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Le Graal tome 6 - Perceval Le Gallois

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les croix et regarda encore la colonne. Un anneau s’y trouvait fixé, mais le <strong>Gallois</strong> n’aurait su dire s’il<br />

était d’or ou d’argent. Une bande d’argent très fin l’entourait, qui portait une inscription. Il s’approcha<br />

pour la déchiffrer et lut que nul chevalier, à moins de pouvoir s’égaler au meilleur chevalier du monde,<br />

ne devait attacher son cheval à l’anneau. Sans s’en émouvoir autrement, <strong>Perceval</strong> redescendit un peu, mit<br />

pied à terre, saisit les rênes de son cheval et, tirant celui-ci, les noua autour de l’anneau. <strong>Le</strong> cheval se<br />

coucha sur l’herbe, au pied de la colonne, et demeura paisible. <strong>Perceval</strong> prit alors son bouclier et<br />

l’appuya contre celle-ci, de même que sa longue lance au tranchant d’acier. Après quoi il demeura<br />

debout, tout à côté, afin de regarder ce qui se passerait et d’écouter ce qu’il pourrait entendre.<br />

Survint une femme, montée sur une jument blanche au trot. Elle s’arrêta devant <strong>Perceval</strong>, mit pied à<br />

terre et, sans un mot, retira son manteau, se révélant seulement vêtue d’une robe de soie légère à travers<br />

laquelle se devinait chacun des contours de son corps. <strong>Perceval</strong> ne put s’empêcher d’admirer sa beauté et<br />

d’éprouver des frissons de désir. Il la salua, et elle lui rendit son salut, mais toujours sans prononcer un<br />

mot. Elle s’approcha seulement du cheval attaché à l’anneau et, de son manteau, lui flatta l’encolure et la<br />

tête en lui faisant de grandes démonstrations d’amitié. <strong>Le</strong> <strong>Gallois</strong> se sentait maintenant fort gêné, tant il lui<br />

semblait inconvenant que la femme lui préférât l’animal. Du coup, il prit la parole et dit : « Amie, laisse<br />

mon cheval tranquille. C’est à moi de m’en occuper, il me semble. »<br />

Elle se retourna. « Chevalier, dit-elle, en caressant ton cheval, c’est un honneur que je lui prodigue et,<br />

par là même, à toi que je le destine. Tous ceux qui vivent sur cette terre devraient honorer ton destrier<br />

ainsi que ton corps, et s’incliner devant eux bien plus bas qu’on ne le fait dans une église devant un autel.<br />

Car m’est avis qu’on n’eût pu trouver en ce monde mortel chevalier plus digne que toi d’escalader cette<br />

montagne. Tu as attaché ton cheval à l’anneau fiché sur la colonne : tu peux te vanter d’avoir accompli en<br />

ce jour ce que jamais chevalier ne fit sans être châtié. – Belle, pardonne-moi, mais il y a par le monde<br />

d’excellents chevaliers, et je ne me tiens pas pour le meilleur. – Tu es courtois et modeste, dit-elle, mais<br />

n’en parlons plus. Allons sur l’autre versant jusqu’à mon pavillon. On t’y fera autant d’honneur que tu le<br />

mérites, et je t’assure que je m’y emploierai de mon mieux. Je crois que je n’aurai jamais connu de plus<br />

grand bonheur qu’aujourd’hui. »<br />

<strong>Le</strong> <strong>Gallois</strong> ayant répondu qu’il acceptait de bon cœur, tous deux remontèrent sur leurs chevaux et s’en<br />

furent d’une traite jusqu’à la tente qui était riche, grande et belle. Sur l’autre versant de la montagne, en<br />

une lande, elle était dressée sous un sapin dont la verte ramure se déployait jusqu’à terre. À leur arrivée,<br />

des valets et des servantes vinrent au-devant d’eux et les aidèrent à mettre pied à terre. <strong>Perceval</strong> fut<br />

désarmé, et on le revêtit d’un riche manteau de soie fourré de petit-gris. <strong>Le</strong>s tables furent dressées et,<br />

après s’être lavé les mains, la femme et lui s’installèrent pour se restaurer. Quand ils eurent fini, on<br />

desservit les tables et on leur prépara de bons lits, car la nuit approchait, et il fallait penser au repos. En<br />

attendant, <strong>Perceval</strong> et la femme s’en allèrent se promener sur la lande où ils trouvèrent bientôt un endroit<br />

propice pour s’asseoir, près d’une grosse touffe d’ajoncs épineux. <strong>Perceval</strong> demanda alors à son hôtesse<br />

qui elle était, d’où elle venait et pourquoi elle avait fait dresser sa tente au flanc de cette étrange<br />

montagne.<br />

« Seigneur, répondit-elle, on me connaît sous le nom de Demoiselle de la Cime. C’est moi qui possède<br />

cette montagne, mais j’ai un château dans la vallée, non loin d’ici. De temps à autre, j’aime venir en ces<br />

lieux passer quelques jours auprès de cette Colonne de Cuivre qui m’évoque bien des souvenirs, ainsi<br />

que nombre d’espoirs déçus. – Mais cette Colonne de Cuivre ? dit <strong>Perceval</strong>. Je ne vois toujours pas ce<br />

qu’elle signifie. Ne veux-tu pas m’éclairer sur ce sujet ? – C’est une histoire qui n’est pas de ce temps,<br />

répondit-elle, mais je veux bien te la conter si tu le désires. – Certes, belle amie, dit le <strong>Gallois</strong>, je serai<br />

très heureux de t’écouter.<br />

— Eh bien, voici, commença la Demoiselle de la Cime. Quand le roi Uther Pendragon régnait sur l’île<br />

de Bretagne, vivait une jeune fille qui était prophétesse. Or, un jour, elle vint trouver le roi qui se trouvait

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