra dans<br />

la forteresse. Il eut tôt fait d’y repérer le logis le plus vaste et, le supposant devoir être celui du roi, en<br />

franchit le seuil sans prendre la peine de descendre de cheval.<br />

Tous les hommes qu’il trouva là demeuraient immobiles, la tête baissée, de peur d’être désignés pour<br />

aller venger l’outrage fait à Guenièvre. Il leur semblait en effet que jamais personne n’aurait accompli<br />

forfait si insolent sans la garantie de pouvoirs magiques susceptibles de le protéger. Kaï se tenait debout,<br />

au milieu de la salle, plongé dans ses pensées. « Hé ! toi, l’Homme Long(12) ! l’apostropha le fils de la<br />

Veuve Dame, où est Arthur ? » Kaï dévisagea d’un air abasourdi celui qui l’interpellait de la sorte : en<br />

vérité le garçon, vêtu comme un rustre et monté sur un bidet gris pommelé passablement mal attifé,<br />

détonnait fort parmi les courtisans. « Que veux-tu donc à Arthur ? demanda Kaï. – Ma mère m’a<br />

recommandé de venir vers lui pour me faire armer chevalier. » Kaï se mit à rire : « Par ma foi, dit-il, tu<br />

es trop jeune, trop mal monté, et trop mal équipé ! »<br />

Tous les gens de la cour jetèrent alors les yeux de son côté, et l’accoutrement de l’intrus leur parut si<br />

bizarre qu’ils éclatèrent de rire et, en signe de dérision, se mirent à lui lancer des baguettes. Mais, à ce<br />

moment, entra un nain qui, un an auparavant, était venu avec une naine demander refuge au roi Arthur. <strong>Le</strong><br />

roi lui avait accordé sa requête mais, depuis, de toute l’année, ni le nain ni la naine n’avaient prononcé la<br />

moindre parole. Or, celui-ci, en apercevant le fils de la Veuve Dame, s’écria : « Dieu te bénisse,<br />

<strong>Perceval</strong>, beau fils d’Evrawc, chef des guerriers, fleur des chevaliers ! – En vérité, dit Kaï, il faut être<br />

malavisé et complètement fou pour demeurer une année entière muet à la cour d’Arthur, malgré la liberté<br />

de parler à qui bon vous semble, et pour oser ainsi, à la face du roi et de tous ses gens, déclarer qu’un<br />

individu de cet acabit est un chef de guerriers, la fleur des chevaliers ! »<br />

Sur ce, Kaï donna au nain un tel soufflet qu’il l’étendit sur le sol, évanoui. Au même moment, la naine<br />

entra dans la salle. « Ha ! ha ! s’écria-t-elle en apercevant le jeune homme, Dieu te bénisse, <strong>Perceval</strong>,<br />

beau fils d’Evrawc, fleur des guerriers et lumière des chevaliers ! – En vérité, femme, dit Kaï, c’est être<br />

bien malavisée que de rester une année entière sans souffler mot à la cour d’Arthur et puis d’appeler ainsi<br />

un tel rustre ! » Et il donna à la naine un coup de pied si violent qu’elle tomba à terre, évanouie.<br />

« Toi, l’homme long, reprit celui que le nain et la naine avaient appelé <strong>Perceval</strong>, indique-moi où est<br />

Arthur. – Laisse-nous en paix, répondit Kaï. Va donc à la poursuite du chevalier qui est sorti d’ici pour<br />

aller sur le pré, enlève-lui la coupe d’or, renverse-le, prends son cheval et ses armes. Cela fait, peut-être<br />

obtiendras-tu d’être armé chevalier. – Et ainsi ferai je, rétorqua <strong>Perceval</strong>, mais toi, l’Homme Long, sur<br />

ma foi, tu paieras très cher tes insultes au nain et à la naine. » Et, sans plus attendre, il tourna bride, sortit<br />

de la salle et se dirigea vers le pré.<br />

<strong>Le</strong> chevalier attendait patiemment son heure, et, pour être plus à l’aise, il avait posé la coupe d’or sur<br />

un perron de pierre bise et caracolait tout autour comme pour montrer qu’il ne craignait personne. Quand<br />

le jeune homme se fut approché, le chevalier lui cria : « Valet ! as-tu vu quelqu’un de la cour d’Arthur<br />

venir par ici ? – Je n’ai vu personne, répondit <strong>Perceval</strong>. Mais un Homme Long qui se trouvait là-bas m’a<br />

commandé de te renverser, de te ravir la coupe, ainsi que ton cheval et tes armes. – Tais-toi, valet, et<br />

retourne d’où tu viens. Tu commanderas à Arthur, de ma part, de venir, lui ou un autre, m’affronter. S’il<br />

n’obtempère pas immédiatement, je n’attendrai pas davantage et j’irai partout clamant que le roi Arthur<br />

est un lâche et que les chevaliers de la Table Ronde ne sont capables que de pérorer parmi les dames de<br />

la cour. – Tu n’as pas compris ce que je disais, reprit <strong>Perceval</strong>. Je t’ordonne de me donner la coupe, ton

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